VILLIÈRES François, Auguste

Par Antoine Olivesi et Jean-Marie Guillon

Né le 25 avril 1900 à Marseille (Bouches-du-Rhône), mort le 11 novembre 1975 à Marseille ; chauffeur de taxi, puis entrepreneur de transport ; militant communiste et syndicaliste.

Fils d’Auguste Villières, employé, et de Marie Brachot, journalière, François Villières fut élève à l’école de la rue de La Fare à Marseille jusqu’à l’âge de douze ans. Orphelin de père, il travailla d’abord comme teneur de livres à la scierie Barnoux à Marseille, puis il apprit le métier de mécanicien à la Maison Peugeot et aux Établissements Maillants & Odoni où il resta jusqu’à l’âge de vingt ans. Il fit son service militaire au 36e régiment d’aviation d’Alger, mais fut réformé temporaire en décembre 1920. Il fit plus tard une période de réserve au 4e Génie à Grenoble. À sa sortie de l’armée, il travailla comme mécanicien chez Mattéi, avenue Cantini, puis chez Bartélémy & Collard, aux Chutes-Lavies entre 1922 et 1924, avant de s’installer comme chauffeur de taxi.
Militant communiste, il était secrétaire du 3e rayon en 1925. Il était membre de la cellule des taxis. Particulièrement engagé dans l’action contre la guerre du Maroc, il fut arrêté une première fois en mai 1925. Une information judiciaire fut ouverte le 30 mai pour provocation de militaires à la désobéissance et collage de tracts communiste à la caserne Saint-Charles. Lors d’une réunion du bureau fédéral du PC, en juillet, il déplora, en présence de Jean Crémet*, que les membres du parti « se désintéressent absolument » du congrès en préparation et redoutait que ce dernier remportât peu de succès. Lui-même participa aux diverses réunions préparatoires, au cours de l’été, puis fut de nouveau arrêté, en septembre, pour distribution de tracts antimilitaristes. Il fut libéré après vingt jours de détention. En décembre, se trouvant sans emploi, François Villières fut engagé, sur le conseil de Paul Bonnet* (voir Paul Marius Bonnet*) secrétaire de l’UD unitaire, comme chauffeur de l’attaché soviétique à Marseille chargé des relations commerciales avec l’URSS avec un salaire mensuel de 48 dollars. Il cessa alors de diriger le 3e rayon. François Villières portait alors des jugements très sévères sur le PC à Marseille qu’il estimait désorganisé en raison « du je-m’en-foutisme et du laisser-aller » qui y régnaient. Ayant gagné la confiance des représentants soviétiques à Marseille, ces derniers lui confièrent des tâches plus importantes au bureau commercial, le Zugorg-Torg, dirigé par le prince Kadjar, puis le chargèrent, avec Arthur Vandeputte* de reprendre en main les deux rayons de Marseille. En juin 1926, il était délégué du rayon n° 2 de cette ville.
Toujours avec Vandeputte, François Villières fut nommé, après le congrès de Beaucaire en juillet-août 1926, membre du comité du rayon unique de Marseille, dans le cadre de la nouvelle région méditerranéenne. L’année suivante, en février 1927, il polémiqua violemment avec César Matton*, au cours d’une conférence d’information du PC, accusant l’UDU de ne pas faire son travail d’organisation. Le 11 juin, il écrivait un article dans Provence ouvrière et paysanne, dénonçant « l’infâme campagne du Petit Provençal" en faveur de l’érection d’une statue de Thiers sur une place publique ». En septembre 1927, François Villières avait repris sa profession de chauffeur de taxi ; il devint secrétaire du syndicat CGTU de cette corporation. Il était également gérant du journal L’Éveil des taxis. François Villières demanda par lettre au préfet un passeport pour l’URSS où il voulait se rendre « pour se perfectionner sur le commerce des céréales et l’exportation de blé russe en France ». Ce passeport lui fut accordé le 20 septembre 1927, pour un voyage auquel il renonça. Il fut encore arrêté le 22 mars 1928 en venant se renseigner au poste de police de la rue du Tapis-vert au sujet d’un camarade arrêté pour distribution de tracts. En mai 1928, il participa à un meeting du SRI en faveur de l’amnistie. Un rapport préfectoral du 25 septembre 1928 signale que Marius Agnès* avait remplacé François Villières à l’Agence commerciale de l’URSS. Il était parti à Paris comme employé à la représentation commerciale de l’URSS. Il suivit là, d’après la police, « l’école d’orateur et de combat des rues à Bobigny » (Seine). Il se maria avec Marthe Claisse en 1929 et revint à Marseille. Il reprit son travail de chauffeur de taxi pour Guillard. À nouveau secrétaire général du syndicat unitaire des taxis-voyageurs jusqu’en 1934, membre de la cellule 17, avec notamment Fanucci*, il aurait été à la tête de la grève des taxis du 17 septembre 1932 chez Mattéi (qui se solda par un licenciement général et la vente du matériel).
Il s’installa comme chauffeur de camionnette à son compte en 1934 et milita au syndicat des taxis camionnettes en 1935-1936. Il participa activement au mouvement social qui accompagna le Front populaire, animant la grève des conducteurs de taxis-camionnettes. Il aurait effectué de nombreux voyages en Espagne pour ravitailler les républicains pendant la guerre civile. Il collabora épisodiquement à Rouge-Midi. Victime d’un grave accident en 1937 (une fracture du bassin qui l’avait paralysé six mois), il s’établit comme entrepreneur de transports, 49 rue de la République. Son entreprise avait obtenu la livraison de charbon aux écoles de Marseille et, entre 1938 et 1942, fit des transports pour la Marine nationale. Villières acquit ainsi une certaine aisance, mais, dans le quartier des Trois-Lucs où il résidait, il était connu comme communiste notoire, mais, d’après la police, il avait cessé d’être actif depuis la fin de 1937.
Mobilisé au 15e Train des Équipages à Marseille en 1939, il fut réformé temporaire le 13 décembre et reclassé dans le service auxiliaire le 1er juillet 1940. Il reprit ensuite la direction de son entreprise. Surveillé un moment, l’enquête établie le 15 mars 1940 n’avait rien signalé à son encontre. Pourtant, il fut l’objet d’un arrêté d’internement administratif le 8 janvier 1943 et envoyé au camp de Saint-Sulpice-la-Pointe dans le Tarn. Cette décision avait été prise sur la base d’un rapport le signalant comme un « agent secret de Moscou », qui serait allé en « Russie » et en serait revenu au début 1942... Il bénéficia de diverses interventions pour sa libération. Son épouse nia qu’il ait été en URSS et la police confirma le 23 mars 1943 n’avoir rien pu établir contre lui. En fait, il avait pris comme otage, le 4 janvier, à la suite de l’attentat à l’explosif contre une maison de tolérance fréquentée par les soldats allemands, rue Lemaitre dans la nuit du 3. Il était toujours interné en avril 1944, le ministre de l’Intérieur proposant alors sa libération à l’occasion du 1er mai.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article134746, notice VILLIÈRES François, Auguste par Antoine Olivesi et Jean-Marie Guillon, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 29 janvier 2019.

Par Antoine Olivesi et Jean-Marie Guillon

SOURCES : Arch. Nat. F7/13050. — Arch. Dép. Bouches-du-Rhône, M6/10802-10807, , 5 W 219 (dossier d’internement). — Danielle Moulinard, Le PC à Marseille. Naissance et débuts, 1919-1925, Mémoire de Maîtrise, Aix, 1972.

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