RENARD Louis, Jean-Marie

Par Jean Maitron

Né le 24 juin 1887 à Deluz (Doubs), mort le 4 janvier 1969 à Héricourt (Haute-Saône) ; instituteur ; syndicaliste, coopérateur ; militant communiste, secrétaire de la Fédération communiste indépendante de l’Est (1932-1934).

Petit-fils de paysans et de petits meuniers, fils de boulanger, Louis Renard fut élève de l’École normale de Besançon de 1903 à 1907. Il y fut « très apprécié pour la vivacité de son esprit, l’amabilité et l’ouverture de son humeur » (rapport de l’inspecteur d’Académie, 23 novembre 1921). Nommé instituteur en 1907, il devint en 1937 directeur du cours complémentaire d’Audincourt. Militant syndicaliste, il avait fondé en 1912 le groupe syndical des instituteurs du Doubs et adhéré au Parti socialiste SFIO. Combattant de la Première Guerre mondiale, fait prisonnier en 1918, il fut libéré l’année suivante après avoir été décoré de la Croix de guerre avec étoile de bronze.

Nommé à Valentigney (Doubs), Louis Renard était en 1919 secrétaire du syndicat des instituteurs récemment reconstitué et qui groupait environ cent cinquante adhérents. Il était assisté de Kiger (secrétaire adjoint), instituteur à Seloncourt et de Blanche* (trésorier), instituteur à Besançon. Le syndicat, ayant été mis en demeure de se dissoudre, Louis Renard préconisa la résistance, dans la mesure où le groupement avait été légalement constitué. Il ne fut pas suivi à l’assemblée générale du 11 novembre 1920 mais constitua alors une nouvelle section qui fut rattachée à la Fédération de l’Enseignement laïque. Convoqué par l’inspecteur d’Académie en novembre 1921, Louis Renard fut l’objet d’un avertissement en dépit des qualités qui lui étaient reconnues : intelligence et neutralité dans l’exercice de ses fonctions.

Il s’était marié à la directrice de l’école de filles de Valentigney. Louis Renard écrivit sous le pseudonyme d’Elher dans La Franche-Comté socialiste. Favorable à la IIIe Internationale, il rallia le Parti communiste dès sa fondation.

Coopérateur, Louis Renard fut administrateur délégué de la société coopérative de consommation « La Fraternelle » de Valentigney de 1919 à 1945. Cette fonction fut source de conflits entre lui et le Parti communiste (cf. rapport Tréand, BMP 304). Il avait été également l’un des fondateurs, le 21 décembre 1921, de la coopérative ouvrière de production métallurgique « L’Avenir ». En raison de ses activités, il était inscrit au carnet B.

En 1924, Louis Renard fut candidat aux élections législatives sur la liste du Bloc ouvrier et paysan et recueillit 4 150 voix sur 78 467 inscrits. A nouveau candidat en avril 1928 dans la circonscription de Montbéliard, il obtint 3 553 voix au 1er tour sur 26 126 inscrits. En accord avec ses camarades du rayon, il se retira au second tour malgré les consignes de la tactique « classe contre classe » qui imposait le maintien des candidats communistes au second tour. Le parti prit alors des sanctions lors de la conférence régionale de mai 1928 : Charles Fabrizi reçut un blâme, accompagné d’une interdiction de candidature durant quatre années, Edgar Ferrand* fut exclu pour un an, Louis Renard fut également blâmé.

Le Semeur du 27 avril 1929, rendant compte de la conférence régionale tenue peu de temps auparavant, constatait que le rayon Montbéliard-Valentigney avait redressé sa ligne politique. Les désaccords toutefois persistaient et, en janvier 1932, Le Semeur ouvrier publiait un article intitulé « Louis Renard passe de l’autre côté de la barricade » et stigmatisait « celui qui fut considéré par les travailleurs du parti comme un des meilleurs militants révolutionnaires de la région ».

Quelques mois plus tard, le dimanche 20 novembre 1932, à la coopérative de Valentigney, Louis Renard introduisit par un historique le congrès de la Fédération communiste indépendante de l’Est auquel assistèrent quelques dirigeants du Cercle communiste démocratique de Paris, Boris Souvarine notamment. Après l’audition de plusieurs rapports dont un de Paul Rassinier* sur le journal Le Travailleur, il fut procédé à l’élection du comité exécutif. A l’unanimité, Louis Renard fut maintenu au poste de secrétaire général de la fédération. Il était assisté par Émile Mourlot (trésorier fédéral), Jules Carrez, Henri Guental, Fernand Monnier pour Valentigney, René Coulon* et Edgard Ferrand pour Seloncourt, Paul Rassinier et Léon* pour Belfort, Marcel Ducret* et Lucien Hérard pour Besançon.

En 1933, Louis Renard était toujours secrétaire général de la Fédération communiste indépendante de l’Est. C’est au printemps 1934, semble-t-il, qu’il revint au Parti socialiste, rentrée ratifiée par la Fédération départementale avec l’« ancienneté qu’il détient au parti depuis avant la scission de 1920 ».

Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, la vie militante de Louis Renard fut centrée sur « La Fraternelle ». En 1937, il fut élu au comité coopératif national. Durant cette période, il publia le fruit de ses recherches historiques.

Son attitude durant l’Occupation allemande lui valut de sévères critiques à la Libération. Louis Renard se retira alors du mouvement coopératif, cessa ses fonctions enseignantes et alla se fixer à Héricourt. En 1963, l’Académie des sciences morales et politiques lui décerna l’un de ses prix annuels.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article128507, notice RENARD Louis, Jean-Marie par Jean Maitron, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 31 mars 2021.

Par Jean Maitron

ŒUVRE : Historique de La Fraternelle de Valentigney, 1936. — Le Mouvement coopératif de consommation en France, 1938. — Histoire illustrée du pays de Montbéliard, 1941. — La Franche-Comté, histoire et civilisation, 1943. — L’étrange destin de deux Romanof, 1969.

SOURCES : Arch. Nat. F7/13104, 13743, 13744, 13746, 13749. — Le Semeur ouvrier, 23 janvier 1932. — Le Travailleur, 26 novembre 1932, 13 décembre 1933. — La Tribune du Doubs, 13 février 1937. — Fonds d’archives Jean Gaumont*-Gaston Prache. — La Bourgogne républicaine, 29 janvier 1954. — Le Coopérateur de France, 24 août 1965, 1er février 1969.

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