PERRIER Antoine, Marie, Louis. Pseudonyme PITTLE A.

Par Jean Maitron

Né le 4 octobre 1893 à Limoges (Haute-Vienne), mort le 7 mars 1984 à Limoges ; professeur d’histoire et de géographie ; géographe urbain et historien social ; socialiste, membre du Comité pour la reprise des relations internationales, puis militant communiste ; collaborateur du Travailleur du Centre-Ouest et du Travailleur de la Corrèze ; secrétaire du rayon communiste de Tulle (Corrèze).

Fils de Joseph Perrier, commis des postes (par ailleurs très bon dessinateur) et d’une institutrice et directrice d’une école maternelle, Marie-Antoinette Subartange, Antoine Perrier appartenait à une famille de démocrates avancés où les instituteurs étaient nombreux. Il avait un grand-père , prénommé lui-même Antoine, ancien élève de l’École normale de Limoges. Sa tante maternelle, directrice d’école, guida dès l’enfance son éducation et conserva toujours sur lui une grande influence. Il fit ses études secondaires au lycée Gay-Lussac de Limoges de 1903 à 1910, où il se sentait peu à l’aise mais avait en sympathie ses professeurs dont plusieurs avaient été dreyfusards. Doté du baccalauréat philosophie, il fit ses études supérieures à la faculté des lettres de Poitiers où il obtint en 1914 une licence d’histoire et géographie. Au sortir de la classe de philosophie "j’étais socialiste" affirma-t-il.

Sensibilisé aux problèmes de l’inégalité sociale par les conversations familiales, lecteur des journaux démocrates ou socialistes dès l’adolescence, il se tourna vers le socialisme. Le souvenir des conflits sociaux, en particulier des grèves de 1905 où l’ouvrier Camille Vardelle tomba sous les balles des « soldats de l’ordre », sur le champ de foire de Limoges, situé tout près de son domicile, ainsi que la fréquentation des meetings et des manifestations ouvrières devaient faire son éducation socialiste.

Étudiant, il fréquentait les réunions du groupe socialiste de Poitiers, lisait les journaux socialistes (l’Humanité, la Guerre sociale) et s’abonna à La Vie ouvrière de Pierre Monatte. A Limoges, il suivit les cours d’une « école socialiste » organisée par la Fédération SFIO sous la direction d’Adrien Pressemane et de Sabinus Valière.

Pendant la Première Guerre mondiale, Antoine Perrier, affecté spécial dans les hôpitaux et comme secrétaire au camp d’Avord (Cher), reçut les publications du Comité pour la reprise des relations internationales en tant qu’abonné de la Vie ouvrière et suivit avec sympathie le mouvement socialiste minoritaire, amorcé par le manifeste de la Fédération socialiste de la Haute-Vienne du 9 mai 1915. La Révolution russe, en 1917, lui parut le signal de l’avènement de la société socialiste. En mars 1919, il profita d’une décision ministérielle accordant une libération par anticipation aux étudiants mobilisés, désireux de préparer l’agrégation. Devenu étudiant à la Sorbonne, il s’intéressait plus aux luttes menées par la Russie soviétique qu’au programme de l’agrégation d’histoire et géographie. Il fut alors membre de la Ve section socialiste SFIO, du Comité pour la reprise des relations internationales, du groupe des Étudiants socialistes révolutionnaires, dont il devint le secrétaire à la suite d’Ernest Labrousse.

Professeur délégué au collège de garçons de Sainte-Menehould (Marne) en octobre 1919 (il avait demandé la région parisienne, "il était difficile de m’envoyer plus loin de la Sorbonne" écrira-t-il ), il manifesta son soutien à la IIIe Internationale et tenta, avec le concours de quelques militants sympathisants, de créer un groupe socialiste adhérent à la Fédération de la Marne et de redonner vie au syndicat des cheminots. Après le 1er Mai 1920, la grande grève des cheminots (qui se termina par des licenciements massifs) et à la suite d’une campagne de quelque journaux, notamment la Dépêche de l’Est, il fut avisé par une note du ministère de l’Instruction publique que sa délégation de professeur au collège de Sainte-Menehould prendrait fin le 30 septembre 1920 et qu’il ne lui en serait pas donné de nouvelle. Une démarche officieuse de François Aussoleil, député socialiste de Corrèze, lui permit d’obtenir une nouvelle nomination. Professeur aux collèges de Barbezieux, de Lure, aux lycées d’Épinal, de Saint-Quentin, de Saint-Brieuc, il n’exerça pas d’action militante dans ces diverses villes, mais n’en était pas moins connu comme un professeur communiste. Il restait membre du groupe communiste de Limoges auquel il avait adhéré après son départ de Sainte-Menehould.
Il entreprit un diplôme de géographie urbaine de Limoges qui fit l’objet, en 1924, d’un article dans les Annales de géographie dirigées par Albert Demangeon et Emmanuel de Martonne qu’il considérait, avec Gustave Glotz, comme ses maîtres.

Professeur au lycée de Tulle en octobre 1927, intellectuel reconnu (il fut fait officier d’académie en 1931 et officier de l’instruction publique), il reprit la vie militante. Ami des militants communistes Léon Bossavy, Joseph Biaugeaud, Clément Chausson, Antoine Guasson, et du leader paysan de la « montagne » Marius Vazeilles, il assura des réunions de cellules, participa aux congrès de la région communiste du Limousin. La proximité des deux villes Tulle et Limoges, où il avait encore sa famille, lui permit d’assurer dans les deux centres une action militante. Faible orateur, il fut surtout journaliste. Collaborateur en même temps du Travailleur du Centre-Ouest à Limoges et du Travailleur de la Corrèze à Tulle, il poursuivit une œuvre journalistique importante, pratiquant tous les genres de la profession. Il fut candidat sans succès aux élections municipales de mai 1929. A l’issue du congrès du rayon de Tulle le 26 février 1930, il fut élu secrétaire, fonction qu’il abandonna (voir Joseph Biaugeaud et Étienne Neyrat). Il devait reprendre quelques mois avant la guerre de 1939 une action de journaliste militant dans le Travailleur de la Corrèze. Il avait accepté de donner des articles de portée générale et d’érudition au journal La Corrèze républicaine publié à Brive par Henri Fabre.

La guerre de 1939 mit fin à son action militante même si on découvre dans ses archives une carte d’adhérent du Front national pour l’année 1946. Il n’est pas exclu que le Pacte germano-soviétique et ses suites l’aient éloigné d’une vision partisane communiste. Après la Libération, il collabora pendant quelque temps à l’Écho du Centre et se consacra à l’histoire locale et à l’histoire du mouvement ouvrier. Sa bibliothèque conservée à la médiathèque de Limoges (BMF) montre qu’il lisait la presse militante communiste, trotskiste, anarchiste et suivait avec passion la vie politique nationale et internationale.

Il fut un actif correspondant du dictionnaire Maitron.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article125664, notice PERRIER Antoine, Marie, Louis. Pseudonyme PITTLE A. par Jean Maitron, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 11 avril 2021.

Par Jean Maitron

ŒUVRE : Collaboration sous divers pseudonymes : Le Travailleur du Centre-Ouest (A. Pittle) ; Le Travailleur de la Corrèze (O. Phtalmos : l’œil en grec... de Moscou) ; Le Travailleur du Centre-Ouest (Le Bicanard des Ponts) ; l’Écho du Centre (Tonio) ; l’Appel (après 1940) ; Le Travailleur de la Haute-Vienne (après 1945). — Collaboration au Dictionnaire de biographie française et au Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français.
On trouve l’inventaire de ses 142 publications dans Marcel Villoutreix, "Antoine Perrier (1893-1984)", Bulletin de la Société archéologique et historique du Limousin, t. CXI, 1984. Ses écrits concernent dans u n premier temps la géographie urbaine et s’étendent à tous les aspects de l’histoire du Limousin. Notons particulièrement ses préoccupations pédagogiques, ainsi dans l’Information historique de 1957 "Une promenade d’histoire et de géographie urbaines avec des élèves de quatrième". ou "Comment faire aimer aux enfants la petite patrie Limousine", "Initiation aux études d’histoire et de géographie locales", "Pour entreprendre des monographies communales"., tous travaux qui soulignent sa passion pour la pédagogie et son Limousin.

SOURCES : Arch. Nat. F7/13120 et 13744. — Arch. Jean Maitron, correspondances, CHS/Paris I. — Cahiers de l’Institut Maurice Thorez, n° 7-8, novembre-décembre 1967. — Ph. Hanen, Le PC et la SFIO en Corrèze (1934-1939), M. M., op. cit. — Notes autobiographiques de A. Perrier et lettres à Jean Maitron (1976). — Marcel Villoutreix, "Antoine Perrier (1893-1984)", Bulletin de la Société archéologique et historique du Limousin, t. CXI, 1984.
Il existe un fonds Antoine Perrier plus de 7000 titres à la médiathèque de Limoges, (BMF), remarquablement classé en 2019-2020.
Biographie complétée par Claude Pennetier en mars 2020.

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