VIELJEUF Roger, Ferdinand

Par Claude Cherrier, Jean-Paul Martin et Jean-Michel Steiner

Né le 5 novembre 1919 à Saint-Martin la Plaine (Loire), mort le 7 juillet 2001 à Saint-Étienne (Loire) ; instituteur et conseiller pédagogique ; militant du SNI ; militant et responsable laïque dans la Loire ; membre du PCF.

Roger Vieljeuf était le fils de Fernand, Ulysse, menuisier et de Jeanne, Eugénie, Plagnes, institutrice. Marcelle, Mathilde, Geoffray et Jean Antoine Richard avaient signé l’acte de naissance. Ses racines laïques et scolaires se trouvaient en Lozère, au Collet de Dèze, où son grand-père, républicain sous l’Empire, avait ouvert une petite école près de son établi de menuisier ébéniste, au hameau de Pertus. Son père Fernand, menuisier et syndiqué, cévenol de tradition camisarde, se maria civilement avec une institutrice devenue directrice d’école à Saint-Martin-la-Plaine (Loire) où il s’installa comme artisan. Son frère, mort de la grippe espagnole en 1918, et lui-même, naquirent dans l’école primaire laïque du village. Sa mère Jeanne, d’origine modeste, bénéficia de l’enseignement d’une institutrice sans poste qui préparait bénévolement aux examens ses voisins lozériens. Militante laïque active, elle profita du fait que la Loire était déficitaire pour y être titularisée. Son père mobilisé en 1914, à 34 ans, fut ensuite affecté spécial en tant que menuisier à Rive-de-Gier. Il fit la grève en 1917 contre la guerre, malgré les menaces. Les parents de Roger Vieljeuf fondèrent à Saint-Martin-la-Plaine un comité Paix et Liberté à la fin des années 1930.

Roger Vieljeuf entra en 6e au lycée du Parc à Lyon (Rhône) où les grands élèves avaient une intense activité politique. Il obtint son baccalauréat et voulut devenir professeur de musique. Militant antifasciste il adhéra au mouvement Amsterdam Pleyel et en janvier 1936, fonda le cercle laïque du lycée. Il assista au congrès national du PCF, à Villeurbanne, et participa au rassemblement du Front populaire à Lyon. Membre de l’Internationale socialiste des jeunes puis des Jeunesses communistes en 1936-1937, il prit sa carte au Parti communiste en 1937, mais ne réadhéra pas en 1938, à cause de l’exploitation faite par le Syndicat national des instituteurs de la politique de la « main tendue ». Il combattit les accords de Munich et revint au Parti communiste peu après.

Incorporé le 9 juin 1940, se déclarant étudiant en musique, il fut affecté au dépôt d’Infanterie n° 151. Démobilisé le 23 août 1940 par le centre du canton de Nîmes, il fut versé dans les Chantiers de Jeunesse, groupement n° 16, et libéré le 31 janvier 1941. Rappelé à l’activité militaire le 24 août 1945, il fut démobilisé le 17 novembre.

Entreprenant des études de psychopédagogie à la faculté des Lettres de Lyon, il obtint un poste d’instituteur intérimaire à Izieux (Loire) le 8 août 1941, puis en avril 1942 nommé à Saint-Jean-Bonnefonds. Affecté au centre de repliement de Montbrison, pour échapper au STO, il travailla avec de faux papiers fournis par des amis du groupe Ange. Il participa à une opération de parachutage au village de Gumières. Rattrapé par le STO, il prit le train pour la Lozère le 6 juin 1944.

Depuis ses six ans, Roger Vieljeuf aimait la musique, le chant et le théâtre. Au lycée du Parc, il avait suivi des études de solfège, piano, harmonie et chant, mais la guerre l’empêcha de réaliser son souhait : préparer le professorat de musique et de chant des écoles normales. À Saint-Étienne, pendant la guerre, il rejoignit l’UFOLEP, organisation laïque qui n’avait pas été dissoute. En 1942, il participa à la fondation du Théâtre des Trois Coups avec ses amis Odouard, Louis Tardieu (Roger Louis), Genouel, Jean Escoffier, Jean Frappa. Cette création fut favorisée par Henri Gossot, inspecteur d’Académie, qui essayait de protéger les instituteurs et les œuvres laïques en leur conseillant d’adhérer à la fédération des œuvres du régime de Vichy. Dans cette institution qu’il présidait il plaçait aux postes de responsabilité des anciens de la Fédération des œuvres laïques. La première représentation des Trois Coups eut eu lieu le 24 décembre 1942 à l‘Amicale laïque de La Jomayère, la seconde à l’Amicale de la Chaléassière. Création d’une grande longévité puisque la troupe de théâtre existait toujours en 2016. Toute sa vie, Roger Vieljeuf conserva un goût prononcé pour le spectacle vivant et la musique. Il enregistra plusieurs disques de chansons populaires et ouvrières avec des artistes stéphanois. Il suivit toujours avec une attention particulière l’école de musique de l’UFALS. Dans les années 1946-1956, il anima l’Université du Travail créée à Saint-Étienne par la Fédération communiste de la Loire.

Le 27 novembre 1948, à Saint-Étienne, il épousa civilement Marcelle, Georgette Delorme, institutrice, née à Saint-Étienne le 23 avril 1923, sympathisante communiste, fille de Jean, Georges, Antoine, Auguste, Marie, ajusteur, décédé à l’époque du mariage et d’Élise, Ernestine Masméjean, femme de service à la retraite. Ils adoptèrent un enfant.

Comme ses parents, Roger Vieljeuf s’engagea dans l’action laïque militante. Il ne tarissait pas d’éloges sur Alfred Vernay, fervent propagandiste des œuvres laïques dans la Loire depuis le début du XXe siècle, vice-président national de la Ligue, membre du parti radical, maire de Saint-Étienne de 1932 à 1935, et le considérait comme son mentor. A la Libération, Roger Vieljeuf entra au conseil d’administration de la FOL de la Loire où il demeura jusqu’en 1994. Membre du bureau à partir de 1948, il fut secrétaire général de 1949 à 1954, détaché de l’enseignement, puis à partir de 1954, devient secrétaire adjoint. Il présida longtemps l’amicale de Grangeneuve et succéda à Claudius Buard à la présidence de la Fédération départementale de 1969 à 1978. Président d’honneur il défendit constamment et passionnément dans ce cadre les valeurs laïques et l’unité demeurant toujours très discret sur le contrôle exercé par les communistes sur la fédération, soulignant que « toutes les résolutions depuis 1945 ont été prises d’un commun accord entre socialistes et communistes après discussion ». Toutefois, il indiqua « qu’une polémique formidable avec le SNI a eu lieu vers 1949-50 », celui-ci ayant tenté alors de le « déboulonner ». En 1964, il comptait parmi les membres fondateurs du Foyer des Jeunes et d’Éducation Populaire de la Métare, forme nouvelle d’amicale laïque prenant en compte les évolutions de la société.

Roger Vieljeuf, instituteur public, à Saint-Romain-en-Jarez, titularisé le 1er janvier 1946, exerça à l’école du Marais à Saint-Étienne, puis avec son épouse, à Saint-Romain-en-Jarez à partir de 1959. Il termina sa carrière comme conseiller pédagogique dans le secteur de Saint-Étienne et prit sa retraite en 1975.

Membre du SNI depuis octobre 1944, il fit partie du conseil syndical de la section départementale du SNI à partir de 1946, élu sur la liste « unitaire ». Il participa à la grande pétition nationale en faveur de l’enseignement laïque et contre la loi Debré en 1959. En 1966, conduisant la liste des « Amis de la CGT », réélu au conseil syndical, à la suite d’un accord passé avec les autres tendances, il fut le secrétaire-adjoint du bureau et de la commission de la propagande de la section syndicale. Il fut membre de la commission administrative de la section départementale de la Fédération de l’Éducation nationale.

Militant du Mouvement de la Paix, il s’engagea notamment contre les guerres coloniales d’Indochine et d’Algérie. Membre du Parti communiste français depuis 1947, Roger Vieljeuf était le correspondant départemental de la revue communiste L’École et la Nation en 1958. Il entra au comité de la fédération communiste de la Loire en 1959 et demanda à ne pas être réélu en 1961. Lors des législatives de novembre 1958, il fut le suppléant de Marcel Thibaud dans la 1ère circonscription de la Loire (Saint-Étienne nord). Il fut également suppléant en 1962. En 1959, il figura en 13e position sur la liste présentée par le PCF conduite par Michel Olagnier aux élections municipales à Saint-Étienne. En mars 1965, il était à la tête d’une liste d’Union républicaine dans sa commune natale, Saint-Martin la Plaine, qui n’obtint aucun élu.

Lors de son décès, Roger Vieljeuf était conseiller pédagogique honoraire.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article134498, notice VIELJEUF Roger, Ferdinand par Claude Cherrier, Jean-Paul Martin et Jean-Michel Steiner, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 27 janvier 2022.

Par Claude Cherrier, Jean-Paul Martin et Jean-Michel Steiner

SOURCES : Arch. Dép. Loire, 3M197, liste électorale de Saint – Martin–la-Plaine ; registre de matricule, 1939. —Mairie de Saint-Étienne, service de l’État civil, registres des mariages de 1948, acte n° 001356. — La Tribune le Progrès, 26 février 1997, 10 juillet 2001 ; « Roger Vieljeuf n’est plusv », Alain Bonnassieux in Cordée 2000, périodique de la Fédération des Œuvres laïques de la Loire, septembre 2001. — Archives du comité national du PCF. — Entretiens avec Jean-Paul Martin (30 décembre 1983, (notes manuscrites) et avec Jean-Michel Steiner (20 janvier 2000, enregistrement). — Monique Luirard, La Région stéphanoise dans la guerre et dans la paix (1936-1951), CEF/CIERSR, 1980. — Jean-Michel Steiner, Le PCF dans la vie stéphanoise (1944-1958). Communisme et anticommunisme dans une grande ville ouvrière sous la IV° République, Thèse, Saint-Étienne, 2005 ; (id), Métallos, mineurs, manuchards… Ouvriers et communistes à Saint-Etienne (1944-1958), PUSE, 2014. – Notes de Jacques Girault, d’Alain Bonnassieux, ancien président de la Ligue de l’enseignement de la Loire, Marcelle Vieljeuf, veuve de Roger Vieljeuf.

Œuvre : Roger Vieljeuf, {Laïques, mes amis}, Saint-Étienne, 1987.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable