ROBERT Jean, Auguste

Par André Balent

Né le 4 juillet 1917 à Marseille (Bouches-du-Rhône), guillotiné le 22 avril 1943 à Nîmes (Gard) ; électricien ; militant communiste ; résistant.

Fils de Jean Auguste Robert et de Louise Jeanne Icard, sans profession, Jean Robert travaillait comme électricien dans la réparation navale. Il était domicilié 14 rue des Hortensias, quartier Saint-Just à Marseille. Il adhéra à la Jeunesse communiste en 1934, devint le responsable de la JC de son quartier, puis, en 1936, adhéra au Parti communiste.
Militant clandestin à partir de 1939, Jean Robert gagna Nîmes en février 1940, il habitait 23 rue Pavée. Il y fut arrêté le 2 janvier 1942, puis fut transféré au fort Saint-Nicolas à Marseille. Il s’évada le 27 janvier et retourna à Nîmes, où il prit la direction d’un groupe de Francs-tireurs et partisans français (FTPF) sous la direction de Pierre Doize. Arrêté à nouveau le 3 mars 1943, avec Vincent Faïta, il fut comme lui condamné à mort par un tribunal spécial français et guillotiné le 22 avril à 6 heures, à la maison d’arrêt de Nîmes.
Il était marié avec Marguerite Darmasson (1922-1983) et père d’un enfant : Jean-Claude. Il était domicilié en dernier lieu 14 rue des Hortensias, Saint-Just, Marseille (Bouches-du-Rhône).
Jean Robert a reçu la mention « Mort pour la France » et a été homologué lieutenant des FFI à titre posthume.
Un maquis FTPF des Pyrénées audoises, commandé par Victor Meyer et implanté près de Salvezines (Aude), prit le nom de « Jean Robert ».
Une plaque commémorative en hommage à Jean Robert et Vincent Faïta a été apposée sur la façade du Palais de Justice de Nîmes : guillotinés "sur ordre du gouvernement français au service de l’occupant nazi" . Son nom figure sur la stèle aux morts de la Résistance des Bouches-du-Rhône au carré militaire du cimetière Saint-Pierre à Marseille.

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Dernière lettre
 
Chers grands-parents et chers amis,
Je ne vous aurais pas écrit cette lettre, pour ne pas vous, peiner, mais la dure nouvelle vous serait parvenue quand même, aussi je n’hésite pas à vous écrire, espérant que ma lettre vous fera quand même plaisir... si l’on peut employer ce qualificatif. Je vous demande de ne pas être trop affectés par cette condamnation, d’avoir du courage et, ayant vu où se trouve le devoir, de travailler à l’accomplir.
Vous, chers grands-parents, ne baissez pas la tête, soyez fiers que le jeune mari de Guitte soit mort pour son pays, pour la liberté, pour son idéal. Aimez bien Marguerite et Jean-Claude,, soignez-les beaucoup, car hélas ! Guitte est bien malheureuse. Peu, à peu elle se remettra, surtout avec notre joli Jean-Claude qui sera là pour l’inviter à sourire. Et puis, avec le temps, la consolation viendra.
Souvent, je revois ces belles journées passées dans ce village avec nos parents et amis, tous si gentils. Oui, c’étaient de belles.. journées ; que de délicieux souvenirs restent en moi, surtout en ces journées si tristes.
Mais tout a une fin, celle-ci, pourrait-on dire,prématurée ; les événements n’ont pas permis que je connaisse encore ces joies, beaucoup plus grandes dans un pays enfin heureux.
Pourtant, je comprends que j’ai choisi la bonne route, la route qui mène au bonheur des peuples dans une humanité réconciliée.
Mais ce chemin est long et difficile, beaucoup parmi nous sont tombés, d’autres tomberont encore, pourtant le jour n’est pas très éloigné où les peuples prendront leur revanche, et notre beau peuple de France ne sera pas le dernier.
Ce jour-là, pensez un peu à nous autres, qui seront tombés sans le connaître, bien que le sentant tout proche et ayant œuvré de toutes nos forces à le réaliser. Nous sommes sûrs que, pour quelques Français injustement mis à mort, ce sont des centaines, des milliers de patriotes qui se dresseront pour la relève, pour mener le bon combat qui doit être la libération de chaque pays et le bonheur de chaque peuple.
Ayez confiance en la victoire, elle est là toute proche.
Peut-être pourrais-je vous parler un peu plus de moi. Eh, bien voici le moral et la santé vont à peu près bien, évidemment,je suis à un régime dont le moral et le physique souffrent.
Surveillé sans cesse par des gardiens, dans un cachot tout noir, j’ai de grosses chaînes aux pieds comme les pires assassins.
Toutes les mesures quelles qu’elles soient ne nous abattent pas, mon ami et moi. Seulement l’exécution mettra fin à notre courage, à notre flamme. Un patriote, un communiste ne se laisse pas abattre moralement. Certains parmi les capitulards, parmi les traîtres, seraient heureux de nous voir faiblir qu’ils ne se leurrent pas, ils n’auront pas ce plaisir.
Et bientôt leur tour viendra, alors vous pourrez rire de les voir trembler comme des lâches.
Allons, chers parents et chers amis, je vous quitte pour toujours. Avant de mourir, je penserai encore à vous. Courage et espoir : telle était notre devise, telle est la vôtre.
Je vous embrasse tous, de toutes mes forces, de tout mon cœur.
 
Jean

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article129179, notice ROBERT Jean, Auguste par André Balent , version mise en ligne le 18 avril 2016, dernière modification le 4 avril 2022.

Par André Balent

SOURCES : Aimé Vielzeuf, En Cévennes et Languedoc. Au temps des longues nuits, Nîmes, Lacour, 2002, 275 p., en particulier, p. 19-103. — Rouge-Midi, 26 septembre 1944 (iconographie), 30 avril 1945, 29 avril 1947. — Brochure de Pierre Doize. – Lettres de fusillés, Éditions France d’abord, 1946, p. 171-173. — Témoignage de la famille de Vincent Faïta. — État civil.

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