Par Justinien Raymond
Né le 28 avril 1843 à Carpentras (Vaucluse), mort le 21 janvier 1920 à Marseille (Bouches-du-Rhône) ; ouvrier forgeron ; mécanicien ; puis journaliste ; militant ouvrier et socialiste de Marseille.
Pierre Roux naquit dans une famille de tradition républicaine. Son père Philippe était charron. Ouvrier forgeron d’origine, Pierre Roux exerça par la suite les métiers les plus divers. Il avait fait la campagne du Mexique au 51e régiment de ligne. En 1870, il était conseiller municipal de Carpentras, avait fait campagne pour le « non » au plébiscite, et fut appelé comme capitaine de la Garde mobile.
En 1871, il gagna Marseille où, tout en continuant d’abord à exercer son métier, il se lança dans le journalisme et l’action politique et sociale. Il devint vice-président puis président du syndicat de la presse marseillaise. Il gagna le surnom de « Père des syndicats » pour en avoir mis sur pied plus de cent parmi lesquels ceux des forgerons, scieurs, tourneurs sur métaux, ouvriers en sparterie, allumettiers, ouvrières des tabacs, caoutchoutières, dames du marché central, fileuses de crin, savonniers, carrossiers, etc. Il en collectionnait les présidences d’honneur. Après la loi de 1884, il travailla à consolider ces créations et prêcha la fédération entre syndicats.
Républicain et libre-penseur, socialiste indépendant sans doctrine précise puisqu’on l’a accusé d’être éclectique par intérêt comme il aurait été journaliste plagiaire par indigence intellectuelle, il se constitua une carrière politique à partir de ce 6e canton dans lequel il était très populaire. Il avait d’abord été conseiller d’arr. du 3e canton, de 1877 à 1883, et président du conseil d’arr. Il fut conseiller général de 1886 à 1911 pour le 6e canton devenu en 1911 le 9e. Il présida la commission départementale (1907-1908 et 1912-1913) et le conseil général de 1909 à 1910. Il fut réélu en décembre 1919 un mois avant sa mort, dans le 9e canton par 2 080 voix sur 3 130 votants. Son activité fut grande au conseil général et il y gagna une grande influence locale. Il y prit parfois aussi des attitudes politiques sur les grands problèmes du temps : en 1895, il soumit à l’assemblée une motion condamnant l’expédition de Madagascar. Dans Le Petit Provençal il avait, à maintes reprises, fustigé les lointaines expéditions coloniales, inutiles et coûteuses à son gré.
Cependant, Pierre Roux appartint quelques années à l’administration coloniale, puisqu’il dirigea le pénitencier de la Nouvelle-Calédonie (1882-1884). Il avait accepté ce poste au lendemain d’un retentissant échec aux élections législatives de 1881 dans la 1re circonscription de Marseille où contre l’élu radical Peytral, il avait obtenu au premier tour 283 voix (1,8 % des inscrits et 1 499 au ballottage (9,4 %). Il avait eu un autre antagoniste, Paul Durand, ouvrier boulanger, délégué au congrès de Marseille de 1879 qui vint en tête au premier tour, mais fut néanmoins battu. Aux élections législatives de 1893, Pierre Roux tenta ses chances, sans plus de succès, en Vaucluse. En 1898, il se présenta dans la 4e circonscription de Marseille contre le député sortant radical, J. Chevillon, et contre le candidat de la fédération socialiste, Julien. Il obtint 4 253 voix (21,2 % des inscrits) contre 4 634 (23,2 %) au député sortant qui le battit au second tour par 6 673 contre 5 990.
Bellot voit en Pierre Roux un homme politique nul et un écrivain inexistant. Son rôle local fut souligné lors de ses obsèques par le préfet des Bouches-du-Rhône, par Félix Gouin* et par Paul Masson, professeur à la Faculté des Lettres d’Aix, qui rappela combien Pierre Roux, comme président du comité de publication, avait facilité la réalisation de l’Encyclopédie des Bouches-du-Rhône.
Par Justinien Raymond
ŒUVRE : Pierre Roux collabora en 1871 à Marseille, à La Fraternité, à l’Égalité (plus tard Le Radical). Il fonda en 1872 La République du Travail. Il fut un des promoteurs de La Jeune République, devenue Le Petit Provençal, où il écrivait régulièrement des éditoriaux. Il collabora aussi au Travailleur des villes et des campagnes.
Hors de Marseille, il écrivit dans La Constitution, Les droits de l’Homme, journaux parisiens, dans Le Petit Dauphinois de Grenoble et dans La Petite Gironde.
SOURCES : Arch. Dép. Bouches-du-Rhône, M 2/ 111, 43, 52. — Ernest Castre, Le Conseil général des Bouches-du-Rhône, Marseille 1912, 343 p. (p. 333). — G. d’Oussouville, Historique du Conseil général et des Conseils d’arrondissement des Bouches-du-Rhône, Marseille, 1902, 544 p. (pp. 471 à 473). — Encyclopédie des Bouches-du-Rhône, t. XI. Biographies, pp. 480-481. — Étienne Bellot, Introduction à l’Histoire du socialisme à Marseille, Marseille, 1891, (pp. 122-123). Très sévère pour P. Roux. — Antoine Olivesi, « Les socialistes marseillais et le problème colonial », in Le Mouvement social n° 46, janvier-mars 1964, p. 27 à 65, passim.