Par Yves Lequin, Guillaume Davranche
Né à Saint-Étienne (Loire) le 1er février 1882, mort le 23 octobre 1923 à Saint-Étienne (Loire) ; ajusteur, puis fraiseur ; anarchiste et syndicaliste.
Fils de commerçants bouchers, Jean-Baptiste Rascle signa un engagement volontaire de quatre ans dans l’armée le 9 avril 1900 à Saint-Étienne. Il fut incorporé comme 2e canonnier conducteur au 19e régiment d’artillerie. Le 9 février 1904, il fut condamné, par le conseil de guerre, à un mois de prison pour abandon de poste, alors qu’il gardait les écuries. Il fut libéré du service le 9 mai 1904, mais le certificat de bonne conduite lui fut refusé.
Animateur des Jeunesses syndicalistes et du Groupe d’action syndicaliste de Saint-Étienne, Rascle fut, de 1910 à 1914, une des grandes figures de l’agitation révolutionnaire et antimilitariste dans la région. À la fin de l’année 1910, il était proposé pour l’inscription au carnet B en même temps que Benoît Liothier, Jean-Marie Tyr et Urbain Malot, entre autres, pour avoir mené la campagne contre les bagnes militaires. Il habitait alors 70, rue du Treuil, à Saint-Étienne.
Il fut délégué par la bourse du travail dans quelques-uns des conflits les plus durs du moment. Ainsi, le 15 octobre 1910, pendant la grève des cheminots, il conduisit avec Henri Toti un cortège de 2.000 personnes qui tenta d’occuper la gare de Châteaucreux ; face à la mobilisation de la police et de la cavalerie, la manifestation tourna à l’émeute, des barricades furent édifiées. Le 17, Henri Toti et Rascle furent arrêtés pour leur rôle dans la journée.
En juin et juillet 1911, Rascle alla animer, pendant quarante-huit jours, la grève des chargeurs de wagons aux Aciéries de la Marine de Saint-Chamond ; en août et septembre, il était auprès des grévistes des aciéries de Lorette ; en novembre et décembre, auprès des mécaniciens-constructeurs en automobiles de la même ville. Il était alors signalé comme un des anarchistes les plus dangereux.
Il participa à la fondation, le 18 novembre 1911, de l’Union départementale au sein du syndicat de la métallurgie qui était à Saint-Étienne la place forte du syndicalisme révolutionnaire. La même année, il avait été délégué, en avril, au congrès de la Fédération des métaux à Paris où il était intervenu.
En 1913, aux côtés de Benoît Liothier, Henri Toti et Dominique Mongour, Rascle prit une part active à la lutte contre la loi des trois ans, multipliant les tournées de propagande et les meetings ; en juin, il fut arrêté à Firminy alors qu’il vendait des chansons révolutionnaires au profit des soldats emprisonnés ; le 21 juillet 1913, le tribunal correctionnel de Saint-Étienne le condamna à quinze jours de prison pour « outrage à commissaire de police ». Il habitait alors 12, rue de la Rivière, à Saint-Étienne.
Au moment de la déclaration de guerre, Rascle fut du groupe d’antimilitaristes qui, comme Benoît Liothier, Philippe Goy et Nicolas Berthet, se cachèrent un temps dans les bois du Pilat pour échapper à l’application du Carnet B. Finalement, le 6 août 1914, il répondit à l’appel et rejoignit le 6e régiment d’artillerie. Il fit la guerre dans plusieurs régiments d’artillerie puis, le 6 mai 1916, fut affecté spécial aux Ateliers de construction de Puteaux.
Le 9 mars 1918, la commission de réforme de la Seine le proposa pour être réformé n°1 avec gratification de 5e catégorie pour avoir contracté la tuberculose (« bacillose pulmonaire avec signes d’induration des sommets »). Il fut effectivement réformé n°1 le 25 août 1918 par décision ministérielle, avec gratification de 400 francs. La décision lui fut notifiée le 3 octobre.
Après avoir milité, en 1918, avec Bénetière, au Comité de défense sociale, puis à l’ARAC, il participa à la constitution, en octobre 1920, des comités syndicalistes révolutionnaires, avec Eugène Soullier des typographes, Dieu des Métaux, Henri Lorduron du Bâtiment et Pourreaux, trésorier de la bourse du travail. C’est lui qui avait pris contact à Paris avec la minorité syndicaliste où il avait rencontré en mai 1920 Victor Godonnèche qui remplaçait alors à la tête des CSR Pierre Monatte emprisonné.
Militant du Groupe anarchiste d’études philosophiques, il salua en août 1920, les « bienfaits » du bolchevisme et fut représentatif du courant anarchiste révolutionnaire séduit par la Révolution russe.
Cependant, la tuberculose le ravageait. Le 7 juin 1920, la commission de réforme de Saint-Étienne le proposa pour une pension temporaire, avec une invalidité de 100%. Ce lui fut refusé. Le 20 juillet 1921, il fut proposé pour une pension temporaire, avec une invalidité de 30%. Nouveau refus. Le 22 juillet 1922, il fut proposé pour une pension définitive, avec une invalidité de 30%. Dernier refus. Il mourut à l’automne 1923.
Par Yves Lequin, Guillaume Davranche
SOURCES : Registres matricules de la Loire. — Arch. Nat. F7/12994 et 13053. — Arch. Dép. Loire, 10 M 25 et 26, 19 M 10 et 19 M 25, 92 M 191 et 192, 92 M 194.