VALLIER Gabriel, Léon, Cyprien. Pseudonyme : BRUNET

Par Maurice Moissonnier

Né le 21 mars 1901 à Labégude (Ardèche), mort le 5 septembre 1988 à La Garde (Var) ; secrétaire de la 17e Entente des Jeunesses communistes (région lyonnaise) ; secrétaire du syndicat unitaire des Métaux de Lyon (1930-1932) ; membre du bureau régional et du comité fédéral du PC, rédacteur en chef de la Voix du peuple ; secrétaire de l’UD-CGT clandestine de la Drôme sous l’Occupation.

Gabriel Vallier était issu d’un milieu très modeste. Son père, puiseur d’eau minérale, termina sa vie professionnelle comme facteur des PTT, sa mère était ouvrière en soieries avant de se marier. Après sa première communion, l’enfant cessa d’aller à l’église ; son père ignorait délibérément le catholicisme de sa propre enfance et, sans appartenir à un parti politique, se passionnait pour les « hommes de gauche » en faveur de qui il militait à chaque élection.

A peine ses études primaires terminées, le jeune Vallier, à douze ans et demi, travailla dans un moulinage de Labégude et, en 1916, parvint à se faire embaucher dans une filature de la Viscose à Vals-les-Bains où il travaillait, à quinze ans, douze heures, une semaine de jour et une semaine de nuit. En 1917, son père, réformé à la suite d’une blessure vint aussi travailler à l’usine de la Viscose.

La Première Guerre mondiale finie, Gabriel Vallier, alors âgé de dix-huit ans et demi, put entrer en apprentissage chez un serrurier à Saint-Privat (Ardèche). Il retourna ensuite à la filature de la Viscose en attendant son départ à l’armée. Il demanda à servir dans la Marine afin de pouvoir bénéficier de la solde que percevaient exceptionnellement les marins. Appelé le 20 avril 1921, il fit ses classes au 5e dépôt des équipages à Toulon, et fut ensuite désigné pour être affecté à la base maritime de Dakar. Matelot mécanicien de 2e classe, il s’efforça de suivre les cours de quartier-maître, mais, à la veille des examens, frappé d’une crise de paludisme, il fut rapatrié à Rochefort au 4e dépôt des équipages de la flotte, vers le 10 décembre 1921. On l’affecta jusqu’à sa libération, le 30 avril 1923, au centre d’aéronautique. Lors de son séjour à Rochefort, il fit la connaissance de Badina, l’un des mutins de la mer Noire qui sortait de prison. Ce n’est pas auprès de lui que Vallier cultiva son esprit révolutionnaire mais dans la fréquentation de Jules Trémel*, de Saint-Denis, surnommé « Cachin » en raison de sa fougue de propagandiste en faveur de la Révolution russe et du PC.

Après son service militaire, Gabriel Vallier s’installa à Lyon (Rhône) où il s’embaucha chez Berliet, à Vénissieux, en qualité d’ajusteur outilleur à l’atelier « outillage VL », le 11 mai 1923. Pendant une courte période, il avait appartenu à une section CGT à la filature de Vals-les-Bains, vite démantelée par la direction. Avec son frère, qui travaillait aussi chez Berliet, il se syndiqua à la CGTU dont l’Union départementale était alors dirigée par Henri Raitzon*. Il lisait déjà régulièrement l’Humanité lorsque, le 5 août 1923, à l’issue d’un meeting tenu par Jacques Doriot* dans le stade de Villeurbanne, il adhéra en même temps que son frère, aux Jeunesses communistes. Aidé par Ambroise Croizat* qui l’avait pris en sympathie, il s’initia rapidement à l’action politique. Peu après, il entra au comité exécutif de la 17e Entente des JC où il fut plus spécialement chargé du travail antimilitariste et de l’animation de la section des Jeunesses du quartier des Brotteaux.

Au moment de la scission de la CGTU qui suivit le congrès de Bourges, il contribua à la reconstitution du syndicat unitaire des Métaux dont, à Lyon, les anarchistes, maîtres du terrain dans l’ancienne CGT, avaient chassé les communistes. En septembre 1924, à l’issue d’une école nationale organisée pour ses militants à Saint-Denis par la Fédération des JC, Gabriel Vallier, qui avait suivi les cours donnés par Alfred Kurella* fut élu secrétaire régional de la JC. Il avait d’autre part donné, en janvier 1924, son adhésion au PC et contribué à fonder chez Berliet la première cellule d’entreprise du Rhône. La direction de Berliet, très répressive, l’avait remarqué et cherchait dès ce moment à le licencier. Pour se rendre à l’école de Saint-Denis, Gabriel Vallier s’était fait délivrer par un médecin de la Mutuelle un certificat de complaisance qui lui donnait droit à trois semaines de repos mais, en son absence, la feuille locale du parti, imprimée à Nîmes et encartée dans l’Humanité publia l’annonce d’une réunion des JC d’Oullins avec la présence d’un « camarade Vallier » qui n’était autre que le frère de Gabriel. Persuadé qu’il s’agissait de lui, le directeur du personnel le congédia à son retour. Il éprouva beaucoup de difficultés à retrouver un emploi à l’usine Seguin, et, jouant de malchance, à la fin de décembre 1924, au retour du congrès national des JC, fut immobilisé par un déraillement près de Dijon et, une nouvelle fois, une absence non autorisée justifia un licenciement. Pour rendre plus difficile son identification par les officines patronales, Gabriel Vallier se fit appeler Brunet.

Responsable régional des JC, il assistait désormais aux réunions du bureau fédéral du PC. De nouveau chômeur en 1927, il fut contraint de retourner chez ses parents à Vals-les-Bains où il travailla jusqu’en août 1928 avant de retrouver de l’embauche à Lyon. Il continua à militer au Parti communiste et au syndicat unitaire des Métaux de telle sorte qu’en 1930, il fut appelé au secrétariat de cette organisation pour y remplacer Edmond Chambon* désigné pour seconder à l’UD Claude Cellier*. Vallier-Brunet n’occupa ce poste que dix-huit mois car la CGTU, affaiblie, supprima sa fonction et, alors qu’il était marié depuis septembre 1929, il se retrouva une fois de plus au chômage. Après avoir animé un comité de "sans-travail", il parvint à se faire embaucher sur le chantier de construction de l’hôpital de Grange-Blanche à Lyon jusqu’au moment où, après le départ de Jean Michon* à l’école de l’IC à Moscou, il assura son remplacement en 1932 à la direction de La Voix du peuple, hebdomadaire régional du Parti.

Gabriel Vallier conserva cette fonction jusqu’en 1939 lorsque Marcel Métral* prit sa succession. Il fut l’un des signataires avec Georges Lévy* et Julien Airoldi* de l’accord fédéral PC-SFIO. Jusqu’à la conférence régionale des 6 et 7 février 1937, il resta au bureau régional du PC et, au-delà de cette date, figura seulement au comité régional. Il figura aux élections municipales de mai 1935 en deuxième position sur la liste du Bloc ouvrier et paysan du IIIe arrondissement de Lyon et se désista en application des accords conclus. Antérieurement, il avait été candidat à des élections cantonales dans le canton de Virieu-le-Grand (Ain).

Gabriel Vallier fut candidat aux élections législatives dans la 4e circonscription de Lyon en 1932 où il obtint 689 voix au premier tour et 579 au second sur 9 120 inscrits. En 1936, il rassembla 1 359 voix au premier tour (9 861 inscrits) puis se désista pour le radical socialiste Rolland, arrivé en tête des candidats du Front populaire, tandis que le socialiste André Philip* qui s’était maintenu parvint à être élu.

Au cours du printemps 1939, Vallier-Brunet laissa ses fonctions à Marcel Métral et s’embaucha à l’usine Robert-Esnaud-Pelleterie (REP) où travaillaient beaucoup de communistes.

Au moment de la mobilisation il fut appelé à Toulon où on l’affecta à la réparation des sous-marins. Un de ses anciens officiers de Rochefort le fit alors réaffecter à la fin octobre 1939 à l’usine REP qui travaillait pour la Marine. Gabriel Vallier revint à Lyon au moment où la police venait d’effectuer une grande rafle dans les milieux communistes. Au début de 1940, à la suite d’actions revendicatives menées dans l’usine, il fut licencié de l’usine REP, ce qui posait de graves problèmes étant donnée sa position d’affecté spécial. Il trouva un nouvel emploi d’attente avant d’être renvoyé au dépôt d’artillerie lourde de Nîmes. Son régiment fut tardivement engagé dans la région parisienne avant de se replier sur Sarlat où il fut démobilisé au début de juillet 1940.

Après quelques emplois temporaires, Gabriel Vallier avait retrouvé un travail à l’ancien Arsenal d’Irigny lorsqu’il fut arrêté, à la veille de la Toussaint 1940, comme beaucoup d’autres communistes lyonnais, en représailles de l’action que le PC avait menée contre la venue du maréchal Pétain dans la capitale rhodanienne. Après quelques jours passés dans les locaux de la police judiciaire du quartier Saint-Jean, il fut relâché avec un petit groupe de détenus. Instruit par l’expérience, il chercha alors à se faire embaucher et se rendit chez une tante, à Valence (Drôme) où il trouva un emploi aux Cartonnages Maurice Blanc. Une ouverture d’instruction pour activité subversive en tant qu’affecté spécial à l’usine REP, fondée sur une dénonciation, se termina par un non-lieu. Après cette nouvelle alerte, Vallier-Brunet s’installa avec sa femme à Bourg-lès-Valence et entra comme fraiseur à l’usine Toussaint. Dans cette entreprise, en accord avec un militant stéphanois nommé Planel qui recherchait lui aussi un refuge à Valence, il prit en main le syndicat légal. Planel en fut le secrétaire et Vallier le trésorier. En dépit de l’opposition du patron et grâce au soutien de l’ensemble du personnel, Vallier-Brunet parvint à se faire élire en tête de liste au comité social de l’usine et la section syndicale conduisit avec hardiesse des luttes revendicatives, organisant même un débrayage de solidarité, en 1943, pour protester contre l’assassinat du fils d’un travailleur de l’atelier par les forces de répression. Cette efficacité sur le terrain, son passé militant, conduisirent les responsables des syndicats clandestins à lui confier le secrétariat départemental de l’Union clandestine des syndicats de la Drôme.

A la fin du printemps 1944, Gabriel Vallier fut envoyé à Nîmes pour prendre la direction de l’UD illégale du Gard mais, à peine arrivé, le 16 juin 1944, la Milice l’arrêta à la sortie d’un cinéma, avec Marie Gavand et une autre jeune femme qui faisaient partie de l’organisation clandestine. Conduit à la Gestapo puis ramené au siège de la Milice, il subit plusieurs interrogatoires renforcés et resta au régime cellulaire jusqu’au 18 août 1944, où, devant la progression des armées alliées, les miliciens, en s’enfuyant, libérèrent leurs prisonniers.

Gabriel Vallier rentra à Valence au moment de la libération de la ville et fut nommé membre du comité de Libération avec Marius Moutet*, Pierre Emmanuel, etc. Il participa au congrès des CDL à Avignon et ne reprit ses activités à Lyon qu’à la fin novembre 1944. Réélu au comité fédéral du PC, il siégea jusqu’en 1949. D’abord chargé du secrétariat général de la Voix du peuple, devenue quotidienne, il devint rédacteur en chef après le départ d’Auguste Hugonnier* qui venait d’être élu à l’Assemblée constituante.

Au début de 1949, malade, Gabriel Vallier quitta cette charge et fut remplacé par David Grünblatt*. Il entra alors à la Sécurité sociale et réussit l’examen de contrôleur de la sécurité du Travail mais le ministre, en raison de la présence, sur son casier judiciaire, d’une condamnation due à l’article d’un journaliste de La Voix du peuple, refusa son agrément. Jusqu’à sa retraite, à soixante ans, il remplit donc les fonctions de contrôleur, sans en toucher le traitement et fut maintenu à un salaire très inférieur. Il anima le syndicat CGT des employés de la Sécurité sociale et fut à Lyon le trésorier du comité d’entreprise.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article133548, notice VALLIER Gabriel, Léon, Cyprien. Pseudonyme : BRUNET par Maurice Moissonnier, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 30 novembre 2010.

Par Maurice Moissonnier

SOURCES : Arch. Nat. F7/13127. — La Voix du peuple, 1935-1939 (en particulier numéros des 29 février 1936 et 19 février 1937). — Témoignage du militant.

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