PRUJA Jacques [PRUJA Joseph, Augustin, Jacques]

Par Daniel Grason, Jean Maitron, Claude Pennetier

Né le 20 juin 1903 à Arles-sur-Tech (Pyrénées-Orientales), mort le 19 février 1988 à Pau (Pyrénées-Atlantiques) ; syndicaliste des contributions indirectes, membre du Front national de la police ; membre du comité central du PCF.

Fils d’un cafetier espagnol, Jacques Pruja entra comme surnuméraire aux Contributions indirectes en 1921 puis devint contrôleur, inspecteur et directeur adjoint par concours interne. Il adhéra au syndicat CGT dès son intégration dans l’administration et devint, en 1929, secrétaire de la section des Alpes-Maritimes du syndicat des contributions indirectes puis, en 1932, conseiller syndical de la 21e région (Vaucluse, Bouches-du-Rhône, Var, Alpes-Maritimes, Basses-Alpes). En qualité de secrétaire de la section départementale de la Fédération autonome des fonctionnaires, il tenta, dès 1932, de reconstituer avec les confédérés et les unitaires, le Cartel élargi des services publics. Son attitude le rapprocha du Parti communiste auquel il adhéra en 1935. Au comité central du 17 octobre 1935, Racamond rendit hommage à Pruja en évoquant « l’unité d’action qui permit le travail commun de certaines Unions départementales comme l’Isère et les Alpes-Maritimes, facilita les prises de contact et les pourparlers entre les représentants des deux confédérations »
Secrétaire départemental du comité Amsterdam-Pleyel en 1934-1935, Jacques Pruja convoqua en juin 1935 les partis et organisations syndicales pour la formation d’un comité d’unité d’action antifasciste dont il fut le secrétaire. L’administration l’écarta des Alpes-Maritimes fin 1935 (voir P. Laroche*) et il fut nommé à La Roche-sur-Yon (Vendée), mais il représenta cependant le Parti communiste aux élections législatives d’avril 1936 dans la 2e circonscription de Nice et recueillit 3 825 voix sur 19 171 inscrits. Resté l’un des principaux collaborateurs du Cri des travailleurs en 1936, Pruja anima de nombreuses réunions de propagande dans toute la Vendée et participa à la délégation du syndicat des employés des Indirectes reçue par le préfet en février 1936. Il représenta le Parti communiste lors des élections au conseil général dans le canton sud-est de Rennes (Ille-et-Vilaine) en octobre 1937 (405 voix au premier tour) et au conseil d’arrondissement dans le canton nord-est de Rennes le 12 décembre de la même année (232 voix). En 1938, il était secrétaire de la section syndicale des Indirectes en Seine-et-Oise.
Il fut exclu de ses responsabilités syndicales pour avoir refusé de condamner le Pacte germano-soviétique.
Révoqué en 1940, il doit exercer une activité de comptable. Dès octobre 1940 il met en place avec Eugène Hénaff, une organisation clandestine des syndicats et développe une activité militante dans le XVIIe arrondissement de Paris. Repéré par la police il doit se réfugier en Vendée à Saint Laurent-sur-Sèvre. Il fut chargé en 1943 par le Front national de diriger l’organisation clandestine des fonctionnaires de la région parisienne nord, puis de la police parisienne.
Conseiller fiscal pendant la guerre, Jacques Pruja vivait 1 square du Vaucluse à Paris (XVIIe arr.), il fut appréhendé à son domicile le 3 janvier 1944 par des inspecteurs de la Brigade spéciale n° 1 des Renseignements généraux. Fouillé, il a été trouvé porteur d’une liste de rendez-vous et d’une demande de renseignements concernant des fonctionnaires de la police.
Lors de la perquisition les policiers saisissaient des documents sur son activité, notamment les noms, prénoms, adresses personnelles et signalements de deux inspecteurs chargés de la répression anticommuniste. Un rapport dactylographié faisait état d’une campagne visant le Front national de la police.
Emmené dans les locaux de la Préfecture de police, il fut interrogé. Jacques Pruja reconnaissait être membre du Front national. Il avait été noté avant la guerre en raison de son appartenance au Parti communiste, et avait été révoqué.
Sur les documents saisis, il était mentionné que Jacques Pruja était le responsable du Front national de la police de la 1ère, 4ème, 5ème, 6ème divisions, du garage et des Compagnies de circulation.
Dans ce rapport, il était fait mention des difficultés à regrouper au sein du Front national d’autres groupements de la résistance : Libération, Honneur de la Police, et l’Organisation civile et militaire (OCM).
Quatre fonctionnaires de la police étaient nommés : deux brigadiers, un gardien de la paix et un gardien cycliste, l’un Adrien Peltier prenait la fuite, Gabriel Lacure, Brigadier-chef et Jean Pron, Brigadier au VIIIème arrondissement ont été arrêtés ainsi que Lucien Piednoir d’Honneur de la Police. Adrien Peltier de la même obédience prenait la fuite.
Il fut incarcéré à la prison de la Santé jusqu’au 17 août 1944. Il participa aux combats de la Libération de Paris, investissant notamment le 20 août, avec un commando FTP, le siège du ministère de l’Information au 10 rue de Solférino et préside le comité central de grève des fonctionnaires parisien. Jacques Pruja a été homologué au titre de la Résistance intérieure française (RIF).
Secrétaire adjoint de l’Union générale des fédérations de fonctionnaires (UGFF) en 1945 et jusqu’en 1950, il collabora avec le cabinet de Maurice Thorez, ministre d’État chargé de la Fonction publique, et les syndicats des fonctionnaires, pour l’élaboration d’un statut de la Fonction publique, tâche qu’il accomplit en étroite collaboration avec Max Amiot des Contributions indirectes et une équipe de syndicalistes.
Anicet Le Pors alors ministre de la Fonction publique rappela que Maurice Thorez se heurta « à plusieurs difficultés dans l’élaboration d’un statut propre. À commencer par les réserves de la Fédération générale des fonctionnaires (FGF-CGT), qui demeure campée sur sa revendication d’un « contrat collectif », associant l’idée de statut à celle de « carcan ». Jacques Pruja, l’un des dirigeants de la fédération, prendra toutefois le contre-pied de la position de son organisation, qu’il finira par convaincre. »
En 1947, il fut élu membre suppléant du comité central du Parti communiste français.
De graves ennuis de santé l’éloignent dès lors des responsabilités. Inspecteur principal en 1951 il exerce successivement à Melun et à Pau.
Il épousa Hélène Languene le 14 novembre 1925 à Versailles en premières noces et Suzanne Bereult le 11 janvier 1940 à Paris dont il divorça en juillet 1961. Il mourut à Pau (Pyrénées-Atlantiques) le 19 février 1988.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article127545, notice PRUJA Jacques [PRUJA Joseph, Augustin, Jacques] par Daniel Grason, Jean Maitron, Claude Pennetier, version mise en ligne le 30 novembre 2020, dernière modification le 1er octobre 2022.

Par Daniel Grason, Jean Maitron, Claude Pennetier

SOURCES : RGASPI, Moscou, 495 270 264. – Arch. Nat. F7/13024 et 13030. – Arch. Dép. Vendée, 1 M 260, 4 M 405 et 408. – Arch. Dép. Ille-et-Vilaine. – Arch. PPo. 83, 17 janvier 1944. – Arch. PPo. Carton 8 dossier 34. – Bureau Résistance GR 16 P 492713. – Le Cri des travailleurs, 1936. – L’Aurore d’Ille-et-Vilaine, 1937. – Stéphane Courtois, La Politique du PCF et ses aspects syndicaux, 1939-1944, Th., op. cit. – André Narritsens, Le syndicalisme des indirectes (1940-1968), Institut d’histoire sociale, 2005. – Anicet Le Pors, « Les fonctionnaires, voilà l’ennemi », Le Monde diplomatique, 1er avril 2018. – État civil.

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