PORREYE Maurice

Par Yves Le Maner

Né le 30 juin 1897 à Rosendaël (Nord) ; mort le 17 juin 1961 à Lille (Nord). Ouvrier tailleur ; militant syndicaliste et communiste du Nord ; secrétaire de la Fédération CGTU de l’Habillement (1922-1924) ; secrétaire général de l’Union départementale, puis de l’Union régionale unitaire du Nord ; oppositionnel puis membre de la tendance Syndicats.

Maurice Porreye passa son enfance dans le quartier de Wazemmes à Lille et il y apprit le métier de tailleur d’habits. Il adhéra à la CGT en 1919 et fut nommé, l’année suivante, secrétaire du syndicat des tailleurs et couturières de Lille. Dès les premiers mois de 1921, il rejoignait les rangs des Comités syndicalistes révolutionnaires. Sympathisant, puis membre du Parti communiste, Porreye resta toujours attaché aux principes du syndicalisme révolutionnaire et se refusa à accepter la moindre responsabilité au sein du PC. Cette attitude se manifesta notamment dans les mois qui précédèrent la scission. Partisan de l’adhésion de la CGT à l’Internationale syndicale rouge, il réaffirmait à chaque réunion des CSR son hostilité à la mainmise du PC sur les syndicats et demandait le respect strict de l’autonomie définie par la Charte d’Amiens. Il ne percevait pas alors la contradiction de ce principe d’autonomie avec les points 9 et 10 des vingt-et-une conditions d’adhésion à l’IC, contradiction qu’il souligna ultérieurement dans un de ses articles, intitulé « L’autonomie syndicale et les militants du Nord » qui fut publié dans le Prolétaire du 19 juin 1921

Exclu de la Bourse du Travail de Lille le 8 novembre 1921, Porreye fut soutenu par son syndicat qui se solidarisa avec lui et s’exclut lui-même de la CGT avant de rejoindre la CGTU en janvier 1922 en maintenant son secrétaire en fonction. Nommé secrétaire de la Fédération CGTU de l’Habillement en juin 1922, il conserva ce poste jusqu’en 1924, date à laquelle il démissionna pour se consacrer au secrétariat général de l’Union départementale des syndicats unitaires du Nord auquel il avait succédé à Lauridan* en juin 1923. L’UDU fut transformée en une Union régionale regroupant le Nord, le Pas-de-Calais et la Somme (1re URU) lors du congrès départemental qui eut lieu à Lille le 19 septembre 1926 et Porreye fut maintenu dans ses fonctions. Il avait déjà, en 1924, porté pendant quelques mois le titre de secrétaire d’une éphémère « 1re région de propagande ». Quelques mois auparavant, il avait été élu au comité central du Parti communiste à l’issue du Ve congrès tenu à Lille les 20-26 juin 1926.

Organisateur de nombreux mouvements de grève dans les années vingt, il fut à plusieurs reprises traduit devant les tribunaux : ainsi, le 4 avril 1924, il fut condamné à six mois de prison et, le 12 mars 1929, il subit un nouvel emprisonnement après avoir participé à une manifestation violente à Halluin.

Bien qu’il ait été présenté, sans succès d’ailleurs, aux élections pour le conseil général dans le canton de Lille-sud en juin 1927, Porreye faisait alors déjà figure d’oppositionnel aux yeux de la direction nationale du PC pour avoir ouvertement critiqué la tactique « classe contre classe » au cours de plusieurs réunions publiques organisées par l’URU du Nord. Néanmoins, il fut délégué au IVe congrès de la CGTU (Bordeaux, 19-27 septembre 1927). Rallié « officiellement » à l’Opposition de gauche en 1928, il parvint cependant à se maintenir à la direction de l’URU grâce aux soutiens dont il bénéficiait au sein du comité de la Région Nord du PC auquel il appartenait du fait de ses responsabilités syndicales. Mais, en 1930, la direction nationale du PC décida une sévère reprise en main de la Région Nord où s’étaient manifestés de nombreux « hérétiques » et confia cette lutte contre les « déviationnistes » et autres « opportunistes » à Arthur Ramette*. Mis en accusation par ce dernier lors du Ve congrès de l’URU du Nord réuni à Valenciennes en décembre 1930, Porreye perdit ses fonctions de secrétaire régional et fut peu après exclu de la CGTU. Il rejoignit alors le syndicat unique de la Batellerie (autonome), refuge des exclus de la CGTU de la région du Nord. Chargé du secteur de Douai, il était l’un des secrétaires du SUB en 1934 aux côtés de R. Blanckaert*, de Legoff et de T. Lalouette.

Lors de la réunification syndicale de 1935-1936, Maurice Porreye fut élu secrétaire du syndicat CGT de la Batellerie de Lille grâce à un rapprochement spectaculaire avec les dirigeants confédérés, ses ennemis d’hier et entra au bureau de l’UD lors de la fusion de 1936. En 1938, il était l’un des quatre secrétaires de l’Union départementale des syndicats du Nord avec Bourneton*, Salembier* et Martha Desrumeaux*, Georges Dumoulin* étant secrétaire général. En étroit accord avec ce dernier et la tendance Syndicats, Porreye évolua rapidement vers un syndicalisme réformiste.

Le 17 avril 1939, il fit partie avec Dumoulin et Kléber Legay* d’une délégation qui rencontra les patrons Olivier (président de l’« Interprofessionnelle » de Roubaix) et Thiriez (président de la Chambre de commerce de Lille), afin d’envisager la création d’un Comité régional d’entente destiné à régir les rapports Capital/Travail dans le sens de la plus parfaite harmonie. Il fut membre du Conseil national de Vichy, nommé sur la liste complémentaire du 2 novembre 1941. Il y sièga à la 3e commission d’information générale, du 25 mars au 1er avril 1942. Seul syndicaliste ouvrier rapporteur, il fut l’un des rapporteurs de la sous-commission du circuit de confiance.

Maurice Porreye fut inscrit en 1942 sur la liste des « traîtres » de la CGT.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article126992, notice PORREYE Maurice par Yves Le Maner, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 31 décembre 2012.

Par Yves Le Maner

SOURCES : Arch. Nat. F7/13770. — Arch. Dép. Nord, M 154/191, M 154/195C, M 595/35, M 595/38A et M 595/58. — Arch. Dép. Gironde, 1 M 577. — Le Prolétaire, 1921. — L’Unité batelière, 1934. — J. Fontaine, MM, Lille III, 1974, op. cit. — Ch. Lefebvre-Houte et E. Leveugle, MM, Lille III, 1972, op. cit. — M. Demouveau, « La scission de la CGT à Lille-Roubaix-Tourcoing (1920-1922) », Revue du Nord, n° 210, juillet-septembre 1971, pp. 459-494. — Cahiers de l’Institut Maurice Thorez, n° 25-26, 1978.

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