REYNAUD René [APERCÉ René, Henri dit]

Par Jean-Louis Panné

Né le 17 avril 1892 à Niort (Deux-Sèvres), mort d’une septicémie le 9 mars 1933 à Paris (XIVe arr.) ; gérant du Bulletin communiste ; secrétaire du Comité de la IIIe Internationale ; rédacteur à l’Humanité et secrétaire de rédaction de L’Internationale.

Ouvrier menuisier, René Apercé appartint, avant la Première Guerre mondiale, à un groupe de jeunes gens qui fréquentaient assidûment le théâtre de l’Odéon dirigé par Antoine (voir Henri Suchet). Plutôt anarchisant, il se retrouvait avec ses compagnons pour assister aux meetings contre le tsarisme, aux manifestations contre la loi des trois ans et fréquentait l’Université populaire du Faubourg-Saint-Antoine. C’est de cette époque que date son amitié avec Boris Souvarine. Mobilisé pendant la Première Guerre mondiale, il combattit sur l’Yser et à Salonique.

Au lendemain de sa démobilisation, René Apercé rejoignit le Parti socialiste à la IXe section. Adhérent de l’ARAC, il milita au sein du Comité de la IIIe Internationale et prit comme pseudonyme le nom de sa compagne Esther Reynaud, ouvrière plumassière. René Reynaud fut élu le 30 novembre 1919 membre du comité de la Société des Amis du peuple russe au cours de la première assemblée générale de cette organisation. Il en devint par la suite le secrétaire adjoint.

Lorsque les secrétaires du Comité de la IIIe Internationale (B. Souvarine et Fernand Loriot) créèrent le Bulletin communiste, René Reynaud accepta d’en être le gérant et l’administrateur sous son vrai nom et le resta jusqu’à la crise d’octobre 1922 consécutive au congrès de Paris. Avant le congrès de Strasbourg du Parti socialiste (février 1920), il signa dans le 1er numéro du Bulletin communiste, daté du 1er mars 1920, l’appel des partisans de la IIIe Internationale. Courant 1920, il signa la brochure intitulée Petit catéchisme bolchevik qui, selon B. Souvarine, fut rédigée par Lucien Deslinières*.

Après l’arrestation des secrétaires du Comité de la IIIe Internationale (Fernand Loriot, Pierre Monatte, Souvarine), René Reynaud fut appelé à prendre de nouvelles responsabilités. Il devint secrétaire de la IXe section et surtout secrétaire par intérim du Comité de la IIIe Internationale aux côtés de Victor Godonnèche et Jean Ribaut. Il fut l’un des animateurs de la campagne en faveur des emprisonnés dénonçant ces arrestations comme un « attentat à la liberté de pensée ». Il mena campagne contre les « Reconstructeurs » qu’il accusa de saboter la solidarité en faveur des emprisonnés (voir la rubrique « loyauté des Reconstructeurs » dans le Bulletin communiste). Ainsi les circonstances le placèrent au premier rang du courant favorable au bolchevisme, ce qui justifie le qualificatif de « membre du groupe fondateur du Parti communiste en France » qu’employa à son égard B. Souvarine.

René Reynaud signa la résolution du Comité de la IIIe Internationale en vue du congrès de Tours qui fut publiée dans l’Humanité du 3 novembre et dans le Bulletin communiste (n° 40, 4 novembre 1920). Il fut le quatrième signataire de cette résolution décisive (signée d’abord par les membres du Comité de la IIIe, puis par les démissionnaires du Comité de reconstruction de l’Internationale) puisqu’elle devait rassembler autour d’elle la nouvelle majorité qui donna naissance à la Section française de l’Internationale communiste. Au cours du congrès, René Reynaud et André Le Troquer* assurèrent la liaison entre la salle du Manège de la capitale tourangelle et la cellule des emprisonnés à la Santé. Tous deux organisèrent également la venue au congrès de Clara Zetkin, avec l’aide d’Auguste Mougeot*. Au congrès, René Reynaud détenait des mandats d’Alger, du Morbihan, d’Oran, de l’Orne et de la Seine et donna lecture, le 26 décembre, de la lettre de militants du Haut-Rhin en faveur de la IIIe Internationale. Le 30 décembre, il fut élu membre du conseil d’administration et de direction de l’Humanité.

Tout au long de l’année 1921, René Reynaud resta à la direction du Comité de la IIIe Internationale qui ne fut dissous qu’en octobre de la même année à la suite d’une décision prise par ses représentants et la direction de l’IC au cours du IIIe congrès mondial. Lors de l’assemblée générale du 13 mai 1921, il avait été reconduit au poste de secrétaire par intérim puis, après la libération des secrétaires en titre, était redevenu secrétaire adjoint. C’est en cette qualité qu’il présenta au cours de la commission exécutive du 8 juin un rapport sur le rôle de la presse. Le 31 octobre, lors de la dernière réunion de la CE du comité, il fit le rapport financier du Bulletin communiste. Collaborateur régulier de l’Internationale, il en devint l’un des secrétaires de rédaction.

René Reynaud appartenait à la tendance dite de gauche au sein du parti. En relation avec B. Souvarine, délégué à l’Exécutif de l’IC, il recevait le double des documents de l’IC concernant le PC. C’est ainsi qu’en mai 1922, il put faire état de la résolution sur le « cas Henri Fabre » en même temps que le secrétariat qu’il accusa alors d’avoir caché ces documents (voir J. Humbert-Droz, I, rapport du 30 mai 1922). Le 10 septembre 1922, il fut élu à la commission de contrôle de la Fédération de la Seine. Il signa la « Réponse à la déclaration des membres du centre » parue le 24 septembre dans l’Humanité. Après le congrès de Paris (15-20 octobre 1922) qui vit la mise à l’écart des responsables de la gauche du parti, il démissionna de ses fonctions à l’Humanité avec plusieurs autres rédacteurs dont Amédée Dunois* ; ce fut lui qui porta leur démission au nouveau Comité directeur lors de sa première séance. Il collabora alors à l’organe de la gauche, Les Cahiers communistes, et participa en novembre à la souscription lancée pour l’édition du discours que Fernand Loriot avait prononcé le 5 février précédent devant la Fédération de la Seine. Après l’intervention de l’Exécutif de l’IC pour mettre fin à la crise, René Reynaud fut désigné par le conseil national du 21 janvier 1923 au conseil d’administration de l’Humanité dont il devint l’un des secrétaires de rédaction. C’est au nom de la rédaction et de l’administration du quotidien communiste qu’il prononça un discours aux obsèques d’Antoine Ker.

Courant 1923, il s’opposa progressivement à Albert Treint* dont il n’admettait pas le comportement autoritaire. A la suite d’un incident bénin (la perte d’un manuscrit du secrétaire général), il reçut le 22 mai 1923 un blâme de la part du Bureau politique. Il conserva néanmoins ses responsabilités puisqu’il fut désigné par le Comité directeur le 21 novembre 1923 comme rapporteur sur les « questions sportives » au IIIe congrès du Parti communiste (Lyon, 20-23 janvier 1924). Il présenta à ce congrès non seulement ce rapport mais aussi celui sur l’Humanité.

Courant 1924, alors qu’une nouvelle crise née en écho aux débats soviétiques sur le « cours nouveau du Parti bolchevik » agitait le Parti communiste, il soutint l’action de Boris Souvarine, participant en avril à la souscription pour l’édition de Cours nouveau de Léon Trotsky*. Hostile à la « bolchevisation », René Reynaud quitta ses dernières responsabilités, se contentant de suivre les activités de la Fédération sportive du travail, donnant quelques articles à ce sujet (cf. la Russie nouvelle, n° 3, 1925).

Il avait épousé le 14 août 1924 à Bobigny Marie Ker, sœur de Antoine Ker. Atteint de maladies successives, il mourut d’une septicémie et fut incinéré le 12 mars 1933 au Père-Lachaise.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article128704, notice REYNAUD René [APERCÉ René, Henri dit] par Jean-Louis Panné, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 3 septembre 2020.

Par Jean-Louis Panné

SOURCES : Arch. Nat. F7/12987, 12992, 13030. — Bulletin communiste, 1er mars, 3 juin, 10 juin 1920, 9 août 1923, juillet 1933 (nécrologie). — Les Cahiers communistes, 1922. — J. Humbert-Droz, Origines et débuts des partis communistes, t. 1, 1919-1923, op. cit. — Le Travailleur (Belfort), 18 mars 1933. — B. Souvarine, Autour du Congrès de Tours, Champ libre, 1981. — État civil de Niort et de Paris. — Notes de Jacques Girault et de Julien Chuzeville.

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