NIVOT Marcel, Jean

Par Pierre Bonnaud

Né le 18 Juin 1913 à Saint-Hilaire-Fontaine (Nièvre), mort le 26 Décembre 1993 à Mehun-sur Yèvre (Cher) ; instituteur ; militant socialiste avant 1939, communiste à partir de 1942 ; prisonnier de guerre ; résistant ; dirigeant de la Fédération de la Nièvre du PCF ; Élu municipal à Imphy (Nièvre) puis à Nevers ; responsable départemental et national du Mouvement de la paix et de l’appel des cent.

Né dans une famille de cheminots (père poseur, devenu chef de canton en 1936 à la compagnie de chemins de fer du PLM et mère future employée à la SNCF après 1936) aux solides convictions républicaines, Marcel Nivot, après des études à l’école primaire supérieure de Decize, devint élève-maître à l’École normale d’instituteurs de Varzy (Nièvre).

En juillet 1932, il effectua avec sa promotion un voyage en Pologne. La traversée de l’Allemagne en pleine effervescence nazie le marqua profondément et son premier engagement fut celui de l’antifascisme. Il adhéra au Syndicat national (CGT) en 1932 puis au Syndicat national des instituteurs après la réunification en 1936.

En février 1934, instituteur à La Charité-sur Loire (Nièvre), il participa à la riposte unitaire au chef-lieu du département après la tentative de coup de force du 6 février. Il vécut la victoire électorale du Front populaire et les grandes grèves de 1936 à Fourchambault où il avait été nommé instituteur après avoir effectué, comme sergent, son service militaire au 13e Régiment d’infanterie de Nevers. Il y fréquenta les milieux socialistes mais aussi le militant communiste Léon Mallet et adhéra à la SFIO en 1935, se prononçant par la suite pour les motions présentées par Jean Zyromski.

Le 1er août 1936, à Raveau (Nièvre), il épousa Marie-Antoinette Ducourtial, institutrice, avec laquelle il eut deux enfants et qui partagea constamment ses convictions. Nommé avec son épouse à Saint- Seine à la rentrée 1936, il devint secrétaire de mairie de ce petit village du sud nivernais et milita à la section SFIO de Cercy-La-Tour jusqu’au déclenchement de la guerre.

Mobilisé en septembre 1939, Marcel Nivot servit comme sergent au 13e RI. Durant la « drôle de guerre », son régiment fut envoyé sur la ligne Maginot et en Sarre, puis dans le Nord de la France. Au moment de l’offensive allemande, en mai 1940, le bataillon de Nivot, coupé du reste du régiment, fut pris dans la tourmente de Dunkerque. Évacués le 2 juin sur un destroyer britannique, puis débarqués sur la côte française dans la région de Cherbourg le 4 juin, les survivants du 13e RI furent faits prisonniers dans les combats du bocage normand le 16 juin. Personnellement, il fut prisonnier à Craon (Mayenne) le 19 juin 1949. Après l’échec d’une première tentative d’évasion sur le territoire français, repris, interné à Amboise puis à Vertou, Nivot fut envoyé, le 11 septembre 1940, au stalag XI B, en Allemagne, dans la lande de Lünebourg. En juillet 1941, Marcel Nivot et Robert Hostier, instituteur nivernais et futur maire communiste de Fourchambault, falsifièrent leurs papiers militaires et réussirent à se faire rapatrier puis démobiliser. (dans les biographies écrites pour le Parti communiste, il déclarait s’être évadé le 31 juillet 1941 avec de faux papiers). Nivot regagna Saint-Seine où il reprit son poste d’instituteur.

Dénoncé comme prisonnier évadé, il fut arrêté devant sa classe par la feldgendarmerie allemande, le 15 novembre 1941,et incarcéré à la prison de Nevers, puis à celle de Vesoul, où il entra en contact avec plusieurs prisonniers politiques nivernais : Louis Bernardon, Edmond Bouy, Armand Morizet — tous communistes — qui devaient être déportés ou fusillés dans les semaines qui suivirent.

Après une semaine au Stalag VB à Villingen, renvoyé au stalag XI B (Fallinghostel) en décembre 1941, Marcel Nivot connut pendant six mois le régime disciplinaire réservé aux évadés repris. Dans ces circonstances, il fit connaissance avec un premier noyau de résistants organisés en comité clandestin, parmi lesquels Pierre Le Moign, Michel Cailliau, neveu du général de Gaulle, et Duprat-Geneau, futur Philippe Dechartre.

Marcel Nivot ne tarda pas à rencontrer les communistes, qui au sein du stalag, s’efforçaient d’élargir le mouvement de résistance chez les prisonniers de guerre. À partir de septembre 1942, il travailla aux côtés de Pierre Delon à la structuration du mouvement dans les baraques et les chambres. En novembre, Nivot donna son adhésion à l’organisation clandestine du Parti communiste et devint membre du bureau de l’organisation communiste du stalag.

Marcel Nivot excella dans l’action de propagande anti-vichyste et anti- hitlérienne et il effectua un travail permanent de rassemblement des prisonniers de guerre de toutes croyances et opinions, de toutes nationalités autour des objectifs de la Résistance. Il fut reconnu en 1954 par le liquidateur du Mouvement national des prisonniers de guerre et déportés comme « une des plus belles figures de la Résistance en Allemagne ». Il fut notamment la cheville ouvrière de Résistance, journal clandestin ronéotypé et diffusé à l’intérieur du camp. D’autre part, dès 1943, il réussit à organiser l’écoute de la BBC et de Radio Moscou à partir d’un récepteur Ducretet installé dans un souterrain creusé à cet effet.

En 1945, il participa , dès le 7 avril, à la prise en mains de la direction du camp par le comité directeur de la Résistance qui accueillit huit jours plus tard les soldats britanniques libérateurs.

De retour à Saint-Seine en mai 1945, Marcel Nivot devint secrétaire de la cellule locale du PCF puis secrétaire de la section de Fours où il eut un poste, avec son épouse, tout en assurant le secrétariat de mairie. Il commença alors à rédiger « un projet de brochure sur la résistance au stalag XI B » selon ses termes.

En 1946, les Nivot obtinrent un poste double à Imphy, municipalité communiste dirigée alors par Louis Petit. En 1947, Marcel Nivot entra au Comité fédéral du PCF, prit en charge la rédaction de l’Émancipateur de la Nièvre après le décès de Louis Bernard. Il devint par la suite membre du bureau fédéral et du secrétariat fédéral en 1949 chargé de la propagande, tandis que son épouse Marie-Antoinette se consacrait à l’Union des femmes françaises dont elle devint la secrétaire départementale. À l’automne 1947, pendant les grandes grèves des houillères, Marcel Nivot suivait la section de La Machine et contribua à organiser la solidarité avec les mineurs de cette localité, notamment par l’accueil de leurs enfants dans les familles d’Imphy.

Au printemps 1951, ses activités militantes furent brutalement interrompues par la maladie : la tuberculose contractée pendant la captivité, contraignit Nivot à un séjour prolongé au sanatorium de Sainte Feyre. En congé de longue durée, il ne put reprendre son poste d’instituteur à Imphy qu’à la rentrée d’octobre 1953. La conférence fédérale de 1954 le réintégra au comité fédéral du PCF dans lequel il fut réélu jusqu’en 1976, membre de la commission de l’éducation à partir de 1962. Lors de la réunion du comité fédéral, le 21 septembre 1963 à propos des analyses du Parti communiste chinois, il se montra « troublé » selon le rapport d’Oswald Calvetti qui suivait la fédération.

Dans les années qui suivirent, l’activité de Marcel Nivot se déploya sur de multiples terrains.

Sur le plan professionnel, membre du SNI, il devint secrétaire adjoint de la section départementale au début des années 1950 de la FEN-CGT. Il fut élu au conseil syndical du SNI. puis délégué à la commission administrative paritaire départementale de 1955 à sa retraite en 1965. Dans les débats internes du SNI, il se montrait ferme pour défendre les positions du PCF, notamment à la fin de 1956 et les orientations du courant Unité et Action, minoritaire dans la FEN de la Nièvre.

D’autre part, Marcel Nivot, membre du bureau de la section communiste d’Imphy, consacra une importante partie de son temps au travail municipal. Élu conseiller municipal d’Imphy en 1955 à l’occasion d’une élection partielle consécutive à la mort du maire, Louis Masson, Nivot fut constamment réélu pendant dix années et contribua à la reconquête de la mairie par le PCF en 1971.

Quelques années avant leur retraite, les Nivot obtinrent leur nomination à Nevers. En 1971, Marcel Nivot fit partie de la liste d’Union de la gauche, conduite par le docteur Benoist qui enleva la mairie de Nevers. Réélu en 1977, il joua un rôle important dans la Commission des affaires scolaires et suivit de près le développement des écoles maternelles de la ville. Il prépara le jumelage de Nevers avec Neubrandenburg, ville de RDA, présida le comité de jumelage ainsi que l’Association France-RDA.

Cependant, l’engagement principal de Marcel Nivot fut son action en faveur de la paix. Elle s’enracinait dans le travail accompli à Imphy autour de l’Appel de Stockholm. Par la suite, Marcel Nivot fut de tous les combats pacifistes : luttes contre les guerres coloniales, pour la paix au Viet-Nam, contre la force de frappe française et la course aux armements nucléaires... Nivot devint président du comité départemental du Mouvement de la paix, membre du conseil national de ce mouvement, initiateur de l’Appel des cent dans les années quatre-vingt.

Décédé en 1993, Marcel Nivot fut inhumé à la Charité sur Loire auprès de sa compagne. L’éditeur Jacques Delayance, fondateur du Mouvement de la paix dans la Nièvre et la Fédération communiste lui rendirent hommage. Marcel Nivot avait acquis une influence qui s’étendait largement au-delà des milieux traditionnellement communistes.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article124041, notice NIVOT Marcel, Jean par Pierre Bonnaud, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 16 juin 2013.

Par Pierre Bonnaud

ŒUVRE : De l’école au stalag... et retour(s), Nevers 1990 — Collaboration aux journaux communistes régionaux, aux périodiques du Mouvement de la Paix et de France-RDA.

SOURCES : Archives du comité national du PCF. — La Tribune du Centre, 1934-1939. — Numéros clandestins de Résistance, conservés au musée national de la Résistance de Champigny. — L’Émancipateur de la Nièvre, 1944-1952. — L’Enseignant de la Nièvre, numéro 33, décembre 1978. — Le Journal du Centre du 8 avril 1985 Attestation 597 du liquidateur national du MNPGD, 11 février 1954. — Pierre Le Moign’, Historique de la résistance au Stalag XI B, 1955. — Yves Durand, La captivité, histoire des prisonniers de guerre français 1939-1945, 1980. — Pierre Le Moign’, Les chemins du refus, 1982. — Notes et archives de Marcel Nivot communiquées par sa famille. — Ouvrage de l’intéressé cité à œuvres. — Témoignages oraux de Guy Pin, membre du Bureau national du Mouvement de la paix. — Notes de Jacques Girault.

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