SPINETTA Cyrille [SPINETTA Cerelli dit Cyrille]

Par Claude Pennetier, Justinien Raymond

Né le 27 septembre 1879 à Ajaccio (Corse), mort le 6 avril 1943 à Paris (XXe arr.). Ingénieur ; secrétaire de la Fédération socialiste SFIO du Tarn ; conseiller prud’homme à Paris.

Cyrille Spinetta
Cyrille Spinetta

Fils d’un tailleur de pierre (dit aussi cavier), Cyrille Spinetta entra en 1895 à l’École normale des arts et métiers d’Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône). Après avoir été second maître mécanicien dans la marine nationale, il fut successivement ingénieur dans la construction électrique, mécanique, dans les mines de charbon, d’or, dans la traction et l’air comprimé. Socialiste et syndicaliste, il perdit plusieurs fois son emploi.

Spinetta fut appelé, en 1911, à la Verrerie ouvrière d’Albi (Tarn), créée en 1895, — il sera directeur en titre en 1912 — et qui, au début du siècle, connaissait des difficultés dues à un manque d’organisation et de discipline. Non sans rencontrer des résistances allant jusqu’à la grève, Spinetta imposa une direction technique éclairée, une nouvelle répartition des tâches et des rémunérations ainsi qu’une discipline. Quand la guerre survint, le redressement était en excellente voie.

L’ingénieur fit la Première Guerre mondiale comme maréchal des logis puis comme sous-lieutenant à l’inspection permanente des fabrications de guerre avant d’être envoyé au front, au 10e régiment d’artillerie à pied. Il fut mis en congé renouvelable à partir de mai 1917 et revint à la Verrerie. Ancien conseiller technique d’Albert Thomas, ministre de l’Armement, il prit l’initiative de proposer le nom de celui-ci pour succéder à Jaurès comme député du Tarn.

La Fédération socialiste du Tarn le présenta aux élections législatives du 16 novembre 1919, juste après le chef de file, Albert Thomas sur la liste des six candidats du Tarn. Il recueillit 18 996 voix sur 74 503 votants, Albert Thomas étant le seul élu socialiste, avec 20 200 voix. Cyrille Spinetta prit une part active aux débats qui animaient le Parti socialiste en 1920. Au congrès fédéral du 15 février 1920, il intervint en faveur du maintien à la IIe Internationale et présenta avec Albert Thomas une motion qui obtint 23 voix contre 10. Les militants du Tarn le déléguèrent comme suppléant au congrès national de Strasbourg (25-29 février 1920) où il fut présent en compagnie de Conté et Dhers. Malgré les bruyantes protestations de la gauche de l’assemblée, le militant tarnois proclama à la séance du 26 février : « Je suis patriote et pour la défense nationale par raison et par sentiment. » Puis, dans un long discours, il tenta de « prouver que la France n’est pas responsable » de la guerre et fit l’apologie de l’éducation des peuples pour « que la foule ne soit plus à la merci des meneurs qui excitent ses bas instincts ». Il proposa une motion engageant « les partisans de la IIe Internationale à ne pas donner leurs voix aux reconstructeurs pour faire échec aux partisans de la IIIe » (c.r. p. 153 et 177). Spinetta fut délégué au congrès national de Tours (décembre 1920) en compagnie du futur communiste Conté. Il intervint brièvement pour annoncer : « La Fédération socialiste du Tarn dans une discussion pleinement courtoise s’est prononcée comme il suit : six mandats à la motion Cachin*-Frossard*, un mandat à la motion Paul Faure-Longuet, dix mandats à la motion Blum. » Il avait déjà annoncé son intention de ne pas se plier à une décision d’adhésion à la IIIe Internationale dans un article du Midi socialiste intitulé : « À Moscou ? Jamais ! » (8 novembre 1920).

Spinetta succéda à Louis Fieu comme secrétaire de la Fédération socialiste SFIO du Tarn en février 1921. Mais dès le début de l’année 1923, la famille Spinetta s’installa à Saint-Étienne (Loire), où l’un des fils préparait le concours de l’École des Mines.

Démissionnaire de la direction de la Verrerie ouvrière en 1919 (mais très present jusqu’en 1922), Spinetta était depuis 1920 ingénieur-conseil de la Fédération des travailleurs du Verre et à ce titre suivit la Verrerie ouvrière jusqu’en 1924, année où le conflit entre les syndicats CGT et CGTU atteignit son paroxysme. Spinetta vécu dramatiquement cette période et alla jusqu’à faire du 11 au 21 juillet une grève de la faim pour se faire entendre.

Devenu militant socialiste de la XXe section de Paris en 1926, Spinetta fut souvent chargé des batailles électorales sans espoir. En 1932, aux élections législatives dans le VIIIe arr. de Paris, il obtint 435 voix (2,6 % des 16 525 inscrits) sur 13 260 votants, le candidat communiste Coquelin en obtenant 508. Aux élections municipales de 1935, dans le XXe arr. de Paris (2e circonscription de Charonne), il recueillit 642 voix sur 6 258 inscrits.

Par sympathie pour Marceau Pivert*, autant que par conviction, Spinetta et ses deux fils suivirent ce dernier au Parti socialiste ouvrier et paysan constitué après le congrès de Royan (1938). Les statuts du parti auraient été rédigés par son fils Dominique et lui-même. Il intervint au congrès national du PSOP à propos de la Franc-maçonnerie et proposa une formule de compromis, considérant que cette appartenance ne constituait en rien un obstacle au développement du parti révolutionnaire. Son texte obtint cinquante mandats qui, ajoutés aux 72 obtenus par Suzanne Nicolitch* , décida de l’acceptation de la double appartenance. Spinetta qui avait travaillé dans diverses entreprises parisienne, se consacrait depuis 1937 à ses fonctions de conseiller prud’homme (section électricité).

Selon J. Rabaut, Cyrille Spinetta, resté à Paris, serait intervenu avec succès auprès de Pierre Laval pour obtenir la commutation de la condamnation à mort d’Henri Barré* qui fut en effet grâcié le 24 octobre 1941. Spinetta mourut deux ans plus tard.

Ses deux fils étaient des socialistes actifs : l’un fit l’École des Mines, l’autre l’École des Ponts et Chaussées. Sa fille suivit les cours de l’école des Beaux-Arts de Saint-Étienne.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article131619, notice SPINETTA Cyrille [SPINETTA Cerelli dit Cyrille] par Claude Pennetier, Justinien Raymond, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 18 avril 2020.

Par Claude Pennetier, Justinien Raymond

Cyrille Spinetta
Cyrille Spinetta

SOURCES : Arch. Nat. F7/12992. — Le Cri des travailleurs, 1919-1921. — Le Midi socialiste, 1920. — Hubert-Rouger, Les Fédérations socialistes, t. III, op. cit., pp. 20 et 23 [Icon.]. — P. Brizon et E. Poisson, La Coopération, Paris, 1913. — J. Rabaut, Tout est possible, op. cit. — Marie-France Brive, Cyrille Spinetta et la Verrerie ouvrière d’Albi, L’OURS, n° 143, août-septembre 1983. — L’OURS, n° 140, avril 1983.

ICONOGRAPHIE : Hubert-Rouger, op. cit., p. 20.

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