THÉVENON Antoine

Par Jean-Michel Steiner

Né le 13 juillet 1893 à Montverdun (Loire), mort le 12 décembre 1955 au Chambon-Feugerolles (Loire) ; métallurgiste ; militant CGT & PCF ; conseiller municipal (1932-1935 & 1944 - 1953), maire (1944 - 1947) et conseiller général (1945 - 1949) du Chambon-Feugerolles ; membre du Comité fédéral de la Loire du PCF (1946 - 1948).

Antoine Thevenon était le fils de Jean-Claude, 37 ans, cultivateur, et de Catherine Gerin, 31 ans, ménagère, qui s’étaient mariés à Montverdun, le 20 janvier 1881. En 1891, la famille comptait 5 enfants : Eugénie (10 ans), Marie (7 ans), Claude (6 ans), Jean (4 ans) et Antonia (2 ans). Elle avait en plus accueilli en nourrice une petite fille : Marie Thiollière. Deux ans après naquit Antoine puis, en 1896, Étienne.

Le 20 octobre 1900, Eugénie épousa Georges Olivier cultivateur à Montverdun. Le 18 juin 1904, Mathilde épousa Benoît Gachet, emboutisseur, né au Chambon-Feugerolles. Peu de temps après ce double mariage, peut-être à l’incitation de leur gendre, les parents décidèrent de migrer vers la région stéphanoise avec les autres enfants. Lorsque le 9 février 1907, Claude se maria à Saint-Étienne, il était cordonnier et habitait dans le quartier de Saint-François. Jean-Claude Thevenon et Catherine Gérin s’étaient installés comme cultivateurs dans la partie restée rurale du Chambon-Feugerolles. Antoine fut embauché dans une usine de boulonnerie comme emboutisseur. La capitale de la lime et de la boulonnerie était à l’époque un foyer d’intense agitation sociale qui a dû marquer le jeune ouvrier. Lorsqu’il se maria, en 1913, son père était jardinier au service de l’entreprise Palle Bertrand et habitait avec son épouse dans le quartier Taillefer de la même commune.

Le 28 février 1913, Antoine Thevenon épousa au Chambon-Feugerolles Marie Tarride dont le père, Félix, était forgeur de limes et la mère, Jeanne Descour, venait de décéder (29 janvier). Antoine Thevenon dut ensuite remplir ses obligations militaires. Classé dans le service auxiliaire pour raison médicale et comme soutien de famille indispensable, il fut incorporé au 16° régiment d’infanterie de Montbrison le 15 août 1914, puis affecté spécial dans l’usine de la veuve Besson au Chambon-Feugerolles le 30 août 1915. Il termina la guerre au Chambon dans les usines travaillant pour l’armement.

En 1921, toujours emboutisseur, il était dans l’entreprise Giraud. En 1926, la famille comptait 2 filles : Félicie, née en 1915 et Juliette, en 1926, et un garçon, Claude né en 1921.

Sous l’impulsion de Benoît Frachon et Pétrus Faure (voir ces noms) le PCF se développait au Chambon. Antoine Thevenon adhéra probablement dans la seconde moitié des années 1920. En 1932, il était secrétaire de la cellule communiste (15 adhérents) et du sous rayon de la vallée de l’Ondaine composée de trois cellules (La Ricamarie, Le Chambon-Feugerolles, Firminy) avec 39 adhérents. En 1929, il fut élu au conseil municipal. Lorsque Pétrus Faure fut exclu du PCF, Thévenon devint son principal opposant au sein de l’assemblée municipale. En 1935, il ne fut pas réélu. Le 1er novembre 1938, la commission de réforme le déclara affecté spécial comme emboutisseur aux établissements Giraud & Brand du Chambon-Feugerolles.

Le 21 septembre 1944, le Comité de local de Libération installa au Chambon-Feugerolles un conseil municipal comprenant 5 membres du PCF, 5 de la CGT, 5 de l’Armée secrète, 5 des Équipes chrétiennes, 5 du Front national et deux “hors groupe”. Placé dans le groupe du Front National Thevenon fut élu maire à l’unanimité. Le 1er adjoint appartenant au PCF, le second à la CGT, la mouvance communiste dominait une assemblée municipale qui les jours suivants vota une série de vœux. Les uns répondaient aux attentes de son électorat – « un gros effort pour l’amélioration du ravitaillement en pommes de terre et surtout en matières grasses, pour le versement aux ménages d’une ration de vin substantielle, pour accorder une indemnité aux membres des milices patriotiques » - les autres avaient un caractère plus politique – « pour l’épuration de la police, pour le retour immédiat de Maurice Thorez, pour le retrait de la dignité de Maréchal à Ph. Pétain ». Le 24 septembre, le vœu demandant que les « membres de l’Assemblée nationale de juin 1940 qui ont accordé les pleins pouvoirs au Maréchal Pétain, comme aussi ceux qui se sont abstenus, soient privés, leur vie durant, de l’exercice de tout mandat électif » visa directement Pétrus Faure. Les tensions que provoquèrent ces initiatives contraignirent le Comité départemental de Libération à procéder, le 9 novembre 1944, à une nouvelle installation solennelle du conseil municipal, devant lequel le délégué du CDL rappela que « tous les mouvements de Résistance sont représentés en son sein [pour] pour réaliser le programme en conservant cette union qui a fait notre force devant l’ennemi et l’usurpateur ».

Lors du scrutin municipal d’avril mai 1945, Thevenon recueillit 3 015 voix à la tête de la liste d’Union patriotique et républicaine et devança la liste de défense républicaine et socialiste dans laquelle figurait l’ancien maire (2 857 voix pour 8 232 inscrits et 5 924 suffrages exprimés). Le 23 mai, il retrouva son fauteuil de maire. En septembre, il retourna devant les électeurs pour le scrutin cantonal. Arrivé en tête du premier tour avec 6 462 voix (pour 19 930 inscrits et 14 893 suffrages exprimés), Thevenon l’emporta au second (8 729 voix pour 15 035 suffrages exprimés) contre Garde, candidat du MRP, mais en passant de 4 149 à 5 919 voix ce dernier avait bénéficié du report d’une bonne partie des électeurs du candidat socialiste Moulin.

Après le scrutin du 13 mai 1945, le conseil municipal du Chambon ne cessa d’être agité de conflits entre les élus communistes et la minorité socialiste et démocrate chrétienne. Le 13 septembre 1947, après 4 démissions et en présence de 14 élus sur 23, Antoine Thevenon fit voter un nouveau vœu demandant « contre la politique d’imprévoyance pratiquée par le Gouvernement concernant le problème du pain, puisque nos alliés Américains n’ont que du maïs à mettre à notre disposition, que l’on se tourne vers nos alliés de l’Est qui peuvent combler notre déficit en céréales, en bon blé, ce qui aurait pour conséquence l’amélioration de notre pain et l’augmentation de nos rations ».

S‘il fut réélu en octobre 1947, Thevenon se retrouva dans la minorité et dut laisser la place de premier magistrat au maire SFIO d’avant-guerre, Pétrus Faure, crédité de 16 voix (contre 9 et 2 votes nuls). Le 15 septembre 1948, le conseil décida par 14 voix contre 8 « de ne pas discuter 2 vœux à caractère politique présentés par la fraction communiste ».

Vers la fin des années 1940, Antoine Thévenon perdit la confiance du Parti. Présent au conseil jusqu’à la fin de son mandat, il ne fut pas placé sur la liste présentée par le PCF en avril 1953. Élu au Comité fédéral en avril 1946, réélu en 1947 et 1948, il n’y figurait plus au début des années 1950. Il semble que la direction lui reprochait son manque de combativité dans l’assemblée départementale, son échec aux municipales de 1947 et sa réticence à défendre Théo Vial Massat (voir ce nom) au moment de la grande grève des mineurs de 1948.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article132378, notice THÉVENON Antoine par Jean-Michel Steiner, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 8 décembre 2020.

Par Jean-Michel Steiner

SOURCES : Arch. Nat. F7/13129. — Renseignements communiqués par Guy Thévenon. - Arch Dép. Loire - 3 E 151_9, État-civil de Montverdun. Naissances (1881 -1898) - 6 M 131 & 6 M 132, recensements Montverdun, 1886 & 1891 - 1 R 1647, n° 670, registre de matricule de l’arrondissement de Montbrison (1913) - 6 M 515, recensement du Chambon-Feugerolles, 1921 - La Dépêche démocratique : 30 avril & 1er mai 1945 ; 24 septembre & 1er octobre 1945 ; 20 octobre 1947.
Arch. Mun. Chambon-Feugerolles : Registres des délibérations du Conseil municipal 1922-1955.
Bibliographie : Monique Luirard, La Région stéphanoise dans la guerre et dans la paix (1936-1951), CEF/CIERSR, 1980 - Pétrus Faure, Le Chambon rouge. Histoire des organisations ouvrières et des grèves au Chambon-Feugerolles, Le Chambon-Feugerolles, Édition du Syndicat unitaire des métaux, 1929 - (id), Histoire du mouvement ouvrier dans le département de la Loire, Saint-Étienne, Dumas, 1956 - Jean-Paul Martin, Le syndicalisme révolutionnaire chez les métallurgistes de l’Ondaine (1906-1914). Aperçu sur un type de comportement ouvrier, mémoire de maîtrise d’histoire, dir. Jean-Marie Mayeur, Université de Saint-Étienne, 1971 - Jean-Michel Steiner, Le PCF dans la vie stéphanoise (1944-1958). Communisme et anticommunisme dans une grande ville ouvrière sous la IV° République. Thèse, St-Étienne, 2005 - (id), Métallos, mineurs, manuchards… Ouvriers et communistes à Saint-Etienne (1944-1958), PUSE, 2014.

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