Par Claude Cherrier
Né le 16 mai 1899 à Beaux (Haute-Loire) ; employé ; militant chrétien de Jeune République ; résistant ; secrétaire de l’Union départementale CFTC de la Loire.
Jean Pralong naquit au Bouchet, commune de Beaux, près de Retournac (Haute-Loire). Ses parents, Pierre-Félix Pralong, cultivateur, et de Maria Gignon, ménagère, catholiques, vinrent s’installer à Saint-Étienne en 1901. Son père devint ouvrier à l’usine Leflève, puis à la Manufacture d’armes. De nombreux ouvriers et ouvrières stéphanois, chrétiens, étaient employés dans l’industrie, chez des patrons catholiques. Ils déploraient des conditions de travail et de salaire inacceptables, sans droit de s’exprimer.
Jean Pralong, catholique membre de l’ACGF fut formé à l’école laïque primaire et primaire-supérieure. Ayant obtenu son BEPC, il fut admis à l’École normale d’instituteurs de Montbrison (Loire) mais refusé à la visite médicale à cause d’une infirmité à la main droite, accident de naissance. Il entra alors à la Société d’assurance privée Bourg Laval et y resta trente et un ans, jusqu’en 1945. Il se forma personnellement et obtint la licence en droit à l’université de Lyon.
La formation de Jean Pralong reposait aussi sur l’expérience personnelle, la méditation sur son handicap, la foi catholique profonde, appuyée sur les textes sacrés, exigeante mais pas forcément proclamée. Il croyait à la dignité de l’homme conçu comme une personne. Il avait bénéficié des leçons de Marc Sangnier* sur la Paix, contre les sujétions de toutes sortes et pour un socialisme de la personne plus que des masses. Il savait qu’il faut toujours combattre l’injustice au sein de ces masses.
C’est pourquoi Jean Pralong milita à la CFTC ; il fonda le syndicat des employés à Saint-Étienne en 1920, avec notamment Alice Vincent*, fut secrétaire de l’UD-CFTC de 1924 à 1952 et conseiller prud’homme de 1933 à 1936, mais aussi il milita à la Jeune République ce qui l’obligea à quitter le secrétariat, en raison des statuts. Toujours habile, attentif aux autres, bon enfant mais redoutable interlocuteur, il garda toujours la confiance de ses camarades du syndicat. Candidat Jeune République aux élections législatives de Saint-Étienne en 1932, il participa au Front populaire avec son parti.
Pendant le Front populaire, Jean Pralong fut quelque peu « mis de côté » par la CFTC en raison de ses options jugées trop « à gauche ». La Jeune République, qu’il anima jusqu’en 1947, soutenait en effet le Front populaire et Jean Pralong avait toujours été partisan d’une grande discrétion spirituelle de la CFTC : dès 1923, il avait obtenu du syndicat des employés la suppression de l’expression « notoirement catholique ». C’est sans doute cette constante volonté de séparer le spirituel du temporel qui plaçait Pralong un peu à part au sein du mouvement syndical chrétien.
Résistant de la première heure, il fit partie de la CFTC clandestine, des Équipes chrétiennes de la Résistance.Il avait comme pseudonyme Templier. Il entra à Combat avec son camarade Paret. Chargé du noyautage des administrations, il échappa au coup de filet où son camarade fut arrêté dans la nuit du 3 au 4 février 1943. Puis se tint un peu sur la réserve. A la Libération, il fut membre du CDL et de son comité politique, membre de la commission municipale provisoire de Saint-Étienne. On le chargea de la présidence de la Commission d’épuration de Saint-Étienne où son sens de l’équité fit merveille. Dans un climat de haine attisée par la longue et cruelle collaboration de Vichy avec le nazisme, il fallait en urgence distinguer les différentes culpabilités, insister sur la légalité des actes et ne pas laisser passer la vengeance.
En mai 1945, Jean Pralong fut élu conseiller municipal de Saint-Étienne en place d’adjoint avec trois camarades CFTC, Anna Heurtier, Mourier et Buniazet.
En septembre 1945, il fut élu conseiller général du Canton de Saint-Héand. Avec le soutien des communistes, il battit l’ancien président du conseil général Jean Neyret. Après six ans d’un mandat actif, il fut battu car il s’était aliéné une partie de ses électeurs en refusant les subventions aux écoles libres.
Il abandonna toute activité politique, entra à la Sécurité sociale en 1946. Il prit sa retraite en 1959 comme chef du contentieux. Il suivit attentivement l’évolution de la CFTC et approuva la création de la CFDT en 1964.
Il se consacra à l’écriture, à l’histoire et fut élu au titre de la CFTC administrateur de la CPAM de Saint-Étienne puis de la Caisse régionale Rhône-Alpes.
Par Claude Cherrier
ŒUVRE : Saint-Étienne, Histoire de ses luttes économiques, politiques et sociales. I. Des origines à la révolution, 1988. II. De la Restauration à la Commune de Paris, 1990. III. Volume non paru, éditions Horvath. — Retournac et sa région, Le Puy, 1980. — La Charité, Trois cents ans d’histoire hospitalière à Saint-Étienne, Le Hénaff, 1983.
SOURCES : Documents André Pieçay exécuteur testamentaire. — 150 ans de luttes ouvrières dans le bassin stéphanois, Le Champ du Possible, Saint-Étienne, 1979. — Fichier CFTC. — Notes d’U. Thévenon. — Renseignements communiqués par l’intéressé. — État civil en ligne 6 E 2317.