VEYREN Flavien, Louis, Antoine

Par Antoine Olivesi

Né le 11 avril 1877 à Bédarrides (Vaucluse), mort le 11 avril 1966 à Marseille (Bouches-du-Rhône) ; employé ; militant socialiste, secrétaire fédéral du Parti communiste (1920-1923), puis socialiste-communiste ; préfet des Bouches-du-Rhône après la Libération, puis conseiller municipal de Marseille.

Flavien Veyren (1921)
Flavien Veyren (1921)
cc Agence Meurisse

Fils d’un moulinier en soie, Flavien Veyren fut, avant la Première Guerre mondiale, séminariste puis vicaire à La Ciotat. Préoccupé par la question sociale, il quitta l’Église après la condamnation du modernisme et adhéra à la Jeune République. Puis il évolua vers le socialisme et devint membre du Parti socialiste SFIO. En 1910, il entra comme employé au bureau de bienfaisance de Marseille, dans l’administration de l’Assistance publique. Il en gravit peu à peu les échelons. En 1917, il était contrôleur principal et il termina, beaucoup plus tard, sa carrière comme directeur du même bureau. Il s’était marié le 23 juillet 1907, pour la première fois.

Pendant la Première Guerre mondiale, Flavien Veyren se rangea parmi les minoritaires du Parti socialiste SFIO. Pacifiste, il participa à plusieurs réunions et se prononça pour l’envoi d’une délégation pour la conférence internationale prévue à Stockholm. Dans le cadre de ses fonctions à la mairie, il intervint en faveur des plus déshérités et créa une coopérative de consommation des employés d’administration en 1917. Au cours de cette période, Veyren exerça beaucoup d’influence sur les membres des Jeunesses socialistes, comme Gabriel Péri* en particulier en 1917-1918 où les JS commencèrent à s’organiser à Marseille. Il assista notamment avec Péri, au début d’août 1918, à une réunion publique autorisée, commémorant l’anniversaire de la mort de Jaurès. Le 8 décembre, à la Bourse du Travail, il se déclara pour le collectivisme et affirma : « La guerre a un seul vainqueur, Lénine. »

A la fin du conflit, Flavien Veyren fit partie de ceux qui, malgré l’opposition de la majorité des élus locaux, s’appuyèrent sur de nombreux militants de la base et les JS pour réclamer l’adhésion à la IIIe Internationale. Membre du comité de vigilance SFIO en 1919, il fut délégué au congrès national de Strasbourg où il prit la parole le 25 février 1920 en déclarant que cette adhésion était la suite logique de Zimmerwald et de Kienthal. De même, au congrès fédéral de Salon, en décembre, une forte majorité se prononça dans ce sens et Veyren fut délégué au congrès de Tours. Il séjourna dans cette ville avec son épouse et sa fille (selon un rapport des Arch. Dép. d’Indre-et-Loire) et intervint le 25 au congrès pour faire état des progrès rapides effectués à Marseille, entre février et décembre 1920, par le courant favorable à l’adhésion, malgré l’hostilité des « détenteurs de mandats et des aspirants élus ». Veyren dénonça « leur dictature occulte et humiliante pesant sur les militants » et leurs préoccupations électoralistes. Il eut effectivement à combattre l’influence de Fernand Bouisson* qui était grande, mais qui ne put éviter l’éclatement de la fédération. Et ce fut Flavien Veyren qui devint le premier secrétaire de la Fédération communiste des Bouches-du-Rhône. Dès le 4 janvier 1921, il fut désigné par le comité directeur, sur le plan national, comme délégué permanent à la propagande et il effectua une tournée en Afrique du Nord.

Il participa aux côtés des anarchistes à la première mobilisation marseillaise en faveur de Sacco et Vanzetti lors d’une réunion à la Bourse du travail, le 9 octobre 1921 (Archives départementales des Bouches-du-Rhône, 1 M 858 : Rapport du commissaire spécial au ministre de l’Intérieur, 9 octobre 1921).

Lors du premier congrès du Parti communiste qui se tint à Marseille en décembre, Flavien Veyren prononça le discours inaugural et fut élu membre suppléant au comité directeur. Pendant deux ans, il déploya beaucoup d’activité, notamment au printemps 1922, lors de la campagne pour les élections cantonales. Le 1er mai 1922, il participa au meeting de la CGTU et approuva le syndicalisme révolutionnaire ainsi qu’un ordre du jour préconisant l’insurrection plutôt que la guerre. Mais dans l’ensemble Flavien Veyren fit preuve d’une certaine modération. Anticlérical mais non sectaire, son antimilitarisme n’alla pas jusqu’à entreprendre des actions qu’il jugeait inopportunes et dangereuses pour le Parti communiste. Ainsi, à la fin d’avril 1922, il fit prévaloir son point de vue en interdisant toute manifestation contre la venue du général Mangin à Marseille, recommanda aux militants d’éviter tout incident et conclut que le communisme progresserait davantage par la propagande et par l’exemple que par la violence.

En juillet, Flavien Veyren participa à un meeting contre l’impôt sur les salaires, et d’août à décembre, à Marseille et à Aix, à la campagne pour l’amnistie intégrale dont il était membre du comité d’action. Des anarchistes, tels Moisson et Marestan se joignirent à ces manifestations.

Au début de l’année 1923, Flavien Veyren qui était membre de la Loge du Grand Orient de Marseille, fut concerné par la décision de Moscou relative aux francs-maçons. Le 7 janvier, le congrès fédéral de Gardanne posa le problème pour les communistes des Bouches-du-Rhône. Flavien Veyren démissionna de la Loge maçonnique mais n’en fut pas moins écarté des postes de responsabilité. Peu après, en raison de la crise interne qui affecta la Fédération communiste, il quitta le PC lors de la scission qui provoqua la création d’une Fédération communiste autonome. De cette dernière allait naître l’Union socialiste-communiste dont Flavien Veyren fut un moment, aux côtés de Simon Sabiani*, l’un des dirigeants. En 1924, pour les élections législatives, il présida la commission exécutive du Comité d’union socialiste qui soutint la liste Torrès-Sabiani-Maurel et il participa encore à la campagne pour les élections municipales de 1925, mais il ne sollicita lui-même aucun mandat et cessa peu après toute activité politique. Nous ignorons s’il revint avant la Seconde Guerre au Parti socialiste SFIO. Il semble en revanche, qu’il ait réintégré la FM.

Lorsque la guerre éclata, Flavien Veyren joua un rôle important dans les cadres de la Résistance, ce qui lui valut d’être désigné, fin août 1944, par le CDL des Bouches-du-Rhône comme préfet de ce département (date exacte : Le Provençal daté du 31 août le présente comme ayant déjà pris sa fonction, donc entre le 25 et le 30, selon Alain Giacomi). Il exerça cette fonction dans des conditions difficiles, mais avec fermeté et humanité à la fois, jusqu’au 21 janvier 1946. Dans une conjoncture plutôt passionnelle, Flavien Veyren a laissé le souvenir d’un homme généreux, d’un conciliateur, d’un modérateur à qui l’on dut le retour progressif à une administration normale et l’élimination des abus. Tous les témoignages, quelles que soient leurs origines politiques, s’accordent à ce sujet. Nous ne citerons ici que celui de Roger Reinier* : « Veyren pleurait en me montrant les dossiers qu’il devait faire instruire aux cours de justice, (pour l’épuration) alors que presque tous ne comportaient que des lettres anonymes. »

Flavien Veyren fut nommé, par la suite, préfet honoraire. En octobre 1947, il se présenta sur la liste socialiste SFIO aux élections municipales et fut élu. Il siégea dans l’opposition jusqu’en 1953. Agé alors de soixante-seize ans, il ne se représenta pas.

Flavien Veyren continua de résider à Marseille puis, en 1966, se fit admettre dans une maison de repos à Aubagne. Mais c’est à son domicile marseillais qu’il mourut. Son corps fut transporté et inhumé dans l’Ardèche.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article134297, notice VEYREN Flavien, Louis, Antoine par Antoine Olivesi, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 6 novembre 2022.

Par Antoine Olivesi

Flavien Veyren (1921)
Flavien Veyren (1921)
cc Agence Meurisse

SOURCES : Arch. Nat. F7/12992. — Arch. Dép. Bouches-du-Rhône, IIM3/55, IIIM/48, M6/3851, 8340, 10801, 10803, 10830 ; XIVM 24/Go. — Arch. Com. de Marseille. — BMP, Mfm n° 13. — Le Petit Provençal, 1917-1922. — Le Petit Marseillais, 28-31 décembre 1921. — Bulletin communiste, 5 janvier 1922, 4 janvier 1924. — Marseille, 1er mai 1945 [photo]. — Le Provençal [nécrologie et photo], 14 avril 1966. — A. Kriegel, Aux origines du communisme français, 1914-1920, 2 tomes, Paris, Mouton, 1964. — Maurice Agulhon et Fernand Barrat, CRS à Marseille, Paris, 1971 — Bernard Bouisson, L’Anticléricalisme à Marseille entre 1919 et 1939, Thèse de 3e cycle d’histoire, Aix, 1971. — Jacques Bonnabel, Le Mouvement ouvrier à Marseille de 1914 à 1920. DES d’histoire du Droit, Aix, 1973. — Danielle Moulinard, Le PC à Marseille. Naissance et débuts, 1919-1925, Mémoire de Maîtrise, Aix, 1972. — Témoignages de L. Baudou, A. Detaille, H. Cohen, R. Reinier. — Rens. de Jacques Girault.

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