ROUDIL Georges [ROUDIL Desmothène, Georges, Marius]. Pseudonyme : LANET

Par Maurice Moissonnier

Né le 8 avril 1905 à Saint-Étienne (Loire), mort le 4 février 1980 à Lyon (IIIe arr.) ; métallurgiste ; membre du bureau régional du Parti communiste à Lyon, du comité national des JC, du présidium de l’Internationale communiste des Jeunes à Moscou, secrétaire national des jeunes syndiqués et membre de la commission exécutive de la GGTU ; militant du PC clandestin arrêté en 1940, déporté à Buchenwald ; après la Libération, adjoint au maire de Vénissieux (Rhône) et membre du bureau fédéral du PC du Rhône.

Fils d’un mineur et d’une passementière, Georges Roudil fut baptisé et fit sa première communion avant de cesser tout rapport avec la religion ; il reçut une instruction primaire, une formation professionnelle en apprentissage mais son premier emploi fut celui de manœuvre. A dix-huit ans, en 1923, il donna son adhésion au Parti communiste et à la Jeunesse communiste : « Je fréquentais, expliquait-il, des camarades membres du parti que j’approuvais depuis longtemps. Aussi quand ils m’ont demandé d’adhérer pour me charger particulièrement de la reconstitution de la section des JC, j’ai accepté immédiatement, je me considérais d’ailleurs comme communiste avant d’avoir adhéré. » Il avait commencé à travailler à quinze ans à la Manufacture d’armes et cycles de Saint-Étienne et il participa, sans être syndiqué, aux grèves de 1920, prolongeant l’action — à l’incitation de quelques militants adultes — par des expéditions punitives au cours desquelles il allait casser les carreaux des « jaunes »... Il adhéra à la CGTU en 1924, au syndicat des Métaux, pendant une grève conduite par Benoît Frachon*.

Au Parti communiste et aux Jeunesses, Georges Roudil se vit confier très rapidement des responsabilités. Il se forma « sur le tas », dans l’action, sans jamais suivre d’école, par des lectures personnelles (il citait, parmi ses principales lectures Paul Lafargue*, Jules Guesde*, Karl Marx*, Friedrich Engels*, Lénine, Staline, Henri Barbusse*, Paul Vaillant-Couturier*, Jacques Duclos*, Maurice Thorez*, Louis Aragon* et Roger Vailland). Dès 1924, il fut élu au comité de rayon de Saint-Étienne chargé des questions de la Jeunesse, mais il ne tarda pas à « monter » au comité régional de Lyon et à devenir en même temps, de 1925 à 1927, secrétaire de la 17e Entente des Jeunesses communistes (région lyonnaise). II fut l’un des organisateurs du congrès contre la guerre du Maroc qui se tint à Lyon, en 1925, salle Étienne-Dolet.

En 1926, au congrès régional qui se tint à Lyon, Georges Roudil fut désigné pour assister en juin au congrès du Parti communiste de Lille et, à cette occasion, il rencontra pour la première fois Pierre Semard* et Maurice Thorez ; il fut d’autre part élu au Comité national des JC, poste qu’il occupa de 1926 à 1932. En raison des fréquents voyages à Paris qu’imposait cette responsabilité, il joua un rôle actif de liaison entre la direction nationale et la direction régionale des organisations communistes. En août 1927, il prit la parole au meeting de la Bourse du Travail de Lyon (cours Morand) pour la défense de Sacco et Vanzetti, meeting qui fut suivi de violents affrontements avec la police.

Une part de l’action militante de Georges Roudil était alors orientée en direction des jeunes faisant leur service militaire. Il organisait la diffusion clandestine de La Caserne dans les locaux militaires de la ville et celle du Conscrit lors des conseils de révision. Poursuivi en 1926 pour la diffusion de La Caserne, il fut condamné à un an de prison par défaut. Il représentait, à ce moment-là, la JC à Moscou en tant que membre du presidium de l’Internationale communiste des Jeunes, et retrouva dans la capitale soviétique Henri Barbé* qui était alors délégué du PC auprès de l’IC. A son retour en France, alors qu’il militait au secrétariat des JC sous le nom d’emprunt de Lanet, il fut arrêté et comparut devant un tribunal correctionnel qui le relaxa purement et simplement de l’accusation d’entreprise antimilitariste qui lui avait valu sa condamnation. Il participa à Saint-Denis au congrès du PC (avril 1929) et, le 1er août, contribua directement à la préparation de la journée de lutte contre la guerre en distribuant des tracts à l’usine Renault. A ce moment, au comité national des JC, il se heurta à Barbé qui, à propos des mots d’ordre qu’il proposait en vue de l’organisation d’un congrès des jeunes ouvriers, les trouva inadaptés et trop « économistes ». De 1930 à 1932, Georges Roudil assura en outre le secrétariat des jeunes syndiqués de la CGTU, ce qui le conduisit à devenir membre de la commission exécutive nationale de la Confédération unitaire et à participer au dernier congrès de la CGTU, celui de Paris, en 1935, avant la réunification syndicale l’année suivante. Dans l’exercice de ses fonctions syndicales, il fut envoyé à Vienne (Isère) avec Claudius Richetta* et Claverie* pour diriger l’action des jeunes lors de la grande grève des ouvriers du Textile qui se déroula dans la ville en mars-avril 1932. Il se trouvait rue des Clercs lorsque, dans la nuit du 8 au 9 avril, les affrontements avec les gardes mobiles aboutirent à l’érection de barricades. Par la suite, ce fut encore lui qui assura l’essentiel de la campagne électorale de Claudius Richetta, candidat à Vienne aux élections législatives de 1932. La faiblesse des forces du PC dans la circonscription (il n’avait d’organisation qu’à Vienne, Chasse-sur-Rhône et Saint-Priest) l’obligea souvent à coller lui-même les affiches qui annonçaient les réunions qu’il assurait le lendemain ; il fut aidé dans cette tâche par le jeune Daniel Llacer* qui devait illustrer tragiquement les périls de la lutte contre les ligues.

A partir de 1934, Georges Roudil fut élu membre du bureau régional du PC et secrétaire de la section de Vénissieux où il résidait (et où il devint en 1935 employé municipal), il allait conserver ces fonctions jusqu’en 1939. Souvent présent « sur le terrain », il était dans les rangs des manifestants en février 1934, au parc Bonneterre à Villeurbanne lorsque ceux-ci furent chargés par la police, et le 19 juin 1934, lorsque la répression d’une manifestation organisée contre une démonstration de la Solidarité française par le Comité régional de lutte contre la guerre et le fascisme provoqua la mort de L. Juston*. Il fut candidat malheureux aux élections cantonales dans la circonscription de Vienne-nord le 7 octobre 1934 ; au mois de mai 1935, il fut candidat aux élections municipales en deuxième position sur la liste conduite par Félix Brun* qui recueillit 2 913 voix au premier tour et se désista en faveur de la liste socialiste. En raison de l’importance de ses charges, il fut délégué en janvier 1936 au congrès du PC de Villeurbanne et, en décembre 1937, au congrès d’Arles. Dans la section de Vénissieux, il joua un rôle très actif lors des élections législatives de 1936 et lors des grèves qui suivirent la victoire du Front populaire aux élections. Il anima le comité de Front populaire de Vénissieux et développa une intense activité en faveur des républicains espagnols. Ce fut en partie sous son impulsion que la population de Vénissieux se distingua dans toute la région lyonnaise par le volume de l’aide matérielle (argent, vivres, vêtements) et de l’aide en hommes (volontaires des Brigades internationales) qu’elle accorda aux adversaires de Franco. Personnellement, à la fin de la guerre civile, Georges Roudil organisa l’évasion d’un combattant républicain espagnol du camp du Boulou dans les Pyrénées-Orientales.

Au moment du Pacte germano-soviétique, il affirma sa confiance en l’URSS et participa à la dernière réunion du comité fédéral du parti tenue dans un garage de la rue de l’Université avant la mise en illégalité de l’organisation.

Le 23 octobre 1939, Georges Roudil fut arrêté avec la trentaine de militants communistes ou de sympathisants qui avaient refusé de se désolidariser du pacte. Avec eux, il fut interné au fort du Paillet à Dardilly-le-Haut (Rhône) puis, le 23 janvier 1940, à Fort-Barraux. Au mois de mai, il fut libéré pour répondre à un ordre de mobilisation qui l’envoya à Avignon. Démobilisé en juillet, il revint à Vénissieux et renoua immédiatement les liens avec le Parti communiste clandestin alors dirigé par Joannès Chabert*. Avant la venue à Lyon du maréchal Pétain, Georges Roudil contribua à la grande opération lancée par le PC contre le régime de Vichy sous forme de tracts et d’affiches. Alors que la direction clandestine venait de décider le remplacement de J. Chabert, qui serait utilisé ailleurs, par Georges Roudil, il fut de nouveau arrêté en novembre 1940 avec de nombreux autres communistes en représailles des actions menées. Il fut successivement enfermé à Fort-Barraux (novembre 1940-janvier 1941, à la prison lyonnaise de Saint-Paul (janvier 1941-octobre 1941), à Saint-Sulpice-la-Pointe (octobre 1941-juillet 1944).

Le 1er juillet 1944, livré aux nazis, il fut transféré au camp de concentration de Buchenwald. Pendant toute la durée de son incarcération, dans chaque camp et chaque prison, il appartint à l’organisation clandestine du PC ; à Buchenwald, il était membre de la brigade de libération. Georges Roudil parvint à s’évader le 30 avril 1945 de la colonne des déportés. Il rentra en France le 13 mai 1945.

Sous la Quatrième République, il reprit sa place à la direction fédérale du Parti communiste du Rhône. Réélu en 1945 au comité régional, et élu au conseil municipal de Vénissieux dès 1947, il devint adjoint au maire, Louis Dupic*. De 1947 à 1965, Georges Roudil assura le secrétariat départemental de l’Association des élus républicains et, de 1948 à 1960, fut membre du bureau national de la même organisation. Il figura sur la liste des candidats à la deuxième Assemblée constituante dans la première circonscription du Rhône en 1946.

Au début des années soixante-dix, Georges Roudil était membre de l’Amicale des vétérans du PC (section du Rhône) ; la diminution de son activité militante était due avant tout à une surdité quasi totale.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article129757, notice ROUDIL Georges [ROUDIL Desmothène, Georges, Marius]. Pseudonyme : LANET par Maurice Moissonnier, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 25 novembre 2018.

Par Maurice Moissonnier

SOURCES : Arch. Nat. F7/13091, 13105, 13106, 13113, 13130. — Arch. Dép. Isère, 166 M 23. — Éléments tirés d’une notice biographique. — Documents personnels fournis par le militant. — Interview du militant.

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