LASSAUX Camille, Léon

Par Didier Bigorgne, Gilles Morin

Né le 2 juillet 1890 à Thin-le-Moutier (Ardennes), mort le 18 décembre 1969 à Rethel (Ardennes) ; instituteur, puis directeur d’école ; combattant de la guerre 1914-1918 ; militant syndicaliste ; dirigeant du Parti socialiste SFIO des Ardennes (1938-1940, puis 1944-1969) ; maire de Rethel (1944-1969) ; conseiller général (1945-1967) et président du conseil général des Ardennes (1956-1967).

Camille Lassaux
Camille Lassaux

Fils de Pierre Antoine Lassaux, cultivateur, et de Catherine Armande Blanchemanche, sans profession, Camille Lassaux était le cadet d’une famille de huit enfants. Après avoir fréquenté l’école primaire de Thin-le-Moutier, il poursuivit ses études à l’école primaire supérieure de Mézières, puis il entra à l’École normale d’instituteurs de Charleville. Il en sortit en 1910 pour devenir instituteur à Nouzonville.

La carrière d’enseignant de Camille Lassaux fut interrompue par la Première Guerre mondiale. Mobilisé à la 127e division d’infanterie, il participa à la bataille de l’Yser du 17 au 31 octobre 1914. En avril 1918, avec le grade de sous-officier, il combattit les Allemands en Flandre, à Nieuport, à Dixmude et à Ypres (Belgique). Gravement blessé d’une balle au crâne, ce qui nécessita une trépanation, il fut mutilé de guerre et reçut les plus hautes distinctions : la Médaille militaire, la Croix de guerre, la Croix du combattant et la Médaille interalliée.

Après l’armistice, Camille Lassaux reprit son métier d’instituteur. Il enseigna successivement à Charleville, à Corny, à Rocquigny, puis à Rethel où il fut nommé en 1924. Il se fixa définitivement dans cette ville. Il y devint directeur d’école, fonction qu’il exerça jusqu’à son départ à la retraite en 1945.

Pendant l’entre-deux-guerres, Camille Lassaux s’engagea dans la vie militante. Membre du Syndicat national (CGT), il fut élu au conseil syndical de la section des Ardennes en 1930. Il devint secrétaire général adjoint en 1936 du Syndicat national des instituteurs, poste qu’il occupa jusqu’en 1938.

Dans le même temps, Camille Lassaux avait adhéré au Parti socialiste SFIO. Il fut son candidat sans succès, à deux reprises. Aux élections législatives d’avril-mai 1936, il le représenta dans la circonscription de Rethel : il réunit 1 562 voix sur 11 149 inscrits et 9 519 votants au premier tour. Malgré son désistement pour le député sortant, radical-socialiste, qui fut réélu, il recueillit 109 suffrages sur 9 622 votants au scrutin de ballottage. Les 10 et 17 octobre 1937, il se présenta aux élections pour le Conseil général dans le canton de Rethel : il obtint 759 voix sur 3 096 inscrits et 2 478 votants au premier tour, il échoua au second tour en rassemblant 1 178 suffrages sur 2 586 votants.

Le 26 mai 1938, Camille Lassaux fut élu à la commission exécutive fédérale du Parti socialiste SFIO des Ardennes, responsabilité qu’il conserva jusqu’en 1940. Pendant ces années, il avait rejoint la Ligue des droits de l’Homme. Devenu franc-maçon, il avait été initié à la loge « La Fraternité » de Charleville (Grand Orient de France) où il rencontrait de nombreux militants socialistes.

Évacué avec sa famille en mai 1940, Camille Lassaux fut sanctionné par le gouvernement de Vichy, celui-ci ne l’autorisant à rentrer à Rethel pour reprendre son métier d’enseignant qu’en 1942. Il fut membre du mouvement de résistance Libération-Nord dans l’Indre-et-Loire. A la Libération, il participa à la reconstitution de la Fédération socialiste SFIO des Ardennes. Redevenu membre de la commission exécutive dès le 4 octobre 1944, il remplit son mandat jusqu’en 1969, en siégeant toutefois au bureau fédéral de 1952 à 1956.

Parallèlement à son activité militante, Camille Lassaux entreprit une carrière politique qui fut d’abord locale. Président du comité de Libération de Rethel, cité sinistrée à 80 %, en septembre 1944, il fut nommé conseiller municipal le 5 octobre suivant avant d’être élu maire de la ville le 23 octobre 1944. Reconduit dans sa fonction, au titre de la SFIO, après chaque élection municipale, il démissionna le 10 octobre 1969 pour raison de santé. En 1965, il avait subi une violente campagne de presse à propos de tableaux retrouvés à l’Hôtel de Ville, visant à le déstabiliser selon le préfet. Il continua néanmoins de siéger au sein de l’assemblée communale en qualité de conseiller municipal, nommé maire honoraire de la ville.

Camille Lassaux marqua surtout de son empreinte la vie politique du département. En septembre 1945, il emporta le siège de conseiller général du canton de Rethel, étant élu au deuxième tour, avec 2 809 voix sur 4 386 votants, contre le MRP Deroche, 1 515 voix, après en avoir obtenu 1 742 au premier tour sur 5 935 inscrits et 4 306 votants (première position). Le scénario se répéta à chaque scrutin. En mars 1949, il obtint 1 176 voix sur 5 980 inscrits et 4 263 votants au second tour. En avril 1955, il recueillit 1 555 voix sur 6 488 inscrits et 3 634 votants au premier tour pour remporter la victoire au scrutin de ballottage en réunissant 1 726 suffrages sur 3 936 votants. En juin 1961, il obtint 1 935 voix sur 7 000 inscrits et 4 135 votants au premier tour pour être réélu au second tour avec 2 194 suffrages sur 3 776 votants. Membre de la commission départementale de 1945 à 1955, président des commissions de l’Éducation de 1945 à 1949, des Finances de 1949 à 1955, il fut désigné à la présidence de l’Assemblée départementale de novembre 1955 jusqu’en 1967. À cette date, son état de santé précaire ne lui permit pas de mener une campagne électorale active. Le 24 septembre 1967, il était battu par son premier adjoint, dès le premier tour en ne recueillant que 988 voix sur 7 187 inscrits et 4 116 votants. Son échec surprit les observateurs, selon le préfet.

Camille Lassaux participa à la vie intérieure de la fédération socialiste. Membre de la commission exécutive fédérale en janvier 1945, du bureau fédéral en mai 1952, S’il s’imposa dans la vie politique locale et départementale, il ne réussit pas à conquérir un mandat national. Il échoua à l’élection en 1948 pour le Conseil de la République, puis aux élections sénatoriales des 26 juin 1955 et 26 avril 1959. Il n’eut pas davantage de succès aux élections législatives. Le 17 juin 1951, placé en troisième position sur la liste de son parti, il obtint 28 278 voix (pour une moyenne de liste de 28 725 voix) sur 150 894 inscrits et 126 225 votants ; avec 114 203 suffrages, le Parti socialiste SFIO arriva en deuxième position derrière le Parti communiste, mais il eut deux élus (Guy Desson et Camille Titeux) en raison de l’addition des listes apparentées (SFIO, Radicaux, MRP et Indépendants) qui totalisèrent 270 726 voix. Il représenta de nouveau le Parti socialiste SFIO aux élections législatives des 23 et 30 novembre 1958 dans la première circonscription de Mézières-Rethel. Avec 7 088 voix sur 54 453 inscrits et 42 272 votants, il fut devancé au premier tour par le communiste Roger Villemaux arrivé en tête de tous les candidats. Il se maintint au scrutin de ballottage pour recueillir 8 105 suffrages sur 43 535 votants, ce qui provoqua l’échec du candidat communiste.

Camille Lassaux occupa dans sa carrière un grand nombre de présidences d’organismes divers influent dans son département. Il était notamment président de l’Office départemental du tourisme, de la fédération départementale d’électricité, du syndical d’électrification de la Vallée de l’Aisne. Il fut administrateur du centre ardennais de productivité, de la Caisse départementale des incendies des Ardennes. Membre du comité départemental d’expansion économique et de progrès social, président d’honneur de la société mutualiste du personnel des communes et des établissements publics des Ardennes, il présida l’Union hospitalière des Ardennes et fut administrateur de l’Union hospitalière du Nord-Est. Il anima aussi de nombreuses associations locales, sportives ou d’anciens combattants.

Camille Lassaux atteignit le grade de maître dans le Grand Orient de France.

Marié à Irène Marie Aline Beaujet, institutrice devenue directrice d’école, Camille Lassaux était père de deux enfants, un garçon et une fille.

Maire honoraire de Rethel, Camille Lassaux était officier de la Légion d’honneur, dans l’ordre national du Mérite, des Palmes académiques, et titulaire de la médaille de vermeil départementale et communale. Lors de ses obsèques civiles célébrées à Rethel le 20 décembre 1969, un hommage solennel lui fut rendu. Aujourd’hui, une rue de Rethel porte le nom de Camille Lassaux. 

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article136896, notice LASSAUX Camille, Léon par Didier Bigorgne, Gilles Morin, version mise en ligne le 5 mai 2011, dernière modification le 6 septembre 2011.

Par Didier Bigorgne, Gilles Morin

Camille Lassaux
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SOURCES : Arch. Nat., F/1a/3228 ; F/1cII/114/D, 240, 270, 255, 275, 305, 306, 552, 561 ; F/1cIV/151 et 157 ; CAC, 19830172/101 ; 19900059/19. — Arch. Dép. Ardennes 3 M 4, 5,7, 8 et 9. — Archives de l’OURS, dossiers Ardennes et lettre du maire de Rethel, 24 juin 1988. — Bulletin de la section ardennaise du Syndicat national des instituteurs, 1930 à 1940. — Le Socialiste Ardennais, 1936 à 1938. — Le Réveil Ardennais, 1944 à 1969. — L’Ardennais, 15 juillet 1949 et 22 décembre 1969. — Presse locale. — Etat civil de Thin-le-Moutien et de Rethel. — G. Lachapelle, Les élections législatives de 1936. — Profession de foi aux élections législatives de 1951 et 1958. — Historique Libé-Nord en Indre-et-Loire, arch. Libération-Nord.

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