THIBAULT Louis

Par René Lemarquis

Né le 25 août 1874 à Paris (XXe arr.) ; employé de commerce ; dirigeant syndicaliste et socialiste de l’Aube ; gérant de l’Aube ouvrière.

Porteur de pain à Romilly-sur-Seine (Aube), Louis Thibault était, en 1911, administrateur de la Bourse du Travail de cette ville fondée en avril 1907 et adhérente de la CGT. Il était dit socialiste très militant.

Louis Thibault collabora dès le premier numéro d’après-guerre à La Défense des travailleurs (1er mars 1919), avec une étude intitulée « La Jeunesse et les sports ». Au nom de la commission de réorganisation du syndicat des employés, il lança un appel à ceux de sa corporation et prit la parole au nom de ce syndicat le 1er mai 1919. En août, il devint secrétaire de l’Union des syndicats ouvriers de l’Aube (CGT) et, en décembre, fit son entrée au conseil municipal de Troyes sur la liste du Parti socialiste de Clévy dont il devint le deuxième adjoint. Voir Georges Hant*

Louis Thibault présenta le rapport d’activité au congrès de l’UD-CGT le 25 avril 1920, se réjouissant de la montée du nombre des syndiqués qui passait de 10 à 12 000 en août 1919, à 20 226 au moment du congrès. En mai, il appela à la collecte de fonds pour soutenir les grandes grèves et fut délégué cette année-là au congrès confédéral d’Orléans. A Troyes, il fut secrétaire en novembre du comité d’action pour un quotidien et fit partie du premier conseil d’administration de l’imprimerie « L’Émancipatrice ».

Louis Thibault joua un rôle actif dans l’organisation et les négociations de la grève du Textile troyen de février 1921 mais, d’avril à décembre, il entra violemment en conflit avec les Comités syndicalistes révolutionnaires. Vivement critiqué au congrès départemental du 8 mai par les membres des CSR (surtout Ernest Marty*, Joseph Jacob* et Eugène Schneider*), il fut défendu par Désiré Caïti*, Émile Mahu* et Louis Bouiller* et évinça alors ses adversaires du nouveau bureau de l’Union.

Malgré quelques essais de conciliation, on s’achemina vers la rupture. Louis Thibault se livra à des attaques personnelles contre René Plard*, affirmant avoir été l’objet de sévices de la part des CSR et, dès mai 1921, commença à collaborer au journal radical Le Petit Troyen. Les discussions s’aggravèrent lors de la grève générale du Textile de septembre-novembre qui éclata à la suite d’une diminution des salaires. Les unitaires, avec Jacob, l’emportant dans le Textile, Louis Thibault soutint, insuffisamment selon eux, le mouvement et se révéla incapable de constituer un comité central de grève. Dès le 11 septembre, il fit voter par l’UD l’exclusion des adhérents du CSR et le retrait des délégués syndicaux du CA de la Dépêche de l’Aube et de « L’Émancipatrice ». La rupture consommée après la constitution de la CGTU, Thibault devint en 1922 secrétaire de l’Union régionale Aube-Yonne des syndicats confédérés et le demeura en 1923-1924.

Adhérent à la SFIO, reconstituée dans l’Aube par Douet, Louis Thibault fut réélu en mai 1925 conseiller municipal socialiste de Troyes sur la liste du Cartel des gauches. Attaqué alors durement par le PC et la CGTU, il eut à subir aussi les critiques de la CGT de Romilly qui lui reprocha en mai 1925 d’avoir, comme conseiller municipal, accepté de siéger aux côtés d’un gros patron troyen et voté le renvoi d’employés municipaux grévistes. Il lui arriva cependant de participer en 1926 à quelques actions communes avec la CGTU, en particulier le 1er Mai. Thibault fut élu au conseil de prud’hommes dans le secteur employés de commerce la même année.

Louis Thibault se présenta le 4 décembre 1927 à une élection cantonale à Méry-sur-Seine et obtint 128 voix contre 409 à Oudin du PC. En avril 1928, candidat socialiste aux élections législatives, il fut devancé par Philbois (3 300 voix contre 866) et se désista pour lui. Il fut également battu aux élections municipales de 1929 après le retrait des radicaux du Cartel. De 1929 à 1934, il se consacra à ses tâches syndicales. Tout en assurant le secrétariat du syndicat des employés et de l’UL-CGT de Troyes, Louis Thibault fut gérant de L’Aube ouvrière et se spécialisa dans les questions juridiques : il publia par exemple en 1931 une série d’articles sur la juridiction prud’homale. Il figurait par ailleurs au bureau de l’Union des locataires qui résultait d’une scission du syndicat des locataires proche des communistes. En novembre 1932, aux élections prudhomales, il se heurta à la double opposition d’Émile Brouillard* (CGTU) et de Lehmann* (CFTC) et ce dernier l’emporta. En 1933, il donna quelques articles au Rappel de René Plard.

En février 1934, Louis Thibault représenta la CGT aux manifestations antifascistes. Il devait encore être candidat socialiste aux élections cantonales d’octobre 1934 dans le 3e canton de Troyes où il devait obtenir 938 voix et se désister pour le « plardiste » Lesage. Il était l’un des représentants de la SFIO sur la liste antifasciste présentée par Plard aux élections municipales de mai 1935. Élu conseiller, il devint quatrième adjoint au maire. Lors de la réunification syndicale, il présida l’assemblée générale commune des deux UL de Troyes, et au congrès d’unification de décembre il devint conseiller juridique de la nouvelle UD et le resta jusqu’en 1940. Il était également rédacteur en chef de L’Aube ouvrière, secrétaire administratif de l’UL-CGT de Troyes et représentait les syndicats au conseil d’administration des Assurances sociales. En novembre 1935 et novembre 1938, il avait échoué devant le candidat des syndicats chrétiens aux élections prudhomales.

Après la mobilisation de Genevois, en septembre 1939, Louis Thibault prit en main l’UL-CGT, déclara illégal le bureau intérimaire du Textile formé par les ex-unitaires et condamna les syndicalistes fidèles au PC. Pendant l’Occupation, il fut désigné adjoint au maire d’office le 18 juillet 1940 mais entra au groupe « Libération » formé par Germain Rincent*. En 1944, il lança avec Marcel Huot*, en tant que secrétaire du bureau provisoire de l’UL-CGT, un appel à la reconstitution du syndicat. Il fut remplacé dans sa fonction par Maurice Toussaint* en décembre. Il continua par la suite à tenir une chronique syndicale dans l’hebdomadaire de la SFIO. Il fut élu en juillet 1945 vice-président de la Fédération ouvrière et paysanne des anciens combattants.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article132405, notice THIBAULT Louis par René Lemarquis, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 18 janvier 2016.

Par René Lemarquis

SOURCES : Arch. Nat. F7/13 567. — La CGT et le mouvement syndical en Francel, Paris, CGT, 1925, p. 471. — La Défense des travailleurs et Le Travailleur, mars 1919, décembre 1920, novembre 1924. — L’Aube nouvelle, 1923. — La Dépêche de l’Aube, 1920-1938. — Le Petit Troyen, 1921-1940. — L’Aube ouvrière, 1930-1939. — L’Aube libre, 1944. — Le Réveil de l’Aube, 1945.

ICONOGRAPHIE : Thibault, ancien secrétaire de l’UD de l’Aube (La CGT..., op. cit.).

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