ROUYER Charles, Jean

Par Daniel Grason

Né le 22 juillet 1907 à Clichy-la-Garenne (Seine, Hauts-de-Seine), mort fin août 1942 à Auschwitz (Pologne) ; clicheur ; conseiller municipal communiste de Gennevilliers (Seine, Hauts-de-Seine) ; volontaire en Espagne républicaine ; déporté.

Ses parents étaient blanchisseurs (son père devint ensuite mécanicien), Charles Rouyer habitait 14, rue du Square à Gennevilliers. Charles Rouyer travailla à l’imprimerie Simard, rue du Croissant, Paris IIe arr., puis chez Paul Dupont à Clichy. Il se maria le 22 juin 1929 à Gennevilliers avec Anne, Marie André, sans profession, originaire de Lorient (Morbihan). Il se remaria dans la même ville le 16 mars 1940 avec Odette Meck, originaire de Dôle (Jura).

Membre de la CGT du syndicat du Livre parisien, il adhéra au Parti communiste en 1925. Il fut secrétaire de cellule, adjoint du secrétaire de rayon. Sportif, il fut à l’origine de la création de la section boxe anglaise du Club sportif ouvrier de Gennevilliers, créé en 1928. Il entraîna au noble art, les frères Calmel dont Louis fusillé au Mont-Valérien. Lors des élections municipales de mai 1935, il figurait en dernière position sur la liste conduite par Jean Grandel. Il siégea au conseil municipal à toutes les séances, jusqu’à celle du 23 juin 1936.

Séparé de son épouse, vivant seul, il arriva en Espagne le 14 novembre 1936. Charles Rouyer fut affecté à la XIVe Brigade au bataillon Henri Barbusse, dès son arrivée, il demanda à adhérer au parti communiste d’Espagne. Nommé lieutenant, il rejoignit le 4 février 1937 la XIIIe Brigade, 10e bataillon. 2e compagnie ; le 26 mars 1937 à la XIe adjoint au lieutenant de compagnie, enfin à la XVe au 15e bataillon, le 15 juin 1937. Il participa aux combats pour la défense de Madrid, à ceux de Motril, à la bataille de Brunete, et aux batailles pour la défense de Saragosse.

Le 17 janvier 1938, il prenait le chemin du retour, le lundi 24, il était à Gennevilliers. Il fut accueilli par un article élogieux qui parut en page une de l’hebdomadaire local le Travailleur de la banlieue ouest. Le club sportif et la section communiste le saluait fraternellement : « Militant honnête et dévoué, notre camarade écouta la voix de sa conscience. La grande cause prolétarienne l’appelait au-delà des Pyrénées. […] là-bas, sa conduite modeste et héroïque le fit remarquer. Il collabora avec notre camarade Grandel durant la campagne qu’il fit dans l’armée héroïque. […] Nous avons pensé souvent à toi pendant les durs combats auxquels tu participais ». Robert Paul, auteur de l’article concluait ainsi : « Nous te saluons, Charles Rouyer Sport Rouge ».

Charles Rouyer assista au conseil municipal du 8 mars 1938, puis il fut noté absent ou excusé jusqu’à celui du 4 octobre 1938, ensuite absent. Le 9 septembre 1938, en page trois, la Voix populaire publiait une : « Mise en garde. La Section communiste de Gennevilliers prévient toute la population que le nommé Rouyer Charles, conseiller municipal de Gennevilliers, est exclu de notre Parti pour son action anti-communiste ». Marcel Gitton, secrétaire national du part communiste, écrivit le 7 octobre aux services des cadres à Albacete en Espagne : « Nous serions heureux de savoir qu’elle était son activité en Espagne, car il vient d’être exclu du Parti par la Section de Gennevilliers ». En Espagne, il était apprécié ainsi : « Fait du travail fractionnel, critique ouvertement et sans raison les décisions du commandement politique et militaire ».

Le parti communiste dissous, Charles Rouyer fut déchu de son mandat le 9 février 1940 pour « appartenance au parti communiste » par le conseil de préfecture. Le 24 décembre 1941, il fut arrêté par la police à Clichy au 16, rue d’Alsace. Il était fiché ainsi : « Militant notoire. Ex-conseiller municipal de Gennevilliers. À combattu en Espagne, dans les Brigades internationales », quatre autres anciens d’Espagne furent arrêtés le même jour. Il fut conduit à la caserne des Tourelles, boulevard Mortier, Paris XXe arr. À une date inconnue, il fut remis aux autorités allemandes et transféré au camp de Royallieu à Compiègne (Oise), Frontstalag 122 - Polizeihaftlager.

Charles Rouyer fut déporté dans le convoi du 6 juillet 1942 à destination d’Auschwitz-Birkenau (Pologne), les mille cents cinquante-cinq hommes arrivèrent à destination le 8 juillet. Ce fut l’un des convois le plus meurtrier, près de 90 % de décédés et disparus. Un convoi composé essentiellement de communistes et d’une cinquantaine de Juifs à avoir été arrêtés en tant que tels, la plupart étaient des réfugiés de Pologne et d’Italie. Ceux qualifiés par les nazis de judéo bolcheviques étaient ainsi visés. Il s’agissait aussi pour Hitler d’envoyer un avertissement à la résistance communiste. Celle-ci en août 1941 cibla lors d’attentats des officiers et des membres de l’armée d’occupation.

Ils étaient treize de Gennevilliers dans ce transport, dont René Richard, un ancien d’Espagne. Aucun d’entre eux ne survécut. Le nom de Charles Rouyer fut inscrit sur la plaque commémorative dédiée aux conseillers municipaux morts pour la France, dans le hall de la Mairie de Gennevilliers, ainsi que sur le monument aux morts dans le cimetière de la commune. Il fut homologué comme déporté politique.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article136562, notice ROUYER Charles, Jean par Daniel Grason, version mise en ligne le 7 avril 2011, dernière modification le 28 mars 2022.

Par Daniel Grason

SOURCES : Arch. Dép. Seine, DM3 ; vers. 10451/76/1 et 10441/64/2. – RGASPI 545.6.1040, BDIC Mfm 880/1. — RGASPI 545.6.1043, BDIC Mfm 880/2bis ; RGASPI 545.6.1044, BDIC Mfm 880/2bis ; RGASPI 545-6-1386, BDIC Mfm 880/32 ; RGASPI 545.2.37, BDIC Mfm 880/46 ; RGASPI 545.2.114, Mfm 880/47. – Arch. PPo. BA 2113. – Livre-Mémorial, Fondation pour la Mémoire de la Déportation, Éd. Tirésias, 2004. – Triangles rouges à Auschwitz. Le convoi politique du 6 juillet 1942, Claudine Cardon-Hamet, Éd. Autrement, 2005. – Arch. Mun. Gennevilliers, Le Travailleur de la banlieue ouest, 28 janvier 1938, La Voix populaire du 9 septembre 1938. — Notes de Claude Pennetier. — État civil.

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