WERBROUCK Charles

Par Jean-Philippe Papin

Né le 15 mai 1915 à Roubaix (Nord) ; militant syndicaliste CGT puis CGT-Force ouvrière ; secrétaire général (1952-1972) puis président (1972-1975) de la Fédération Force ouvrière des Industries de l’énergie électrique et du gaz, membre de la commission exécutive de la Confédération Force ouvrière (1952-1975) ; administrateur d’EDF (1964-1976).

Issu d’une famille protestante, Charles Werbrouck eut un père maître d’hôtel après avoir été longtemps garçon de café. Après avoir obtenu son Certificat d’études, Charles Werbrouck obtint une bourse et entra à l’Institut Colbert, de Tourcoing, pour suivre des études commerciales. En 1930, toutefois, il arrêta ses études pour gagner sa vie. Embauché dans une entreprise de textile, il fut affecté en tant qu’auxiliaire au triage de la laine, passage obligatoire pour devenir acheteur, comme l’était la connaissance de l’anglais dont il poursuivait le soir l’étude à l’Institut technique de Roubaix.

Le textile étant particulièrement affecté par la Grande crise, Charles Werbrouck démissionna et entra le 1er mai 1932 à la Société roubaisienne d’éclairage par le gaz et l’électricité, une société bien connue dans la famille puisque déjà son grand-père, bottier de profession, vérifiait, en tant qu’auxiliaire, l’allumage et l’extinction des réverbères. Grâce à un diplôme de sténo-dactylographie obtenu lors de ses études à l’Institut Colbert — il avait obtenu un diplôme de sténotypie dans les mêmes conditions — Charles Werbrouck devint mécanographe. En 1937, il partit au service militaire qu’il dut prolonger une fois la guerre déclarée. Démobilisé en 1940, il revint à Roubaix et fut affecté à la comptabilité. Lors de la nationalisation, il fut nommé chef du service abonnements de l’agence de Roubaix, dans le cadre du centre de distribution de Lille.

En 1934, Charles Werbrouck avait été amené à participer à la création d’un syndicat propre à la Roubaisienne qui, à la suite d’un vote de ses adhérents, s’était affilié à la CGT. Chargé dans un premier temps de défendre les intérêts des agents qui, ayant moins de vingt et un ans, ne pouvaient encore être titularisés, Charles Werbrouck devint le secrétaire général de ce syndicat à la Libération. Il fut également nommé secrétaire général de l’Union locale des syndicats de Roubaix et sa région et, au lendemain de la nationalisation, alors que la CGT se restructurait, trésorier du syndicat du centre de Lille (Nord).

Le 28 décembre 1947, à la suite d’un vaste mouvement de grèves qui conduisit une minorité de la CGT regroupée autour du périodique Force ouvrière à faire sécession, une nouvelle organisation fut constituée sous l’impulsion de Clément Delsol*, la Fédération nationale des syndicats des industries de l’énergie électrique et du gaz (CGT-FO). Charles Werbrouck devint secrétaire non permanent de la nouvelle fédération, responsabilité confirmée lors du congrès constitutif des 25-26 juin 1948. Parallèlement, il continua à assurer le secrétariat général du syndicat de Roubaix resté à FO et celui de l’Union locale. Par ailleurs, il était resté membre de la commission exécutive de l’Union départementale du Nord. Enfin, il fut de 1947 à 1949 administrateur et membre du bureau de la caisse primaire d’assurance maladie de Roubaix.

Ses responsabilités nationales l’amenèrent alors à demander sa mutation à Paris. En novembre 1949, Charles Werbrouck fut nommé cadre au service des dommages de guerre, constitué au sein de la direction des Services financiers et juridiques. Peu après, il fut détaché pour activités syndicales à mi-temps puis le 1er mai 1952 à plein temps. Lors du IIIe congrès de la Fédération FO tenu du 2 au 4 octobre 1952, il fut élu secrétaire général, succédant ainsi à Clément Delsol qui, pendant deux ans, occupa les fonctions de président. Charles Werbrouck resta secrétaire général de la Fédération FO durant vingt ans jusqu’au XIIe congrès (novembre 1972) où il fut alors remplacé par Louis Clauzier*. Il devint à son tour président jusqu’à son départ à la retraite en mai 1975.

À la suite des secondes élections au conseil d’administration du Conseil central des œuvres sociales (CCOS) le 14 décembre 1949, Clément Delsol, élu, démissionna aussitôt de ses responsabilités et fut remplacé par Charles Werbrouck.

Le 17 février 1951, le CCOS fut dissout par le gouvernement. Contacté par le directeur général d’EDF, Roger Gaspard, Charles Werbrouck refusa de prendre en charge l’administration provisoire de l’organisme. Tout en critiquant « l’ingérence politique dans le fonctionnement des œuvres sociales qui (avait) rendu possible l’opération gouvernementale », Charles Werbrouck estimait que le problème devait être traité par le CCOS lui-même. Afin toutefois de « sortir de la situation » et d’éviter que les pouvoirs publics n’imposent « un régime genre comité d’entreprise », il déposa sur le bureau du ministre de tutelle, le 11 juillet 1951, au nom de sa Fédération, un projet de réforme de structure du CCOS qui donnait davantage de responsabilités aux CMCAS. Les décrets du 3 février 1955, toujours en vigueur, devaient reprendre nombre de ces dispositions.

Sur le plan des salaires, Charles Werbrouck ne cessa de défendre la formule dite du « salaire binôme » qu’il avait soumis aux directeurs généraux par courrier en date du 16 novembre 1955. Selon cette formule imaginée par le président de l’UNSC, René Millet*, le salaire devait comporter deux termes : l’un commun à tous les agents, calculé à partir de ce que l’on appelle aujourd’hui le SMIC ; l’autre, fonction du rang hiérarchique et destiné à répartir le supplément de pouvoir d’achat ; l’ensemble invitant à une progression plus rapide des rémunérations des catégories les plus défavorisées. En 1966, Charles Werbrouck soutint la formule dite du « salaire de progrès » préconisée par l’UNCM et défendue par les fédérations FO et CFDT. Par la suite, il encouragea sa Fédération à adhérer à la convention salariale qui fut signée le 10 décembre 1969 par les fédérations CFDT, FO, UNCM et CFDT

À la suite du IVe congrès (novembre 1954), Charles Werbrouck fut également élu à la commission exécutive de la Confédération Force ouvrière en remplacement de Clément Delsol qui s’était démis de son mandat et le resta jusqu’à son départ en inactivité. Il la représenta à partir de 1960 au sein de la commission énergie de la Confédération européenne des syndicats (CES). En tant que secrétaire général de la Fédération des électriciens et des gaziers, il fut également appelé à siéger au sein du conseil syndical de l’Internationale des services publics. Il appartint au Conseil économique et social comme membre de la production industrielle, de 1963 à 1964, puis comme conseiller et vice-président de la section industrie et commerce, de 1967 à 1975. Il fut également délégué à la commission du VIe Plan (section énergie) et siégea au conseil d’administration d’EDF d’octobre 1964 à février 1976.

À sa retraite, Charles Werbrouck se retira à Anglet près de Biarritz et milita au Groupement national des pensionnés (GNP) dont il fut élu vice-président à l’issue du XVe congrès en novembre 1981. Il fut élu administrateur, vice-président et, à partir de 1984, président du conseil d’administration de la Caisse primaire d’assurance maladie de Bayonne. Il fut également, de 1980 à 1996, administrateur du Centre hospitalier de la Côte basque.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article135326, notice WERBROUCK Charles par Jean-Philippe Papin, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 19 août 2013.

Par Jean-Philippe Papin

SOURCES : Témoignage de Charles Werbrouck, mai 1996 ainsi que dans les Cahiers de l’IFOREP, n° 81, 1996 — Lumière et Force, n° 3 (juin 1948), 16 (octobre 1950), n° spécial (août 1952), 32 (octobre-novembre 1952), 47 (janvier 1955), 133 (janvier 1970), 150 (janvier 1973), 168 (décembre 1975), 191 (janvier 1982). — René Gaudy, Les porteurs d’énergie, Paris, Temps Actuels, 1982. — Jean-Philippe Papin, Les syndicats d’EDF, 1946-1996, Association pour l’histoire de l’électricité en France, 1996.

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