SENTÈS Guy, Robert, Étienne

Par Daniel Grason, Jean Maitron

Né le 3 avril 1912 à Loures Barousse (Hautes-Pyrénées), mort le 1er mars 1992 à Valdeblore (Alpes-Maritimes) ; pilote dans l’escadrille España ; volontaire en Espagne républicaine.

Fils de Victor, docteur en médecine et de Madeleine, née Colomiès, Guy Sentès suivit les écoles primaire supérieure et secondaire, de la classe 1932, il fit son service militaire à Toulouse (Haute-Garonne). Il partit en Espagne, arriva à la base des Brigades internationales à Albacete en novembre 1936, il rejoignit comme pilote l’escadrille España commandée par André Malraux, capitaine, il prit part aux combats de Teruel, Saragosse, Malaga, Madrid.

Son avion fut abattu le 11 janvier 1937, André Malraux raconta le drame dans L’Espoir, restitué par Jacques Delperrie de Bayac : « Au-dessus de Motril, le Potez-540 que pilotent Sembrano [Sentès], Julien Segnaire [Paul Nothomb], Attignies et le Hollandais Reyes est attaqué vers 10 heures par une quinzaine de chasseurs italiens. Une rafale cingle l’avant du bombardier. Deux balles explosives dans le dos, Reyes s’effondre sur le manche ; Sentès est touché à l’avant-bras droit ; le moteur droit s’arrête, le moteur gauche prend feu. Le mitrailleur de cuve Galloni, a une balle dans le mollet. Le mécanicien, Maurice Thomas, le remplace. Sentès pilote de la main gauche. Il d’efforce de garder de l’altitude. Heureusement, le Potez-540 a une grande surface portante, mais il perd de l’altitude et bientôt il faut choisir, pas question de regagner Tabernas : la mer ou la montagne.

Sentès choisit la mer. À vitesse réduite, l’avion plonge, ricoche à 300 mètres du rivage, capote au bord, dans un mètre d’eau. Ils sont six. Les valide sortent les blessés. Ils les portent sur la plage. Reyes a perdu connaissance. Galloni ne peut pas marcher. La route est là, tout près, avec son visage d’exode : hommes, femmes, enfants, bétail, voitures, charrette. Maurice Thomas, indemne, finit par mettre la main sur un cheval. Il le monte et part chercher du secours. Il revient une heure plus tard avec un médecin canadien et une voiture du service sanitaire. Les blessés sont transportés à l’hôpital d’Almeria. Reyes y mourra deux jours plus tard. Galloni, touché par la gangrène, sera amputé d’une jambe ».

Guy Sentès fut rapatrié en France. Il subit onze opérations, notamment à la clinique Martel dans le XVe arr., son bras droit demeura inutilisable. Le consulat espagnol à Paris lui versa une somme d’argent importante comme dédommagement. Le Comité d’aide à l’Espagne républicaine des établissements Marcel Bloch (Marcel Dassault) à Courbevoie (Seine, Hauts-de-Seine) lui vint en aide. Le responsable du Comité était Maurice Thomas, son mitrailleur en Espagne. Début 1939, Guy Sentès était embauché aux usines d’aviation Potez aux Mureaux (Seine-et-Oise, Yvelines). À la déclaration de guerre, il fut réformé en raison de sa blessure au centre de Toulouse. Il revint à Paris, habita l’hôtel Messidor, 330 rue de Vaugirard, XVe arr.

En septembre 1941, il travaillait aux établissements SOBAL, 10 Passage Dagorno, XXe arr. Il vivait avec Germaine Rivoire, une ex-responsable d’un comité d’entraide à l’Espagne républicaine, le couple demeurait 80 rue Taitbout IXe arr. Repéré par la police, leur domicile fut perquisitionné en leur absence le 29 septembre 1941. Madeleine Sentès, mère de Guy était présente, les policiers saisirent, une brochure intitulée « Quand même » de novembre 1940, une carte de l’Université ouvrière, une feuille concernant la manifestation du 1er mai 1938, seize coupures de l’Humanité, un autre logement où résidait auparavant Guy Sentès fut visité, les policiers notèrent : « Une carte du Secours rouge, une feuille imprimée en langue étrangère, des chants révolutionnaires », maigre butin

Auditionné par le commissaire principal du quartier Saint-Georges le 30 septembre, Madeleine Rivoire expliqua que l’appartement était prêté par un ami. Elle ignorait s’il était communiste, s’occupait d’aviation populaire, elle ne connaissait pas sa nouvelle adresse. Elle assura qu’elle ne fut jamais membre du parti communiste et ne se livrait à aucune activité ni propagande. Guy Sentès déclara que les documents saisis appartenaient au locataire précédent. Il ignorait s’il était communiste, les documents étaient en dépôt. Il affirma : « Je n’ai jamais appartenu au parti communiste et je n’ai jamais été sympathisant ». Quant à son séjour en Espagne, il expliqua avec aplomb qu’il était pilote civil pour le transport du courrier et que jamais il ne combattit. L’affaire n’eut pas de suite.
Guy Sentès se maria avec Germaine Froment, divorcée Rivoire le 23 mars 1946 à la mairie du IXe arr.

En 1976, il était membre de l’AVER, section Sud-Est. Il mourut le 1er mars 1992.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article130999, notice SENTÈS Guy, Robert, Étienne par Daniel Grason, Jean Maitron, version mise en ligne le 4 mars 2012, dernière modification le 24 juin 2019.

Par Daniel Grason, Jean Maitron

SOURCES : Arch. AVER. – Arch. PPo., 77W 85. – André Malraux, L’Espoir, Gallimard, 1937. – Jacques Delperrie de Bayac, Les Brigades internationales, Fayard, 1968. – État civil.

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