LAMBERT Jean, Charles, Théodore

Par Alain Dalançon

Né le 30 septembre 1898 à Dontrien (Marne), mort le 17 juin 1968 à Reims (Marne), instituteur dans la Marne ; militant socialiste ; militant syndicaliste « École émancipée » du SNI et de la FEN, et de la CGT.

Fils de cultivateurs (Paul, Charles Lambert, 27 ans, et Marie, Julia Bacquenois, 23 ans), Jean Lambert devint instituteur.

Il se maria le 18 septembre 1920 à Romigny (Marne) où il exerçait, avec Marie, Albertine Levêque, 19 ans, sans profession, fille de cultivateurs dans cette commune, avec laquelle il eut deux fils, Jean, Charles, né le 25 juillet 1921, futur médecin du travail et militant trotskyste, et Maurice, futur dentiste.

Muté à Reims, Jean Lambert fut secrétaire du Syndicat de la Fédération unitaire marnais qui comptait cent adhérents en 1930 et quarante en février 1934. Très actif en 1930-1931, il devint, en 1934, membre de l’Union locale CGTU et fit, les 6 et 7 juillet 1935, une intervention très remarquée au XXe congrès des syndicats ouvriers de la Marne. Ayant été accusé faussement d’un délit de droit commun le 11 juillet 1934, il fut acquitté en 1936.

Devenu directeur de l’école primaire, rue Gerbault à Reims, il militait ensuite au Syndicat national des instituteurs avec les « Amis de L’École émancipée », et au Parti socialiste SFIO.

Durant l’Occupation, il participa activement à la Résistance. Responsable de Libération-Nord dans le secteur de Ville-en-Tardenois, il diffusait tracts et journaux clandestins, aidait, avec son fils Jean, des juifs à se diriger vers la zone libre, puis des réfractaires à échapper au STO, et hébergea des aviateurs alliés.
Son groupe FFI d’Aougny vint renforcer, le 26 août 1944, la quatrième centaine Davoust installée dans la ferme de Chantereine (commune de Champlat), où se trouvait également son fils Jean comme infirmier. Il constata que régnait une grande désorganisation dans ce groupe qu’il n’y avait pas de service de garde. Le 28, des automitrailleuses allemandes encerclèrent la ferme et firent 11 tués et 6 blessés. Jean Lambert rédigea un rapport sur ce drame, qu’il remit aux chefs locaux de la Résistance.

Il obtint à la fin de l’année 1946 un détachement, au titre de la CGT, comme gérant du journal L’Union, « Grand quotidien d’information issu de la Résistance » créé à Châlons-sur-Marne par un groupe de résistants de Libération-Nord et transféré à Reims dans les locaux de L’Éclaireur de l’Est.

Jean Lambert participa également aux côtés du communiste Léon Borgniet, lui aussi gérant de L’Union, au titre du Front national, à la reconstitution clandestine du Syndicat national des instituteurs. Dès 1946, il était secrétaire corporatif de la section départementale de la Marne dirigée par Léon Borgniet. Pour l’élection du bureau national à la proportionnelle, le 28 décembre 1947, il figura sur la liste C « d’indépendance et d’action syndicale » (École émancipée) conduite par Marcel Valière, obtint 111 voix, sans être élu. En 1948, il ne suivit pas le choix de l’autonomie du SNI et de la Fédération de l’Éducation nationale, prônée par Valière, mais se rallia à la position du Syndicat unique départemental de la Marne qui opta pour rester à la FEN-CGT et en même temps s’affilier à la FEN autonome. Il fut d’ailleurs élu au bureau du Syndicat unique et l’était aussi au bureau de l’UD-CGT.

En 1950, Jean Lambert fut au centre d’une affaire. Lors de l’assemblée de la FEN-CGT tenue à Épernay le 22 juin, Jean Roulon, membre du bureau national, défendit la déclaration hostile au régime de Tito signée par de nombreux responsables nationaux. Pour affirmer son désaccord, Jean Lambert annonça alors qu’il se rendrait en Yougoslavie. Quelques jours plus tard, une déclaration de cinq militants de la section marnaise, intitulée « Un cégétiste ne va pas chez Tito », fut publiée dans le journal communiste La Champagne, demandant son exclusion du bureau de l’UD-CGT. Le 4 juillet, une vive discussion eut lieu au bureau départemental du Syndicat unique, opposant ceux qui défendaient l’exclusion à ceux qui rappelaient l’ouverture de la CGT « à tous les travailleurs, quelles que soient leurs convictions politiques, religieuses et philosophiques ». Ces derniers réussirent à faire voter une motion dans ce sens, à l’unanimité moins une abstention. Au congrès national du SNI, le 20 juillet suivant, les dirigeants « autonomes », qui venaient de rendre visite à Tito, désignèrent Jean Lambert comme assesseur d’une séance plénière.

L’affaire n’était pourtant pas terminée, puisque en novembre 1950, lors de l’Assemblée générale départementale du SNI, Jean Lambert fut exclu de la liste unique de 15 noms pour le renouvellement du conseil syndical. Il se présenta alors seul mais ne fut pas élu. Puis l’UD lui retira son mandat de gérant de L’Union au titre de la CGT. Par solidarité, ses camarades de l’École émancipée (Pierre Bizouard, Louis, Paul Letonturier) ainsi que Madeleine Dufour, refusèrent de se porter candidats au bureau du Syndicat unique. Il reprit donc son travail à temps plein, comme ce fut le cas pour Léon Borgniet qui avait été évincé, ainsi que sa femme, du bureau fédéral et de la conférence fédérale du PCF en février précédent, pour avoir manqué de vigilance contre les « menées criminelles » de « Tito et sa clique ».
Toujours militant du Parti socialiste SFIO, lors du congrès administratif du 22 mars 1953, il entra au secrétariat fédéral, comme responsable technique, et au comité de rédaction du journal fédéral Travail.

Toujours militant École émancipée au Syndicat unique départemental, il présenta à l’AG de novembre 1956 une motion sur les événements de Suez et Budapest, s’opposant aux deux motions présentées par Jean Gaydier et Humblot, militants unitaire et autonome du Syndicat national de l’enseignement secondaire. Une motion de compromis fut adoptée à l’unanimité moins un refus de vote.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article136818, notice LAMBERT Jean, Charles, Théodore par Alain Dalançon, version mise en ligne le 2 mai 2011, dernière modification le 15 avril 2018.

Par Alain Dalançon

SOURCES : Arch. SHD, GR 16 P/333486, dossier homologation FFI. — Arch. OURS, dossier des fédérations du Parti socialiste SFIO (Marne). — J. Fallet, Le Front populaire à Reims, mémoire de maîtrise, Reims, 1973.— Dominique Pierre, La CGT à Reims. De la fin de la Première Guerre mondiale (1918) à la réunification (1936), mémoire de maîtrise Reims, 1979. — Jean Gaydier, Relire La Marne enseignante, L’École libératrice. — http://www.cndp.fr/crdp-reims/memoire/enseigner/memoire_resistance/resistance/lutte_liberation.htm. — http://www www.cndp.fr, Histoire et mémoire de la résistance. — Denise Richard-Ognois. http://annette.merle.borgniet.over-blog.com/article-un-proces-de-moscou-a-reims-ou-je-vais-ecrire-a-maurice-67209058.html, « Un procès de Moscou à Reims » (14 avril 2011). — Site mémoire des hommes. — État civil de Dontrieu, Romigny et Reims. — Notes de Jacques Girault.

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