LAITHIER André, Louis, Jules.

Par Christian Bougeard, Alain Dalançon, Jacques Girault

Né le 26 juin 1904 à Villers-sous-Chalamont (Doubs), mort le 29 mars 1999 à Saint-Brieuc (Côtes-du-Nord/Côtes-d’Armor) ; professeur ; militant syndicaliste du SNES, de la FEN, puis secrétaire général de l’UD CGT-FO des Côtes-du-Nord (1948-1967) ; militant de la MGEN ; militant socialiste SFIO puis FGDS.

Fils d’instituteurs, André Laithier effectua ses études à Pontarlier (baccalauréat en 1926), puis à Dijon (Côte-d’Or). D’abord maître d’internat intérimaire puis auxiliaire, en janvier 1926, avec la première partie du baccalauréat, il fut titularisé après son succès à la deuxième partie, au lycée de Chaumont (Haute-Marne, 1926-1929).
Il effectua ensuite son service militaire (novembre 1927-mai 1929) en Rhénanie occupée.

Inscrit à la faculté des sciences de Dijon, André Laithier fut maître d’internat au collège d’Avallon (Yonne), puis au lycée de Dijon (1929-1933). Il était candidat pour un poste de répétiteur en octobre 1933, mais fut nommé maître d’internat dans le petit collège de Tonnerre (Yonne). Il eut le sentiment d’être sanctionné, sans doute pour son militantisme syndical. Il avait en effet adhéré dès sa naissance au syndicat des maîtres et maîtresses d’internat affilié à la FGE-CGT, dont il devint membre du bureau national, secrétaire national d’avril 1931 à mars 1932, puis secrétaire adjoint, d’avril à décembre 1933.

Plusieurs parlementaires intervinrent, dont le député socialiste Robert Jardillier ; le secrétaire adjoint Neumeyer de la Fédération nationale des syndicats de fonctionnaires fit de même. L’administration prétexta qu’il n’était pas titulaire d’une licence d’enseignement mais d’une licence libre obtenue à Dijon avec trois certificats de botanique (1931), de chimie générale et de minéralogie (1932).

Pour régulariser sa situation, il dut s’engager à préparer un certificat de physiologie générale qu’il obtint à la Sorbonne en 1936. En dépit de certaines « incorrections » soulignées par le recteur, il fut, en novembre 1933, nommé répétiteur de sciences naturelles au collège de garçons de Wassy (Haute-Marne). Il enseignait aussi certaines matières littéraires (allemand, français) et la gymnastique. Il devint professeur délégué de sciences à partir d’octobre 1937, puis professeur en 1939. Il constitua au collège une collection et fabriqua des panneaux muraux remarqués en 1943 par l’inspecteur général.

Il s’était marié en juin 1936 à Wassy avec Marie Houot, professeure à l’école primaire supérieure de filles de cette ville puis, à partir de 1947 à l’École normale d’institutrices de Saint-Brieuc ; le couple eut un fils en 1946.

André Laithier fut mobilisé (août 1939-juillet 1940) au service des poudres comme agent de deuxième classe à Sorgues (Vaucluse). Après la guerre, nommé au collège de Saumur (Maine-et-Loire) qu’il avait demandé en avril 1945, il refusa cette mutation car son épouse n’avait pas obtenu un poste dans la ville. Resté professeur adjoint de sciences naturelles au collège de Wassy, il obtint sa mutation pour le lycée de garçons Anatole Le Braz de Saint-Brieuc (Côtes-du-Nord), en octobre 1946, où il termina sa carrière en 1966 comme professeur certifié. Il y reconstitua notamment les collections détruites pendant la guerre et, à la fin des années 1950, joua un rôle actif dans l’installation des nouvelles classes de sciences naturelles. Toutefois du début des années 1950 au changement de proviseur en 1955, il s’opposa à plusieurs reprises à l’administration de l’établissement. Inscrit en 1946 sur la liste d’aptitude de principal de collège, il renonça très vite à demander un poste.

Militant du Syndicat national de l’enseignement secondaire, André Laithier fut élu membre de la commission exécutive nationale du syndicat au congrès national de mars 1946. .Militant du Parti socialiste SFIO et de la CGT dans le courant Force-ouvrière, il estimait que les communistes et les agrégés avaient trop d’influence et de responsabilités dans les instances dirigeantes. Il se fit remarquer en janvier 1947 dans un long article paru dans l’Université syndicaliste, demandant une réforme des structures du SNES : l’élection des responsables nationaux au scrutin secret par tous les syndiqués (ce qui n’était pas le cas, la commission exécutive nationale étant élue par le congrès), la représentation de toutes les catégories dans les sections départementales et le remplacement des congrès nationaux par des congrès régionaux dont les motions devraient être avalisées par les sections d’établissements (S1). Au cours de l’année scolaire 1947-1948, il cumulait les responsabilités de membre de la commission administrative nationale de la Fédération de l’Education nationale, pour le courant « Force ouvrière », de membre de la CE nationale du SNES, de la CE de la section académique (S2) créée au congrès du 22 mars 1947, de secrétaire de la section départementale de la FEN et, au congrès départemental de la CGT des 17 et 18 mai 1947, il fut élu secrétaire adjoint de l’UD CGT des Côtes-du-Nord, dirigée par le communiste Jean Le Bars. Il fut absent, « excusé », de la réunion du bureau de l’UD qui discuta des grèves de novembre-décembre 1947, de leur répression et des « manœuvres scissionnistes » de la tendance Force Ouvrière. Les grèves furent partiellement suivies dans le département (20% des ouvriers, à la SNCF) mais pas par les fonctionnaires.

Il appela à passer à la CGT-FO dans l’Université syndicaliste de février 1948 et fut à nouveau élu en mars membre de la CE nationale du SNES sur la liste FO. Intégré dans le bureau de la FEN, il en fut écarté en 1949 n’ayant pas été présenté par sa section départementale. En effet, double affilié, comme les statuts de la FEN et du SNES le permettaient, candidat au titre de la catégorie des certifiés sur la liste C « Pour un syndicalisme indépendant et démocratique », il ne n’avait pas été élu à la commission administrative nationale du SNES en mai 1949. Il avait surtout créé dans la nouvelle confédération CGT-FO, le syndicat des professeurs et avait été élu en 1948 secrétaire de l’UD des Côtes-du-Nord qu’il avait largement contribuée à créer en s’appuyant sur les fonctionnaires. Yves Le Foll, secrétaire fédéral du Parti socialiste SFIO avait dénoncé dans Le Combat social « les grèves politiques » et les socialistes avaient appelé à former des syndicats FO dans les entreprises, mais sans beaucoup de succès. Par ailleurs en mars 1953, les renseignements généraux signalaient que « FO n’a pas de développement réel » en milieu ouvrier.

Dans le SNES, aux élections à la CA nationale de 1950, André Laithier conduisit, avec Jeanne Borgey, Gilbert Walusinski et Paul Ruff, une liste lancée par la tendance FO toujours dénommée « Pour un syndicalisme indépendant et démocratique », où se retrouvaient également des militants autonomes et ne se réclamant d’aucune tendance mais qui revendiquaient leur appartenance à la majorité autonome du SNES et de la FEN. Tête de liste dans la catégorie des certifiés, il signa dans l’Université syndicaliste, avant les élections, une déclaration intitulée « Défense des intérêts des certifiés et assimilés dans le SNES autonome », catégorie beaucoup plus nombreuse dans le syndicat depuis la fusion, l’année précédente, du SNES (classique) avec le Syndicat national des collèges modernes, où le référendum de 1948 avait donné la majorité au passage à FO. Il fut réélu alors membre de cette CA mais comme suppléant de Jeanne Borgey. Il ne se représenta pas les années suivantes, sa situation de secrétaire de l’UD FO qu’il conserva jusqu’en 1967, apparaissant de plus en plus incompatible avec un mandat national au SNES.

André Laithier ne se désintéressa cependant pas du militantisme dans le milieu enseignant puisque de 1947 à 1972, il fut administrateur puis vice-président de la section départementale des Côtes-du-Nord de la MGEN. En outre, candidat FO au conseil d’administration de la caisse primaire de sécurité sociale des Côtes-du-Nord, le 8 juin 1950, il fut vice-président du conseil d’administration de la caisse primaire de la Sécurité sociale et vice-président de la caisse régionale des vieux travailleurs salariés. Il créa et présida la section départementale de la Fédération des mutuelles de fonctionnaires puis, en 1961, l’Union départementale des sociétés mutualistes.

Parallèlement, André Laithier poursuivit une carrière politique. En octobre 1951, il fut candidat pour la SFIO aux élections au conseil général dans le canton de Quintin, détenu depuis 1945 par un radical-RGR, le docteur Quéré. Distancé au premier tour, il se désista en faveur du maire de Quintin, le républicain indépendant de Bagneux, élu contre un communiste. En avril-mai 1953, en 14e position sur la liste socialiste, il fut élu conseiller municipal de Saint-Brieuc (sept sièges pour la SFIO), dans la municipalité Victor Rault (MRP, 1953-1959), avec Antoine Mazier (SFIO) comme premier adjoint. Le proviseur de son lycée au milieu des années 1950 se félicitait de son action municipale pour la défense des intérêts de l’établissement. Mais bientôt, André Laithier entra en conflit avec la fédération des Côtes-du-Nord, notamment sur la laïcité et à cause du rapprochement de Mazier avec le député MRP H. Bouret contre la Communauté européenne de défense ; il aurait été avec Mazier « en constante incompatibilité d’humeur », selon les RG. Il n’assista plus aux réunions de la section de Saint-Brieuc et ne reprit pas sa carte en 1956. Le 11 mars 1957, la section socialiste et le groupe municipal firent savoir que Laithier ne faisait plus partie de leur parti. La polémique devint publique lors de la réunion du conseil municipal du 15 avril 1957 : il démissionna de la SFIO et s’inscrivit comme socialiste indépendant de gauche. Lorsque Mazier quitta la SFIO en septembre 1958 pour rejoindre le Parti socialiste autonome, André Laithier revint au parti socialiste SFIO et se fit désigner par ce qui restait de la section SFIO de Saint-Brieuc comme suppléant de Jean Le Garzic pour les élections législatives de novembre 1958, contre Mazier, le député sortant PSA de la première circonscription de Saint-Brieuc. Cette désignation conduisit Yves Le Foll à démissionner de la SFIO et à rejoindre le PSA. À la fin 1959, André Laithier fut provisoirement secrétaire d’une fédération SFIO des Côtes-du-Nord réduite à « quelques noyaux de fidèles » selon les RG. Le 6 novembre 1959, une réunion de la section de Saint-Brieuc réunissait dix adhérents.

De 1947 à 1972, André Laithier fut administrateur puis vice-président de la section départementale des Côtes d’Armor de la Mutuelle générale de l’Éducation nationale. Candidat FO au conseil d’administration de la caisse primaire de sécurité sociale des Côtes-du-Nord le 8 juin 1950, il fut le vice-président du conseil d’administration de la caisse primaire de la Sécurité sociale et vice-président de la caisse régionale des Vieux travailleurs salariés. Il créa et présida la section départementale de la Fédération des Mutuelles de Fonctionnaires puis, en 1961, l’Union départementale des Sociétés mutualistes.

En 1965, André Laithier fut réélu conseiller municipal de Saint-Brieuc dans la municipalité Le Foll (13 PSU, 11 PCF, 4 SFIO, 5 divers gauche) et devint troisième adjoint socialiste SFIO, délégué aux finances lors de son troisième mandat d’adjoint. En 1967, il abandonna ses responsabilités de secrétaire général de l’UD CGT-FO. A la fin de 1966, il devint secrétaire fédéral de la SFIO et vice-président de la FGDS. Lors de la préparation des élections législatives de mars 1967, il voulut être candidat à Saint-Brieuc et imposer un candidat de la SFIO à Lannion contre Pierre Jagoret* qui avait quitté la SFIO en janvier 1966 pour rejoindre le PSU. Le 28 janvier 1967, il entra en conflit sur ce point avec les conseillers fédéraux de la SFIO qui craignaient d’obtenir moins de 5% des voix à Lannion et de ne pas être remboursés des frais de campagne. Il démissionna de ses fonctions de secrétaire fédéral de la SFIO. Il n’avait pas été investi par le Conseil national de la FGDS. A Saint-Brieuc, la FGDS ne voulut pas opposer de candidat à Yves Le Foll, qui fut élu député et André Laithier retira bientôt sa candidature.

Pourtant, pendant les événements de Mai 1968, le 25 mai, André Laithier fut réélu président du bureau fédéral de la FGDS des Côtes-du-Nord. Il se présenta aux élections législatives de juin 1968 à Saint-Brieuc contre le député PSU sortant, Yves Le Foll. L’évolution vers la gauche du PSU et la consolidation de l’Union de la gauche municipale à Saint-Brieuc le conduisirent enfin à se représenter aux élections municipales de mars 1971 sur une liste conduite par Le Garzic (ex-SFIO) allant des socialistes aux centristes et même à la droite. Il fut remplacé dans la municipalité Le Foll par Claude Saunier (PS), futur maire de Saint-Brieuc en 1983 et sénateur en 1989.

Dans le domaine de la Sécurité sociale, André Laithier fut le président de la Caisse primaire d’assurance maladie de Saint-Brieuc, administrateur de la Caisse régionale d’assurance maladie de Rennes, président de la Caisse régionale d’assurance vieillesse, administrateur de l’hôpital de Guingamp et administrateur de l’APAJH.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article136503, notice LAITHIER André, Louis, Jules. par Christian Bougeard, Alain Dalançon, Jacques Girault, version mise en ligne le 3 avril 2011, dernière modification le 28 mai 2021.

Par Christian Bougeard, Alain Dalançon, Jacques Girault

SOURCES : Arch. Nat., F17/ 28720. — Arch. Dép. des Côtes d’Armor, 1 W 7. Rapports du préfet (1946-1954), 1 W 12 et 46 W 8, Rapports des RG (1946-1954) et (1957-1959), 1192 W 47 et 49, Elections législatives 1967 et 1968. — Arch. de l’UD-CGT des Côtes d’Armor, 2e registre des délibérations (1944-1949). — Arch. IRHSES dont L’Université syndicaliste, Le Professeur adjoint, voir également, Lisette Calderan et Catherine Zoukerman, Le syndicalisme de l’enseignement secondaire entre les deux guerres à travers deux syndicats de catégories : les répétiteurs, les maîtres d’internat, mémoire de maitrise, 1975.— Documentation MGEN (René Crozet). — Le Petit Bleu des Côtes-du-Nord, 13 et 20 octobre 1951, Ouest-France, mars 1965 et mars 1971. — Notes de Laurent Frajerman.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
fiches auteur-e-s
Version imprimable