NILÈS Maurice, Jean

Par Nadia Ténine-Michel

Né le 16 février 1890 à Paris (XIXe arr.), mort le 19 avril 1977 à Sevran (Seine-Saint-Denis) ; ouvrier au service des Eaux de la Ville de Paris ; militant syndicaliste et communiste ; membre de la Commission exécutive de la CGTU (1922-1924, 1927-1929 et 1931-1933) ; maire d’Aulnay-sous-Bois (Seine-et-Oise, Seine-Saint-Denis) de 1935 à 1939 et en 1944.

Maurice Nilès en 1943

Fils d’un tourneur sur métaux et d’une blanchisseuse, Maurice Nilès était employé au service des Eaux à l’atelier central de la Ville de Paris, quai d’Austerlitz. Il termina la guerre qu’il fit dans l’infanterie avec une pension d’invalidité partielle. En février 1922, il devint secrétaire du syndicat général CGTU du personnel des Services publics, municipaux, départementaux et assimilés comme permanent appointé, à plein temps, grâce à un congé sans solde de son administration qui dura jusqu’en février 1924. Quelques semaines plus tard, il entra à la commission exécutive de la CGTU lors de son premier congrès à Saint-Étienne et y siégea jusqu’en avril 1924 date à laquelle il donna sa démission. En 1923, il était également secrétaire général du Comité intersyndical des Services Publics (Unitaire). Il militait aussi au Comité d’action contre l’impérialisme et la guerre. Il demeurait alors rue du paradis à Rosny-sous-Bois. Depuis août 1923, il siégeait en outre au comité de la Fédération nationale des employés et ouvriers des Services publics. Puis, en janvier 1926, il fut élu secrétaire de la 20e Union régionale de la CGTU, fonction qu’il cumula avec le secrétariat de l’Union des syndicats de la région parisienne. Il fut à nouveau désigné à ces deux postes en 1927, faisant par la même occasion sa rentrée à la commission exécutive fédérale. Il participa au Ier congrès de fusion (Services publics, Éclairage, Électricité, Force motrice) qui se tint à Bordeaux les 16-18 septembre 1927 et fut élu membre de la commission exécutive. Il assista également au IIe congrès (Paris, 19-21 octobre 1928) puis au congrès de la CGTU de l’Éclairage (Paris, 23-25 septembre 1929).

Militant communiste de la première heure, Maurice Nilès avait d’abord été inscrit à la section d’Aulnay-sous-Bois (Seine-et-Oise) où il habitait depuis 1921, dans un petit pavillon dont il était propriétaire. Il avait été élu en juin 1924 au comité régional à l’issue de la première conférence de la Région parisienne du PC (voir Alfred Costes). Lors de la réorganisation du parti sur la base des entreprises, il fut transféré à la cellule 489 (atelier central de la Ville de Paris) du 4e rayon de la Fédération de la région parisienne. Il avait été candidat sur la liste conduite par André Marty aux élections législatives de 1924 mais n’avait pas été élu malgré les 60 733 voix qu’il avait obtenues. Orateur très écouté, il prenait fréquemment la parole dans les réunions parisiennes du PC et de la CGTU et, après avoir une nouvelle fois quitté la CE en 1929, il y siégea de nouveau de 1931 à 1933.

Candidat aux élections municipales d’Aulnay dès 1925, élu conseiller lors d’une partielle en 1928, tête de liste mais battu en 1929, Maurice Nilès fut élu maire le 5 mai 1935 face au docteur Jean Marty. Il expliqua le sens qu’il donnait à la victoire de la liste communiste : "Nous prenons une succession très lourde. Notre commune, pauvre par elle-même, est composée de gens dont les salaires ont été diminués ; de chômeurs, de petits commerçants à la veille de la faillite ; de travailleurs, de fonctionnaires qui n’ont que leur salaire pour vivre ; de petits retraités, de représentants, d’employés de commerce, d’employés de bureaux, ceux qu’on appelle les ouvriers en faux-cols qui ont vu, eux aussi, leurs salaires diminués en raison de la crise ; nous savons que tous ceux-là sont écrasés par des charges de plus en plus lourdes ; qu’ils ne peuvent plus payer leurs impôts. Nous nous efforcerons de ne pas augmenter les charges de ceux que nous venons de nommer. Nous savons qu’il y en a qui peuvent payer. Nous envisageons de faire payer ceux qui le peuvent, pour décharger ceux qui ne peuvent pas."

L’élection fut annulée, mais il fut réélu avec un meilleur résultat en mars 1936. Faisant partie de ces militants qui avaient su s’enraciner localement malgré d’autres activités, il était l’animateur des comités de mal-lotis puis de chômeurs et réussissait ainsi à donner au Parti communiste une véritable assise locale. Forte personnalité qui impressionnait les témoins et dérangeait parfois le préfet par la tonalité très militante des débuts de son mandat, il fut aussi un maire actif, équipant une ville que les municipalités antérieures ne parvenaient plus à gérer. Sa première décision fut d’implanter des bornes-fontaines dans les quartiers privés d’eau courante, il fut aussi le créateur des colonies de vacances, du dispensaire et fit bâtir un stade-vélodrome. Il était membre du bureau de la Fédération nationale des municipalités ouvrières et paysannes.

En 1939, il approuva la position du parti sur le Pacte germano-soviétique et fut déchu de son mandat. Mais auparavant, lors de la de la dernière réunion du conseil municipal, le 24 septembre 1939, il fit adopter à l’unanimité une résolution demandant de "s’associer à l’hommage que nous rendons à tous les soldats mobilisés.. tant sur le front français que sur le front polonais pour combattre l’hitlérisme et nous formulons les vœux les plus sincères pour que nos armées soient victorieuses afin d’abattre à jamais Hitler et ceux qui ont engagé la guerre contre notre pays et contre l’ensemble des pays démocratiques".

Déchu de son mandat, arrêté en 1940, Maurice Nilès fut interné à Baillet, Saint-Paul-d’Eyjeaux, puis fut envoyé en Algérie au camp de Bossuet. Il obtint d’être rapatrié en France pour raisons de santé. Interné à Saint-Sulpice-la-Pointe (Tarn), il fut libéré en janvier 1943 et assigné à résidence dans l’Allier.

À la Libération, il revint à Aulnay reprendre sa place de maire, occupée pendant quelques jours par un de ses camarades. Des bruits circulèrent alors sur d’éventuelles sanctions infligées par la direction du Parti communiste en raison de sa libération en 1943. Était-ce la conséquence de la résolution de septembre 1939 ? Il fit manifestement l’objet d’une cabale menée à la fois par certains de ses camarades d’Aulnay et des membres du comité local de Libération, candidats malheureux aux élections de 1935. En tout cas, il ne fut pas représenté en 1945. Le maire élu fut le communiste Scohy, sans implantation locale et le Parti communiste perdit la municipalité en 1947.

Maurice Nilès resta un militant discipliné jusqu’au bout, dans sa section locale et comme animateur d’associations d’anciens combattants et déportés.

Il avait épousé le 2 mars 1918 une blanchisseuse, Georgette Daval, à Paris (XVe arr.). Leur fils, Maurice Nilès, né l’année suivante, fut également un militant communiste. Interné à Voves (Eure-et-Loir) d’où il s’évada, il devint commandant FTP et exerça de nombreux mandats après la guerre, dont celui de maire de Drancy en 1959 à 1997.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article124008, notice NILÈS Maurice, Jean par Nadia Ténine-Michel, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 24 septembre 2022.

Par Nadia Ténine-Michel

Maurice Nilès (1926)
Maurice Nilès (1926)
cc Agence Rol
Maurice Nilès en 1943

SOURCES : Arch. Nat. F7/13103. — Arch. Dép. Seine-et-Oise, 2 M II16, 2 M 30/58, 4 M 2/68 et 2/69, 1 W 143. — Arch. PPo. 300. — Arch. com. Aulnay-sous-Bois. — L’Humanité, 13 janvier 1922, 14 mars 1980. — G. Lachapelle, Les élections législatives, op. cit. — R. Gaudy, Les porteurs d’énergie, Paris, 1982. — J. Varin, Aulnay, jeunesse d’un vieux pays, Temps actuels. — Nadia Ténine-Michel, "Aulnay-sous-Bois et le Parti communiste ou la double inconstance", Communisme, n° 15-16, 1987. — Who’s who in France, 1979-1980. — État civil. — Arch. Nat. F7/13972-13973. — SHD Vincennes, GR 16 P 445202 (nc). — Données du site Généanet. — Notes de Renaud Poulain-Argiolas.

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