RICHARD Paul [BI]

Par Rémi Skoutelsky

Né le 2 mars 1911 dans un village proche de Saint-Quentin, Fieulaine (Aisne), mort le 30 novembre 1986 ; ouvrier forgeron ; secrétaire des JC de la Région Paris-nord ; volontaire en Espagne républicaine ; correspondant de l’Humanité en Allemagne.

Les parents de Paul Richard, journaliers, exerçaient également d’autres métiers : sa mère, celui de tisserande à domicile, son père celui de cordonnier ambulant. Ce dernier était autant imprégné d’idéal républicain — accordant une grande importance à l’instruction — que sa femme l’était de foi catholique. Orphelin à l’âge de dix ans, Paul Richard fut recueilli par son frère et ses sœurs (rédactrices au ministère des Finances), beaucoup plus âgés que lui, qui l’emmenèrent à Paris.

Poursuivant ses études primaires, Paul Richard fut reçu parmi les premiers de son arrondissement au concours des lycées et collèges et obtint le Certificat d’études. Entré en apprentissage à douze ans aux Caméras Éclair, société dans laquelle travaillait son frère (ouvrier ajusteur de haute précision), il fut renvoyé après une bagarre avec son chef d’atelier. Il passa alors le concours de l’école d’apprentissage de la Société des transports en commun de la région parisienne et devint apprenti forgeron aux ateliers d’autobus de Saint-Denis (Seine). Il assista à sa première grève et l’agression d’ouvriers par les gardes mobiles détermina son engagement politique. Il adhéra peu après, en 1925-1926, aux Jeunesses communistes qui étaient implantées dans l’usine. Paul Richard passa son CAP en 1928 devenant ainsi ouvrier d’État. Il adhéra aussitôt à la CGT, seul syndicat de son atelier.

En 1931, il effectua son service militaire dans le peloton des élèves sous-officiers et termina comme caporal dans le 2e génie ; puis il fut réembauché à la STCRP. En 1934, Paul Richard fut particulièrement sensibilisé par la répression de la révolte des Asturies. Cette même année, il adhéra au Parti communiste (1933 selon son autobiographie) et devint rapidement secrétaire de la Région Paris-nord des JC, puis fut élu membre de leur comité central.

Lors du soulèvement des généraux nationalistes espagnols en juillet 1936, il était toujours secrétaire des JC, membre de son Bureau régional et du Bureau régional du PC. Il appartenait en même temps à la direction du syndicat des Transports de la région parisienne. Il habitait à l’époque avec Fernand Bélino à Épinay-sur-Seine. Tous deux se portèrent volontaires pour l’Espagne. Si Bélino fut autorisé à partir, le parti demanda à Paul Richard de rester.

En février 1937, il fit partie du groupe des « 21 », la plupart cadres des JC, qui partirent rejoindre les Brigades internationales en Espagne. Arrivé vers le 21 ou 22 février à Albacete, il fut affecté immédiatement à une compagnie de génie en formation, qui ne fut pas envoyée au front en tant que telle mais utilisée comme renfort d’infanterie. Paul Richard, quant à lui, fut nommé responsable d’un atelier de réparation de matériel à Albacete « l’usine n° 2 », où il eut à étouffer une grève organisée par la CNT en mai 1937, en pleine bataille du Jarama. Il demanda aussitôt après à retourner au front et fut nommé commissaire politique du groupe d’artillerie « Anna-Pauker » (voir Joseph Lefort, Simon Lagunas), dépendant directement de la 35e division. Une fois le front stabilisé, Paul Richard fut envoyé à Madrid où il remplit une mission pour le service de renseignement des Brigades, se faisant passer pour déserteur afin d’introduire « certains milieux ». Son activité au sein du SIM fut cependant de courte durée et il fut quelques temps affecté à la base d’Albacete. Il y connut sa future femme, dactylo-interprète au service des cadres de la base des Brigades internationales. Fille d’un anarcho-syndicaliste espagnol exilé en France au début du siècle, née en France, elle suivit son père lorsqu’il fut expulsé en 1926-27 pour ses activités politiques. Ouvrière, elle était elle-même anarchiste lorsqu’elle offrit ses services aux Brigades.

Paul Richard fut ensuite reversé au groupe « Anna-Pauker » et participa à l’offensive de Belchite (fin août 1937). Le groupe fut utilisé sur plusieurs fronts, pas toujours par la 35e division. Il participa notamment à la bataille de Teruel (décembre 1937-février 1938). Arrivé à la base d’artillerie Almansa avec son groupe pour se reconstituer après les combats, Paul Richard fut nommé commandant intérimaire de la base au bout de quelques jours, le commandant en titre ayant déserté pour rejoindre les franquistes.

Paul Richard prit part à l’offensive de l’Ebre, mais rentra en France en septembre 1938 pour y accomplir une période de réserve, le parti lui ayant intimé l’ordre de répondre à la convocation. Il suivit les cours de l’École centrale du PC à Arcueil jusqu’en mai 1939, date à laquelle il se maria. Il fut membre du bureau de l’AVER dès son retour en France.

Mobilisé en 1939 à Metz, où il avait fait son service militaire, Paul Richard fut accusé, par un tribunal composé d’officiers, de s’être approprié ses galons de caporal — ses papiers militaires ayant été perdus —, d’être un insoumis et d’avoir combattu dans une armée étrangère. De surcroît, il fut considéré comme un agent hitlérien en raison du soutien du Parti communiste au Pacte germano-soviétique. Mais ayant apporté la preuve qu’il s’était rendu à l’ambassade de France en Espagne pour accomplir sa période militaire en 1938, il ne fut pas dégradé. Fait prisonnier le 20 juin 1940, blessé au pied, il fut transféré en Allemagne. Après une tentative d’évasion en avril 1941, il se retrouva dans une compagnie disciplinaire et fut déporté au camp de Rawa-Ruska en avril 1942 (après avoir transité par Buchenwald). Là, il créa une cellule du PC dont le but était de diffuser des mots d’ordre tels que « s’évader, semer la pagaille, organiser des grèves ».

Après la Seconde guerre mondiale, Paul Richard, ayant appris l’allemand en captivité, fut envoyé, comme correspondant de l’Humanité en Allemagne. Il exerça également les fonctions d’instructeur auprès d’une Fédération du PC en Alsace-Lorraine.

De retour en France, il devint représentant de commerce en peintures et papiers peints pour une affaire ayant comme principal client le comité d’entreprise des usines Renault à Boulogne-Billancourt. Puis il monta sa propre entreprise, « le Centre de la peinture », à Boulogne-Billancourt, où il s’installa.

Paul Richard faisait encore partie du bureau national de l’AVER et militait toujours au PC lorsqu’il mourut en 1986, quelques heures après avoir participé à la commémoration du 50e anniversaire des Brigades Internationales.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article128839, notice RICHARD Paul [BI] par Rémi Skoutelsky, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 5 juillet 2022.

Par Rémi Skoutelsky

SOURCES : RGASPI, 495 270 5688, autobiographie, 21 septembre 1938, classé A1S. — L’Humanité, 3 décembre 1986. — Témoignage de l’intéressé recueilli par E. Bobrowski. — Paloma Fernandez, Le Retour et l’action des anciens volontaires français des Brigades internationales en région parisienne de 1937 à 1945, Mémoire de Maîtrise, Paris I, 1984. — Témoignage de R. Ossart.

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