DAVAUD Abel

Né le 26 septembre 1828 à Chamblanc (Côte-d’Or), mort le 15 janvier 1898 à Paris ; tourneur en cuivre et en bronze ; combattant de Juin 1848. Pendant le Second Empire, aux côtés et sous l’inspiration d’Armand Lévy, il inclina un temps vers une espèce de socialisme bonapartiste, mais joua surtout un rôle de premier plan dans le mouvement coopératif.

Enfant naturel et d’origine extrêmement modeste, Abel Davaud vint s’installer à Paris avec sa mère, et fut mis en apprentissage chez un tourneur en bronze et cuivre. Sans travail après la révolution de février 1848, il prit part, sur une barricade du quartier du Temple, aux Journées de Juin. Rentré à l’atelier, ce jeune bronzier acquit la conviction que le seul moyen d’assurer le bon marché des subsistances était la coopération. Disciple de Buchez, en 1849, il devint membre de l’Association ouvrière des ouvriers du bronze qui disparut au coup d’État. En 1854, il était commis en quincaillerie. Il se maria l’année suivante.
Le 2 juin 1857, avec huit autres camarades dont Engelmann, Guéneau, Louis Pierre et Lionnet, il fonda la première société de crédit mutuel, la « Banque de Solidarité commerciale ». Il habitait alors au commencement de la rue de Charenton, tout près du faubourg Saint-Antoine. Un petit groupe d’artisans parisiens et d’ouvriers, dont il était, avaient pris l’habitude de se réunir régulièrement pour échanger leurs idées sur des questions philosophiques et religieuses. Ils décidèrent de s’imposer une cotisation hebdomadaire de un franc pour constituer un capital qui, le cas échéant, pourrait être mis à la disposition de l’un ou de plusieurs d’entre eux à titre de prêt. Pour éviter les tracasseries de la police, ils se donnèrent rendez-vous dans les vignes de Montreuil ou dans le bois de Vincennes et, comme Abel Davaud le racontera plus tard, « là, assis en rond, les femmes et les enfants tout autour en vedettes, on discutait le règlement, on votait les articles et on nommait les fonctionnaires dont on avait besoin ; puis après on enterrait les bulletins. Joyeux de la besogne faite, chaque réunion dans les champs et dans les bois se terminait par un repas modeste, mais qui procurait des jouissances fraternelles qu’on ne goûte qu’aux moments d’enthousiasme. »

En 1863, Abel Davaud figurait parmi les fondateurs du « Crédit au travail » de Béluze. Il avait été, en juin 1861, l’un des animateurs d’une sorte de congrès des sociétés de crédit mutuel alors existantes qui avait établi un projet de statut type de « Société de crédit mutuel et de solidarité commerciale ». Davaud et les autres délégués reprenaient ainsi secrètement la tradition de l’« Union des associations de travailleurs » de 1850, interrompue par dix années de silence forcé. Voir Jeanne Deroin. Le 1er novembre 1864, Davaud fut un des fondateurs de L’Association, bulletin international des sociétés coopératives imprimé à Bruxelles. En août 1865, il figura, aux côtés de Gustave Chaudey, de Cohadon, etc., au comité constitué autour de ce journal, et chargé de rédiger les statuts généraux des différents types de coopératives. En 1866, il fut l’un des fondateurs de la « Sincérité », société à responsabilité limitée, au capital de 200 000 francs, divisé en 2 000 actions de 100 francs payables en 16 versements mensuels. « La Sincérité » était une association coopérative de consommation qui avait pour but : 1° l’exploitation d’une meunerie-boulangerie ; 2° l’ouverture de magasins fournissant le vin et les autres denrées alimentaires ; 3° la participation des consommateurs aux bénéfices de la société. En mai 1866, Abel Davaud compta parmi les gérants d’associations de production, de consommation et de crédit parisiennes qui protestèrent contre les intentions du gouvernement impérial de placer les associations coopératives en dehors du droit commun.

En août 1866, L’Association cessa de paraître. Les coopérateurs parisiens fondèrent alors un nouvel organe : La Coopération, Journal du Progrès social. Ils en confièrent l’administration à Abel Davaud. Celui-ci avait, depuis quelque temps, abandonné sa profession de bronzier, pour entrer comme comptable à la « Société des lunetiers » dont le gérant Muneaux appartenait aux mêmes organisations que lui-même, « Le Crédit au travail » et « la Sincérité ». Il dirigea le journal durant les deux années de son existence, de même que les Almanachs coopératifs dont la publication avait été décidée en juillet 1866 par le premier congrès de la Coopération française.

En 1867, il participa aux travaux de la « Commission d’encouragement pour les études des ouvriers », dite plus communément « Commission ouvrière », instituée par arrêté ministériel du 29 novembre 1866. Il y défendit le principe que la coopérative de consommation devait être ouverte à tous les consommateurs et non pas seulement aux adhérents, afin de ne pas conduire à une séparation des classes qu’il jugeait nuisible aux intérêts communs. Il défendit aussi, contre Varlin, le « Crédit au Travail », en qui le futur communard voyait un moyen de procurer des avantages personnels à quelques gérants et actionnaires.

En 1868, il fut l’un des fondateurs de La Réforme, journal du progrès politique et social, organe de la coopération qui essaya de constituer, en France, un véritable parti « coopératiste ».

Dans les derniers années de l’Empire, Abel Davaud gagna sa vie comme caissier-comptable à l’Association de production des maçons. Après le 4 septembre, il fit partie de la commission d’examen des papiers des Tuileries.

De 1874 à 1890, il fut comptable à l’Association des lunetiers, puis il entra comme employé dans une maison de fonderie de caractères d’imprimerie. En 1882, il patronna la création d’une Union des associations de production qui vit le jour en 1883 sous le nom de Chambre consultative.

Abel Davaud fut membre du jury des institutions coopératives et sociales de l’Exposition universelle de 1889. Rédacteur en chef de l’Association ouvrière dès sa fondation, en mai 1893, il le demeura jusqu’à sa mort en janvier 1898. En 1893, il fut un des fondateurs de la Banque des associations de production.

Sous le pseudonyme de Chamblanc, il a donné des souvenirs, en 1895, dans l’Association ouvrière, sous le titre de « Une vie de prolétaire ».
Voir Ph. Buchez, Engelmann, Guéneau, Lionnet, P. Louis.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article135903, notice DAVAUD Abel, version mise en ligne le 1er décembre 2010, dernière modification le 11 septembre 2021.

ŒUVRE : Articles dans L’Association (1864-1866), dans La Coopération, journal du Progrès social (1866-1868), dans La Réforme (1868), dans L’Association ouvrière (1893-1898). Il participa à la rédaction et dirigea les Almanachs de la Coopération pour 1867, 1868, 1869 et participa à leur rédaction.

SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE : J. Gaumont, Histoire générale de la Coopération en France, t. I, — G. Duveau, La Vie ouvrière en France sous le Second Empire. — J. Gaumont, « Le Centenaire d’un coopérateur. Abel Davaud », dans Almanach de la Coopération, 1928, p. 13-15.

ICONOGRAPHIE : Portrait hors texte dans Almanach de la Coopération, 1928.

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