PÉJU Élie. Pseudonyme : Jules Charbonnier, Didier, Perier

Par Jean-Louis Panné, complété par Claude Pennetier

Né le 16 février 1901 à Porcieu-Amblagnieu (Isère), mort le 3 août 1969 à Lyon (Rhône) ; militant communiste, puis oppositionnel ; cofondateur du mouvement de résistance Franc-tireur et directeur de Franc-Tireur (1944-1957).

Élie Péju
Élie Péju

Son père était tailleur de pierre et sa mère tenait un café-épicerie. Après des études primaires à Porcieu, Élie Péju entra en primaire supérieure à Pont-de-Beauvoisin. Militant de la section socialiste de Porcieu, il s’installa à Lyon où il fut embauché chez Berliet en 1916 au service d’achat du bois. En 1919, il appartenait à la 6e section des Jeunesses socialistes (quartier des Brotteaux) où il fit la connaissance de sa future femme (alors étudiante en sculpture aux Beaux-Arts), Marthe Capelle, et fut responsable de la propagande. Rapidement, Élie Péju s’imposa comme l’un des animateurs du courant favorable à l’adhésion à la IIIe Internationale. Son action couvrait toute la région (Lyon, Saint-Étienne, Roanne).

Après le congrès de Tours (décembre 1920), Élie Péju rejoignit les Jeunesses communistes. Il devint secrétaire de la 17e Entente des JC en 1921. En novembre 1922, il fut délégué à la réunion de l’Exécutif élargi à Moscou et assista au IVe congrès de l’IC (liste Renoult). En 1923, il entra au comité directeur de la Fédération communiste du Rhône. Privé d’emploi, il trouva du travail à la coopérative d’ameublement « Le Confort populaire » que dirigeait son beau-père, l’un des dirigeants de la fédération. Ami de Jean-Jacques Soudeille, se situant à la gauche du parti, il approuva la publication dans le Bulletin communiste, par Boris Souvarine, avec lequel il avait séjourné en Russie soviétique, de documents sur le débat en cours au sein du parti russe.

En octobre 1925, Élie Péju signa la lettre à l’Internationale, dite des 250, puis collabora au Bulletin communiste de Souvarine, dont il devint l’un des membres du comité de rédaction. Il y écrivait : « ...C’est une des conséquences de la "bolchévisation" d’abaisser continuellement le niveau intellectuel du parti... N’a-t-on pas vu à Lyon cette chose presque incroyable : un comité de rayon, puis une assemblée plénière de ce rayon voter contre les thèses de Loriot alors que plus de 99 % des assistants, pour ne pas dire la totalité, n’en connaissaient pas la première ligne ? » (n° 11, 1er janvier 1926 : « Une année de bolchévisation »). Convoqué le 19 janvier 1926 par sa cellule, dirigée par V. Ferrembacher, on devait lui demander de cesser sa collaboration et de se mettre à disposition du parti pour un travail pratique. Péju ne se rendit pas à cette réunion et répondit par lettre le 21 janvier à une nouvelle mise en demeure. Avec quelques camarades lyonnais (Bornat, Bouillot, Gervais Bussière, Debut, Dognin, Garnier, Gosset-Holh, Berthe Joly, Paul Moulin, Jeanne Moulin, Souzy, Villon, Tony) il signa un appel pour la convocation d’un nouveau congrès du parti destiné à renouveler la direction du parti (Bulletin communiste n° 14, 22 janvier). Le 7 février suivant, ce groupe déposa ce texte à l’assemblée d’information. À la suite d’une réunion houleuse, le comité de rayon adopta en réponse un texte en cinq points, rejetant sur les opposants la responsabilité des « mesures pénibles » qu’il serait amené à prendre. Fin janvier, Élie Péju signa la déclaration du comité de rédaction du Bulletin communiste annonçant sa suspension dans l’attente des décisions de la prochaine réunion de l’Exécutif élargi de l’IC et l’appel « A tous les membres du parti » proclamant la solidarité des signataires avec les exclus. Exclu à son tour, Élie Péju participa au groupe des communistes lyonnais qui était en relation avec le Cercle communiste Marx et Lénine de Boris Souvarine. Il créa par la suite une entreprise de transport et de déménagement.

Antimunichois, Élie Péju fut parmi les premiers à envisager un réseau de résistance en zone sud. Il constitua avec Jean-Jacques Soudeille, Pinton, Avinin et Clavier, une organisation pionnière à Lyon : « France-Liberté ». Toute sa famille le suivit. Le groupe créa le mouvement Franc-Tireur, et Péju (pseudonyme : Jules Charbonnier), rédigeant les éditoriaux du journal clandestin du même nom, fut chargé plus particulièrement de sa diffusion, son entreprise de déménagement servant au transport du papiers puis des armes. Il fut à l’origine, après un accord passé en mars 1942 entre Georges Altman et Yves Farge, de la publication du Père Duchêne. Il diffusait La Revue libre de Marc Bloch. Jean Moulin eut le contact direct avec lui. Lors de la constitution du maquis du Vercors, il participa au recrutement. Membre du comité de direction de Franc-Tireur, il remplaça Jean-Pierre Lévy à la direction du mouvement en avril 1943. Il devint délégué national des Mouvements unis de Résistance (MUR) lorsqu’en 1943, Franc-Tireur fusionna avec les mouvements Combats et Libération. Il combattit l’idée d’un journal unique du Mouvement de libération nationale (MLN), issu des MUR, s’affirmant partisan du pluralisme d’expression. Organisant les opérations aériennes et les parachutages, il assurait personnellement les transports. Ses responsabilité lui faisaient faire la navette entre Paris et Lyon pour préparer la sortir du premier numéro légal de Franc-tireur le 24 août 1944.

À la Libération, Élie Péju fut membre du Comité départemental de Libération et adjoint au commissaire de la République à Lyon, Yves Farge. Codirecteur gérant du quotidien parisien Franc-Tireur, avec le communisant G.-E. Vallois, jusqu’à la scission de 1948, il en assuma ensuite seul la direction avec comme rédacteurs en chef G. Altmann et R. Treno jusqu’à la disparition du titre. En 1948, lors de la fondation du Rassemblement démocratique révolutionnaire, il accepta que l’organe du mouvement La Gauche soit imprimé et administré aux frais de Franc-Tireur. Lors de la crise interne à Franc-Tireur, Élie Péju et G. Altmann repoussèrent les exigences de certains rédacteurs qui désiraient que le journal s’alignât sur les positions du Parti communiste. Les contestataires, avec G.-E. Vallois, rejoignirent alors le quotidien Libération. Le titre Franc-tireur disparut en 1957.

Élie Péju était Compagnon de la Libération (décret du 27 décembre 1945), officier de la Légion d’honneur et titulaire de la croix de guerre avec palmes. Il avait fondé à Lyon, avec un de ses fils, Georges, la librairie « La Proue » et un ciné-club des professionnels du cinéma. Il était PDG de la Société des Éditions cinématographiques.

Son fils, Marcel Péju distribua des tracts et des journaux clandestins à la Facultés des lettres pendant l’occupation et fut ensuite un journaliste et un membre des réseaux d’aide au FLN.

Son autre fils, Raymond, fit partie de France-Liberté puis de Franc-Tireur dès 1941. Il fut un des organisateurs de la manifestation contre la projection du film Le Juif Süss en mai 1941. Transporteur de tracts et d’armes, il fut grièvement blessé lors d’une mission en mobylette en 1943. La secrétaire d’Élie Péju, Aimée Dufour, elle aussi agent de liaison de Franc-Tireur, épousa Raymond à la fin de la guerre.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article125327, notice PÉJU Élie. Pseudonyme : Jules Charbonnier, Didier, Perier par Jean-Louis Panné, complété par Claude Pennetier, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 8 juillet 2019.

Par Jean-Louis Panné, complété par Claude Pennetier

Élie Péju
Élie Péju

SOURCES : Bulletin communiste, 1925-1926. — D. Veillon, Franc-Tireur : un journal clandestin, un mouvement de résistance, 1940-1944, Flammarion, 1977. — C. Ronsac, Trois noms pour une vie, Laffont, 1988. — Le Progrès de Lyon, 4 août 1969. — Dictionnaire historique de la Résistance, op. cit. — Notes de Jean-Michel Brabant, Maurice Moissonnier et Claude Pennetier.

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