ROGER Paul dit PAUL Roger, Gaston, Georges

Par René Lemarquis, Gilles Morin

Né le 17 mai 1903 à Troyes (Aube), mort à Berlin fin 1944 ; ouvrier du textile ; syndicaliste CGTU, puis responsable CGT ; secrétaire du syndicat confédéré du Textile et secrétaire adjoint de l’Union départementale CGT de l’Aube ; secrétaire général de la Fédération du Textile et membre de la commission administrative de la CGT à l’automne 1939 ; militant successivement du PUP, de la SFIO puis du RNP ; membre du Conseil national créé par Vichy en 1941.

Fils de bonnetiers, ouvrier à Troyes (Aube), Paul Roger était l’un des responsables du syndicat unitaire du Textile de cette ville. Il se rallia à René Plard en 1932 et devint en février 1933 membre du bureau départemental des Amis du Rappel de l’Aube, l’hebdomadaire du Parti de l’Unité prolétarienne (PUP) de ce département où il était chargé des problèmes sports et jeunesse. Il fut réélu au comité central de cette organisation en novembre de la même année et, en janvier 1935, devint gérant du Rappel. Avec Plard, Paul Roger fut l’un des organisateurs des manifestations unitaires à Troyes après le 6 février 1934. Il fut présent à la tribune lors de la venue à Troyes de Doriot en juin 1934.

Paul Roger quitta la CGTU en mars 1934 pour devenir, à la place de Jules Enfroy, secrétaire du syndicat confédéré du Textile. Puis, il fut en juin suivant secrétaire adjoint de l’Union départementale CGT de l’Aube. Il menait une bataille contre la diminution des salaires et se fit le chantre de l’unité syndicale à laquelle travaillait activement le syndicat du textile auquel il appartenait et qu’il soutenait dans ses papiers du Rappel. Il fut délégué par l’Union confédérée départementale pour la représenter au meeting de la CGTU sur l’Unité syndicale tenue à Troyes le 3 février 1935. Il conserva sa fonction à l’UD réunifiée en décembre 1935 et jusqu’en 1938 tout en étant administrateur de l’Aube ouvrière.

En février 1936, il fut élu, avec Marcel Mathieu, membre de la commission administrative nationale de la Fédération du Textile CGT. En juin, il signa les accords avec le patronat du Textile troyen et entra au conseil d’administration des Assurances sociales de l’Aube. Il se présenta au secrétariat général de la Fédération du Textile au congrès national de 1937 mais n’obtint que 2 341 voix (47 syndicats) contre 11 313 (378 syndicats) à Jules Vercruysse. Mais, en décembre de la même année, il fut élu à l’unanimité membre du secrétariat de la Fédération nationale ouvrière de l’industrie textile, dont le siège était au 213 rue Lafayette, en remplacement de Victor Vandeputte avec l’appui de Marcel Mathieu->50080] et Adrien Gennevois. Il avait désormais atteint un niveau national dans le syndicat et était membre de la commission administrative de la CGT. Il était à depuis juin 1937 domicilié à Paris, 4 avenue de la porte de Bagnolet.
Roger Paul avait rejoint la SFIO. Denis Coton écrit que dès la fin 1934 il avait la double appartenance aux Amis du Rappel et à la SFIO, devançant ainsi la majorité des militants du PUP qui ne rejoignit la SFIO qu’en 1937. Il représenta ce parti lors de l’inauguration de la rue Célestin Philbois en septembre 1935. Il appartenait au conseil d’administration de la société coopérative ouvrière qui racheta les Établissement SACO.

Le 27 août 1939, Roger signa avec René Belin et André Delmas un appel de syndicalistes contre le Pacte germano-soviétique. Après que le bureau confédéral eût dissous d’office le bureau fédéral du textile (en majorité ex-unitaire), il fut nommé secrétaire général de la Fédération du Textile.

Mobilisé en septembre 1939, à la 523e compagnie du train hippomobile aux Armées, puis au 18e escadron du train hippomobile à Paris, Roger Paul a été démobilisé en décembre suivant. Il fut placé en affectation spéciale en mars 1940, à la demande du ministère de l’Intérieur, pour occuper ses fonctions de secrétaire général de la Fédération nationale ouvrière de l’industrie textile de France.

Conseiller national de Vichy, nommé le 4 mars 1941, il appartint à la 2e commission d’information générale et se rendait quelquefois dans la capitale de l’État français. Pourtant, Roger Paul se montra rapidement critique vis-à-vis de Vichy, épousant des thèses collaborationnistes. Il adhéra à la 20e section du RNP qui le délégua au congrès national des 15 et 17 juin 1941, puis à celui d’octobre 1942 et appartint aux comités techniques du rassemblement en juillet 1943. Il prit la parole lors de diverses réunions organisées par le RNP, notamment le 15 juillet 1941, au premier congrès du Rassemblement, le 30 octobre 1941, au cours d’une réunion privée, le 25 janvier 1942 lors d’une réunion publique à la Mutualité, le 10 mars 1942, lors d’une réunion du RNP à Paris, le 31 janvier 1943, à Clichy, il participa au 3e congrès de la Région parisienne le 11 juillet 1943. Lors d’une perquisition chez lui le 11 décembre 1941, la police avait trouvé une importante documentation communiste.

Roger Paul était tout d’abord un syndicaliste au cœur des réseaux favorables à la construction d’une Europe dirigée par les nazis. Collaborateur de l’Atelier, il participa au Comité d’information ouvrière et sociale (CIOS) présidé par Gabriel Lafaye, co-dirigea les activités du Comité ouvrier de secours immédiat (COSI), était également membre de la commission provisoire d’organisation de la famille professionnelle de la fabrication de tissus et industries similaires, appartenait au bureau d’étude du salaire proportionnel enfin aurait encore fait des émissions de propagande en faveur de l’Allemagne à Radio-Paris et à Radio-Lyon. Secrétaire de l’Union des syndicats textiles du Sud-Est, il fut proposé pour la commission d’organisation professionnelle qui prépara la Charte du Travail, pour représenter la famille industrie textile en 1941. Son attitude lui valut de violentes oppositions et il fut exclu en 1942 et remplacé par Smedts, vieux militant d’avant 1914. Il s’efforça de créer une fédération dissidente et fit geler les fonds de son ancienne fédération par les autorités occupantes.

Paul Roger participa dès 1941 à la fondation du Centre syndicaliste de propagande (CSP) dirigé par Aimé Rey et fut membre du comité directeur de l’organisation de l’avenue Montaigne. Il a été l’un des signataires de la résolution sur la construction socialiste française et européenne adoptée à l’issue de la conférence nationale syndicale organisée les 15 et 16 novembre 1941, à la maison de la Mutualité par le CSP qui refusait la Charte du Travail. Celle-ci se rapprocha rapidement du Rassemblement national populaire (RNP) de Marcel Déat dont elle devint une filiale. Selon Germain Rincent, le président du comité départemental de la Libération de l’Aube, il passait pour un ami intime de René Belin et de Georges Albertini.

Membre du conseil central du RNP en janvier 1943, le parti le désigna comme délégué avec Barbé pour parcourir les casernes de la Milice pour établir des rapports étroits avec le parti en 1944. Il aurait pour ce faire été recensé sur les listes d’adhérents de la Milice.

Il était par ailleurs membre du Cercle européen, organisme de collaboration intellectuelle et économique animé par des proches de Déat.

À la Libération il se réfugia en Allemagne. Le 18 octobre 1944, en son absence, il fut exclu à vie de toutes les organisations syndicales par la commission nationale de reconstitution des organisations syndicales. À la demande personnelle du ministre de l’Intérieur, Adrien Tixier, il fut activement recherché en vain. Il fut tué à Berlin lors d’un bombardement aérien fin 1944. L’événement n’étant pas connu durant plusieurs mois, un juge d’instruction près de la Cour de Justice l’inculpa d’atteinte à la Sûreté extérieure de l’État.

Marié à deux reprises (ayant divorcé), il eut un fils qui alla travailler en Allemagne.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article129397, notice ROGER Paul dit PAUL Roger, Gaston, Georges par René Lemarquis, Gilles Morin, version mise en ligne le 26 septembre 2013, dernière modification le 26 septembre 2013.

Par René Lemarquis, Gilles Morin

SOURCES : Arch. Nat., F/7/15282, notes du 20 mai 1944 ; 72AJ/558 ; AL/52, dossier Aube et AL/5293, dossier Seine ; F/1a/3684 ; F/22/1835 : 20010216/53/1417. — Arch. PPo, 1W1039 ; 77W/1509 ; PJ/24, dossier Cercle Européen. — Arch. CGT, fonds Jayat, boîte n° 1. — Le Rappel, 1932-1935. — L’Aube ouvrière, 1934-1939. — Le Petit Troyen, 1939. — C.r. du congrès d’unité du Textile (Paris, 18-20 juin 1937). — Le National-Populaire, n° 19, 24 octobre 1942 ; n° 29, 16 janvier 1943. — L’Atelier, 1er novembre 1941. — M. Sadoun, Les socialistes sous l’occupation, Paris, PFNSP, 1982. — R. Handourtzel et C. Buffet, La collaboration... à gauche aussi, Perrin, 1989. - Denis Coton, Un député maire de Troyes, René Plard, 1888-1946, Langres, Éditions Dominique Guéniot, 2005. — État civil.

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