MÉRIGA Luc (LIGER Maurice dit)

Par Madeleine Rebérioux

Né en 1895, mort en 1965 ; ingénieur ; animateur de la Ghilde des forgerons ; socialiste.

Bachelier, Maurice Liger dit Luc Mériga, entra comme technicien au service de la Ville de Paris : de concours en concours il deviendra ingénieur et le restera jusqu’à sa retraite. Passionné d’art et de littérature, déjà membre des Jeunesses socialistes, il fonda en 1911-1912, avec quelques amis de son âge, une communauté militante, intellectuelle et artistique, la Ghilde des forgerons, très représentative de ces milieux de jeunes qui à la veille de la guerre voulaient forger une authentique culture socialiste moderne. Il la dirigea jusqu’en 1920. Conférences, concerts, expositions, maison d’édition : la Ghilde ne s’interrompit que quelques mois au début de la guerre. Avec Mériga — qui n’avait pas été mobilisé — elle fit partie dès novembre 1914 du réseau Romain Rolland. Au début de 1917, Mériga lança la Forge, une petite revue où il affichait la couleur par un long poème : « Rouge, couleur de vie ». La Ghilde s’installa rue Monsieur le Prince dans la boutique de Paul Delesalle. Elle recruta dans les milieux pacifistes plus ou moins révolutionnaires : Séverine, Henry Marx, Rappoport. En juin 1919, son troisième banquet fut dédié à Barbusse : « Vous avez rendu l’art à sa mission naturelle, déclara Mériga. Vous en avez fait l’expression la plus haute de la vie sociale. »

En 1919 Mériga fut élu à la commission exécutive des Jeunesses socialistes de la Seine. Il cessa de faire paraître la Forge qui avait atteint près de mille abonnés et fonda, dans la tradition dreyfusienne, une éphémère Université du peuple. En fait la lute politique prit le dessus. Luc Mériga signa un « appel aux socialistes en faveur de la IIIe Internationale » qui préconisait le ralliement des JS à la nouvelle internationale et qui fut publié dans le Journal du Peuple (23 janvier 1920) puis repris dans le premier numéro du Bulletin communiste. Le 7 février 1920, il signa dans l’Humanité la motion du Comité de la IIIe Internationale en faveur de l’adhésion immédiate. Lors de la conférence nationale des Jeunesses tenue à Troyes le 4 avril 1920, il fut élu à la direction au titre de la minorité favorable à l’adhésion sans réserve à l’Internationale communiste des jeunes avec Maurice Laporte, Renan Radi.

Le 25 juillet 1920, Luc Mériga fut l’un des principaux intervenants au congrès de la minorité des JS organisé par le Comité pour l’autonomie et la IIIe Internationale. Il se déclara contre la scission et favorable à la formation des Jeunesses communistes. A l’issue du congrès, il fut nommé à la commission d’élaboration d’un programme communiste. Il n’occupa plus de fonction après le congrès national extraordinaire tenu à la Bellevilloise le 1er novembre 1920. Par contre, il fut élu à la commission adulte de la Fédération socialiste de la Seine sur la liste du comité de la IIIe Internationale.

En 1921, il devint à la fois membre du conseil d’études et secrétaire de l’École du propagandiste ainsi que membre de la commission exécutive de la Fédération de la Seine. En 1922, avec Paul Desanges, Luc Mériga édita et préfaça des Pages choisies de Jean Jaurès. Tous deux publièrent une Vie de Jaurès en 1938.

On ne sait quand Luc Mériga s’était retiré de l’action militante directe. Il se consacra à la peinture, aux livres, à la mémoire de Jaurès. Quand se créa en 1959 la Société d’études jaurésiennes, il en fut membre et il léguera ses collections d’imprimés au Musée Jaurès de Castres. Sa femme partageait ses enthousiasmes.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article121774, notice MÉRIGA Luc (LIGER Maurice dit) par Madeleine Rebérioux, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 9 octobre 2018.

Par Madeleine Rebérioux

ŒUVRES : Pages choisies de Jean Jaurès, Rieder, 1922. — Vie de Jean Jaurès, éditions Nantal, 1938.

SOURCES : L’Humanité, 1919-1921. — Bulletin communiste, n° 1, 1er mars 1920. — J. Varin, Jeunes comme JC., Éditions sociales, 1975. — D. Tartakowsky, Écoles et éditions communistes, 1921-1933, op. cit. — F. Castaing, « Aux origines des Jeunesses communistes de France », le Mouvement social, n° 74, janvier-mars 1971. — Paul Desanges, « Chronique d’une communauté militante : les Forgerons », Le Mouvement social, avril-juin 1975. — Bulletin de la Société d’études jaurésiennes, avril-juin 1965. — Christophe Prochasson, Place et rôle des intellectuels dans le mouvement socialiste français, 1900-1920, Thèse, Paris I, 1989.

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