PIERRE André

Par Jean-Louis Panné

Né le 9 mai 1887 à Docelles (Vosges), mort en janvier 1966 ; journaliste socialiste.

Lycéen à Henri IV (Paris) puis normalien, agrégé de lettres, André Pierre fut professeur à l’Institut français de Saint-Pétersbourg. Revenu en France, il collabora à la Vague de P. Brizon, puis, en 1919, fut rédacteur à l’Humanité où il traitait des questions russes. Il donna également une contribution à la brochure publiée par Boris Souvarine pour le second anniversaire de la Révolution d’octobre. À la fin de l’année 1919, il appartenait au comité de la Société des amis du peuple russe, créé au début de l’été à l’initiative de Souvarine.

Après la scission de Tours, André Pierre rejoignit l’équipe du Populaire dirigée par Léon Blum. On lui doit les traductions suivantes : La Pratique et la théorie du Bolchevisme de Bertrand Russel (Éd. de la Sirène, 1921), Écrits de révolutions de Maxime Gorki, recueil d’articles tirés du journal Novaïa Jyzn (Stock, 1922), Pages de ma vie de F. Chaliapine (Plon, 1927). Le 31 octobre 1929, il fut admis au syndicat des journalistes socialistes. Entré au Temps le 1er mai 1933, il y occupa les fonctions de secrétaire adjoint de la rédaction. Collaborateur également de l’œuvre, de l’Europe nouvelle et de l’Européen, il fut secrétaire général du Centre de la Révolution française à la Sorbonne. En 1931, il publia URSS la Fédération soviétique et ses républiques, description géographique, politique et économique (Delagrave) livre dans lequel, reprenant les statistiques officielles « à défaut d’autres », il considérait l’URSS comme un pays soumis à la loi martiale où Staline « est pratiquement le souverain, l’autocrate ». L’année suivante, il traduisit le livre du socialiste-révolutionnaire V. Zenzinov, Les Enfants abandonnés en Russie soviétique (Plon) En 1935, il fit un voyage en URSS.

En 1936, il appartenait au conseil d’administration du syndicat national des journalistes (voir Joseph Weiskopf) et aurait tenté d’organiser une intervention des socialistes en faveur des condamnés du premier procès de Moscou, G. Zinoviev et Kamenev. En 1940, parut sa traduction du livre du général W. Krivitsky, Agent de Staline (Éditions Coopération) dont il souligna l’importance dans l’œuvre.

Pendant l’Occupation, il suivit le Temps replié en zone sud. Collaborateur occasionnel de l’Action française, il publia en 1942 dans la revue du Comité France-Amérique une analyse de l’évolution de l’URSS depuis l’arrivée au pouvoir de Staline. Il y concluait à l’entière responsabilité de l’URSS dans le déclenchement du conflit mondial. C’est ce texte qu’il reprit en grande partie après la Seconde Guerre mondiale sous le titre : Staline contre Hitler. Il en gomma les aspects les plus critiques, donnant des conséquences du Pacte germano-soviétique une présentation inverse à celle avancée trois ans auparavant. Comme René Marchand, André Pierre subit les effets du « syndrome de Stalingrad ». Devenu rédacteur au Monde, parfois critique vis-à-vis de l’Union soviétique « pays totalitaire par excellence », fidèle à sa méthode de copie des données officielles, il n’en présentait pas moins les réalisations du régime sous un jour systématiquement favorable. Il reprit à son compte les versions officielles sur le soi-disant complot des médecins juifs en 1953 en rappelant les grands procès de 1936-1938. En 1963, il devait expliquer dans une lettre au Monde qu’il n’avait pas été « antisoviétique mais antistalinien » et qu’il se reprochait « de ne pas l’avoir été assez, dans l’ignorance où il se trouvait de crimes que M. N. Khrouchtchev n’a commencé à révéler que trois ans après la mort du dictateur » (sic). Il avait pris sa retraite en 1958.

André Pierre mourut en janvier 1966.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article126266, notice PIERRE André par Jean-Louis Panné, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 8 avril 2016.

Par Jean-Louis Panné

ŒUVRE : Ouvrages cités — Compte rendu du IIe congrès de la IIIe Internationale d’après les journaux de Moscou, Librairie de l’Humanité, 1920. — Images de Russie, Éd. du Monde, 1947. — Qui succédera à Staline, Flammarion, 1952. — Malenkov ou le nouveau visage de la Russie, Denoël, 1953. — Les femmes en Union soviétique, SPES, 1961.

SOURCES : Arch. PPo. 311. — Hommage à la République socialiste fédérative des Soviets de Russie, Librairie du Populaire, 1919. — Journaux cités. — Le Monde, 2 avril 1963, 26 janvier 1966. — Notes de Jean Maitron et Jacques Girault.

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