MERZET Étienne, dit MERZET fils ou le Porion

Par Madeleine Rebérioux

Né le 13 janvier 1869 à Montchanin-les-Mines (Saône-et-Loire), mort le 14 février 1934 à l’hôpital de Saint-Vallier ; ouvrier mineur ; militant syndicaliste et socialiste.

Fils d’ouvrier, Étienne Merzet quitta l’école à l’âge de onze ans et travailla d’abord dans une briqueterie avant d’entrer à la compagnie des mines de Blanzy. C’est en 1899 que sa vie militante sortit pour la première fois de l’anonymat. Il passe en effet pour avoir, le 6 juin, déclenché au puits Saint-François la grève qui allait avoir dans tout le pays, mais d’abord dans le bassin et la ville de Montceau, de si grandes répercussions. C’est alors qu’il devint secrétaire du syndicat des mineurs de Montceau et qu’il adhéra au socialisme. En mai 1900, il entra au conseil municipal de la ville sur la liste conduite par Bouveri de qui il sera toujours très proche et, en novembre de la même année, c’est en tant que conseiller municipal qu’il fut élu membre du conseil d’administration de la librairie-imprimerie ouvrière qui venait de se constituer. Il s’occupera d’ailleurs toujours activement de Montceau, y animant en particulier un " groupe artistique et syndical " très actif.

L’année 1901 fut pour lui une année d’expériences dramatiques. Membre du Conseil national de la Fédération des ouvriers-mineurs de France, il tenta en vain d’obtenir que la Fédération soutienne la nouvelle grève des mineurs commencée à Montceau le 21 janvier et qui allait durer jusqu’au 8 mai. Malgré deux référendums en faveur de la grève générale, le Conseil national réuni le 5 mai à Saint-Étienne ajourna la grève. En octobre, un troisième référendum se prononça à nouveau en faveur de la grève. Merzet mena une dure bataille contre Lamendin à une nouvelle séance du Conseil qui se réunit encore à Saint-Étienne les 20-22 octobre : il fut battu. En décembre, il entreprit une tournée dans le Nord pour obtenir un congrès extraordinaire. Celui-ci eut lieu le 4 mars 1902 à Alais (Gard) en l’absence de Merzet : la scission était consommée avec son approbation. Le syndicat de Montceau et quelques autres se jugeaient trahis par ceux qui avaient refusé d’appliquer les règles de la solidarité ouvrière malgré trois référendums successifs, les dirigeants socialistes " de droite ", Basly, Lamendin et Cotte.

Porté par la vague de gauche, Merzet avait fait adhérer son syndicat à la CGT. Après une ultime tentative de réconciliation repoussée en mai 1903 par Basly et Lamendin, les syndicats scissionnistes se fédérèrent. Le 1er mai 1904, au congrès constitutif de l’Union fédérative des mineurs adhérente de la CGT, Merzet en fut élu secrétaire. Il le restera jusqu’en 1906 et fera transférer à Montceau le siège de la nouvelle organisation qui jouera, à l’intérieur de la confédération, un rôle plutôt centriste.

Il demeura pourtant profondément partisan de l’unité, à la différence des animateurs plus ou moins anarchistes du " Jeune Syndicat ". Il l’était aussi de l’unité socialiste. En août 1905, au congrès fédéral de Saint-Vallier, il fut élu membre de la commission de contrôle du journal fédéral Le Socialiste de Saône-et-Loire et membre de la commission de propagande de la Fédération SFIO. Ses dons d’orateur, sa popularité en firent un dirigeant écouté, bon organisateur de surcroît. Il avait d’ailleurs quitté la mine : il était devenu receveur des droits de place à Montceau.

En 1906, les " excès broutchoutistes " du " Jeune syndicat " l’ont définitivement rallié à la réalisation rapide de l’unité entre les deux fédérations de mineurs. Aussi, lorsqu’au congrès de la vieille Fédération qui se réunit à Saint-Étienne du 27 juin au 2 juillet 1906 fut voté le principe de la réunification, Étienne Merzet et Jean-Baptiste Meulien (de Montceau lui aussi) l’acceptèrent aussitôt, " hâtivement " dira Pouget. Le Congrès d’unification aboutit à la constitution de la Fédération nationale des syndicats d’ouvriers mineurs et similaires de France. Merzet ne fit pas partie de son bureau. Il rentrera seulement le 12 juillet 1908, après de nombreux incidents et de nouvelles et passagères scissions, au Conseil national de la Fédération qui aura encore changé de nom et s’appellera Fédération nationale des syndicats de mineurs, adhérente de la CGT.

Merzet, à qui les " extrémistes " n’avaient jamais fait confiance, était depuis le début de 1908 l’objet de violentes attaques personnelles de leur part. En mai, G. Dumoulin, en décembre Broutchoux, qui pour sa part n’avait pas rejoint la Fédération nationale, vinrent à Montceau tenir des meetings contre lui. Mais sa position locale restait inexpugnable. Il fut régulièrement réélu non seulement à la tête du syndicat des mineurs de Montceau, mais à celle de l’union des syndicats de Saône-et-Loire et il le restera jusqu’en 1920. Il continua d’autre part à participer aux instances nationales et à parcourir le pays pour le compte de la Fédération qui avait intégré les ardoisiers et s’appelait Fédération du sous-sol. L’ultime scission de Basly et d’une partie des mineurs du Pas-de-Calais au début de 1913 fut jugée par Merzet comme un événement quasi heureux qui " débarrassera du personnage les mineurs du Nord " et assoira solidement l’unité (Le Petit Parisien 31 décembre 1912, repris dans Le Socialiste de Saône-et-Loire, 5 janvier 1913).

Délégué pendant la guerre par Albert Thomas pour s’occuper des affectés spéciaux, Merzet, au moment de la scission, restera comme Bouveri à la SFIO et à la Fédération du sous-sol de la CGT où il continuera à jouer un rôle actif au plan national pendant de longues années.

Merzet assista aux congrès nationaux suivants : Lyon, septembre 1901 (XIIe congrès national — 6e de la CGT) ; Montpellier, septembre 1902 (XIIIe congrès) ; Bourges, septembre 1904 (XIVe congrès) ; Amiens, octobre 1906 (XVe congrès) — il vota l’ordre du jour syndicaliste-révolutionnaire présenté par V. Griffuelhes ; Marseille, octobre 1908 (XVIe congrès) ; Toulouse, octobre 1910 (XVIIe congrès) ; Le Havre, septembre 1912 (XVIIIe congrès). En septembre 1900, il avait également assisté à Paris, salle Wagram, au deuxième congrès des organisations socialistes.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article121868, notice MERZET Étienne, dit MERZET fils ou le Porion par Madeleine Rebérioux, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 8 novembre 2022.

Par Madeleine Rebérioux

SOURCES : Pages libres, second semestre 1908, pp. 354-355, Le Petit Montcellien, 1904-1905, Le Socialiste de Saône-et-Loire, 1905-1914. — Comptes rendus des congrès de mineurs. — Les Temps Nouveaux, article de Monatte après Courrières, 10 mars 1906. — J. Julliard, « Jeune et vieux syndicat chez les mineurs du Pas-de-Calais », Le Mouvement social, avril-juin 1964, pp. 7-30. —
Articles nécrologiques : Gazette de Montceau et du Bassin minier, hebdomadaire socialiste, 24 février 1934. — Travailleur de Saône-et-Loire, organe officiel de l’UD, mars 1934.

ICONOGRAPHIE : Hubert-Rouger, Les Fédérations socialistes II, op. cit., p. 518. — La CGT, op. cit., p. 569.

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