SAUTIÈRE Jules, Marcel, Léon

Par Jean Maitron et Yves Le Maner

Né le 18 avril 1901 à Caudry (Nord) ; mort le 8 octobre 1948 à Paris (XVIIIe arr) ; ouvrier textile ; secrétaire du rayon communiste de Caudry ; combattant des Brigades internationales en Espagne.

Membre de la section socialiste de Caudry, le père de Jules Sautière était perceur de carton et sa mère était raccommodeuse à Caudry. Il fut légitimé par le mariage de ses parents le 3 juin 1901. A sa sortie de l’école primaire, Jules Sautière devint ouvrier perceur de carton, permettant l’impression des motifs des tissus, dans l’une des usines textiles de sa ville natale. Il adhéra au syndicat de sa corporation, affilié à la CGT, en 1920 et en devint vice-président au bout de quelques mois. Bien qu’il ait été membre du Parti communiste dès 1921, Sautière attendit 1925 pour quitter le syndicat confédéré ; il fonda le syndicat CGTU des perceurs de cartons de Caudry qui rassembla la majorité des adhérents de l’ancien syndicat et dont il assuma le secrétariat jusqu’à la réunification de 1935.

Membre du comité de l’Union locale unitaire aux côtés de son frère Lucien Sautière*, Jules Sautière dut limiter son action syndicale du fait du chômage qui sévit dans le textile dès 1930 et il se consacra à l’organisation des groupements communistes caudrésiens. Très discipliné, voire parfois sectaire, Sautière appliqua toujours à la lettre les consignes données par les directions, nationale ou régionale. Secrétaire de la cellule locale de Caudry, il fut chargé en 1925, avec l’aide d’Arthur Ramette*, de tenter une prise de contrôle, au profit du PC, de la puissante Union des coopérateurs de consommation du Cambrésis qui regroupait trente succursales et plusieurs milliers d’adhérents, et dont le siège était situé à Caudry. La résistance des militants socialistes et confédérés fit avorter ce projet.

En 1927, Jules Sautière fut nommé secrétaire du rayon communiste de Caudry et il assura également la direction du groupement homologue des JC en remplacement d’Adolphe Boittiaux*, appelé au service militaire. Ses nouvelles fonctions et son goût prononcé pour l’action spectaculaire l’amenèrent à plusieurs reprises devant les tribunaux. Membre de la société artistique « La Lyre rouge » de Caudry, il interpréta le rôle du soldat dans une pièce intitulée L’Apothéose, tirée du Monstre de Paul Vaillant-Couturier* jouée pour le 1er `Mai 1927. Or cette pièce, d’un fort contenu antimilitariste, fut représentée devant un parterre comprenant plusieurs conscrits, ce qui motiva un rapport de gendarmerie. Déféré au parquet de Douai pour « provocation de militaires à la désobéissance et au meurtre » et pour « atteinte à la sûreté de l’État », Jules Sautière bénéficia d’une habile plaidoirie de Maître Delvallée et fut acquitté. La même année, après une échauffourée survenue au cours d’une réunion contradictoire avec les socialistes caudrésiens, il fut inculpé pour « coups et blessures » et traduit devant le même tribunal de Douai qui lui infligea cette fois une forte amende de 1 700 F. Insolvable, Jules Sautière fut condamné, en application de la contrainte par corps, à quatre mois de prison en septembre 1928 et ne fut libéré qu’après quelques semaines et versement de la somme nécessaire par la cellule communiste de Caudry. En 1929, il quitta le Nord pour travailler à l’Humanité à Paris où il resta près de cinq ans.

Jules Sautière avait représenté sans succès le Parti communiste aux élections législatives de 1928 dans la 2e circonscription de Cambrai, sa candidature ayant été imposée directement par le comité central qui justifia cette décision par les poursuites judiciaires dont l’intéressé était alors l’objet ; les cellules locales et la Fédération du Nord lui avaient préféré Charles Capliez*, déjà candidat en 1924. Sautière fut également battu lors des consultations de 1928 et de 1934 organisées pour pourvoir au siège de conseiller d’arrondissement du canton de Clary.

Jules Sautière fut volontaire en Espagne républicaine le 30 novembre 1936 et appartint à la 1re compagnie du 13e bataillon de la 14e Brigade internationale avec grade de lieutenant. Deux fois blessé (à la tête en février 1937, à la jambe en mars 1938), il fut rapatrié le 28 juillet 1938. Militant du Parti communiste et de différentes organisations : CGT, Secours populaire, CDH, il fut également secrétaire de la section de l’AVER du XVIIIe arr. jusqu’à sa mobilisation en 1939 au 1er train automobile ; il fut démobilisé en août 1940.

Militant illégal, Jules Sautière partit en 1941, après l’arrestation de plusieurs de ses camarades, pour la région de Bordeaux et travailla en forêt jusqu’en août 1942. Il revint à Paris et s’embaucha chez un petit patron, peintre en bâtiment. Il fut alors requis, en mars 1943, pour travailler en Allemagne : il resta à Leipzig jusqu’au 11 novembre 1944. Il fut alors arrêté et envoyé aux travaux de fortifications à la frontière du Luxembourg près de Trèves. Au début de l’offensive américaine, il se cacha huit jours puis réussit à gagner les lignes alliées. Le 16 mars 1945, il rentrait à Paris.

Membre du comité fédéral de l’ARAC, Jules Sautière travailla dans cette organisation jusqu’à ce qu’il tombe malade le 19 octobre 1947 (lésion au cœur). Hospitalisé jusqu’en février 1948, il fit une rechute et mourut le 8 octobre. Il était marié (Caudry, 19 avril 1924) et père d’une fille née le 14 décembre 1930.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article130597, notice SAUTIÈRE Jules, Marcel, Léon par Jean Maitron et Yves Le Maner, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 29 décembre 2012.

Par Jean Maitron et Yves Le Maner

SOURCES : Arch. André Marty*, S1. — Arch. Dép. Nord, M 35/8, M 37/80, M 154/103 et M 154/191. — Alain Duchatelle, Biographie des militants ouvriers de l’arrondissement de Cambrai entre les deux guerres, Mémoire de Maîtrise, Lille III, 1973.

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