LEIZOUR François

Par Christian Bougeard, Jacques Girault

Né le 4 juin 1914 à Plougrescant (Côtes-du-Nord), mort le 6 octobre 1986 à Brest (Finistère) ; professeur de philosophie ; militant communiste des Côtes-du-Nord ; conseiller général PCF de Guingamp (1951-1958, 1964-1982) ; maire de Guingamp (1977-1983) ; député communiste de Guingamp (1978-1981).

Fils d’un instituteur socialiste SFIO et d’une institutrice, fille de l’ancien maire de Trédarzec, conseiller général de Lézardrieux, démissionnaire au coup d’État de Mac Mahon, réélu par la suite, François Leizour fit ses études secondaires au collège de Lannion (Côtes-du-Nord) où il créa, avec Pierre Hervé*, en 1932, un cercle des Jeunesses communistes dont il fut le secrétaire, suivi d’un second à Tréguier et il devint le secrétaire régional des JC. Il appartenait alors à l’Union fédérale des étudiants (UFE). Après avoir été reçu au baccalauréat, François Leizour obtint une licence de Lettres, option philosophie, à l’Université de Rennes (Ille-et-Vilaine) où il fut responsable des Étudiants communistes, délégué aux conférences nationales, responsable du Secours rouge international et des Amis de l’Union soviétique. Il adhéra au Parti communiste en 1936.

Au début de son service militaire à la fin de 1936, François Leizour fut versé à l’école des officiers de réserve d’artillerie à Fontainebleau. Six mois plus tard, il fut écarté de l’examen après un rapport sur son activité politique passée. Affecté comme soldat de deuxième classe dans l’Infanterie, en relation avec Waldeck L’Huillier* et Paul Vaillant-Couturier*, François Leizour, soldat de deuxième classe, fut arrêté, en septembre 1938, à la caserne de Courbevoie (Seine) pour activité politique (collecte de cigarettes pour le comité d’entraide à l’Espagne, lecture de l’Humanité et participation à un vin d’honneur du Parti communiste). Cassé de son grade de caporal, il fut libéré le 15 octobre 1938 et devint maître d’internat au lycée Le Braz de Saint-Brieuc en novembre.

François Leizour se maria à Courbevoie (Seine, Hauts-de-Seine) le 14 avril 1938 avec Louise Penanhoat, institutrice, fille d’un douanier socialiste SFIO, qui devint secrétaire du groupe de l’Union des femmes françaises à Guingamp. Le couple eut un enfant.

Rappelé sous les drapeaux en mars 1939, puis mobilisé à la fin d’août, François Leizour tenta de constituer, avec Pierre Hervé, des comités de soldats. Il fut fait prisonnier à Asfeld (Ardennes), le 10 juin 1940 et envoyé en captivité en Saxe (stalag IVB 4). Selon ses déclarations, il fit deux tentatives d’évasion et fut transféré à quatre reprises jusqu’à sa libération en mai 1945 et son rapatriement en juin 1945.

À partir d’octobre 1945, professeur de lettres au collège de Guingamp (Côtes-du-Nord), François Leizour devint secrétaire de la section communiste de la ville en 1946. Lors des élections générales de 1946, il faisait partie du comité de patronage, présidé par Marcel Cachin, des listes communistes. Il entra au comité en 1947 puis au bureau en 1948 de la fédération communiste des Côtes-du-Nord. Membre du secrétariat fédéral en 1949, responsable de l’éducation, lors de la conférence fédérale de 1950, il ne fut pas réélu au comité et au secrétariat fédéral à la demande d’Alain Signor qui expliquait cette mesure par le refus de Leizour de prendre la direction départementale d’Ouest-matin, par la faiblesse de son militantisme en direction des usines de Guingamp et son attitude jugée « insuffisante » en captivité. Il estimait que cette mesure diminuerait le nombre d’enseignants de l’instance dirigeante. Toutefois, en 1954, la Section de montée des cadres du PCF estima qu’il pouvait réintégrer le comité fédéral. Elle notait que Signor « avait créé une atmosphère un peu de terreur » qui avait empêché l’expression des désaccords avec la mesure qu’il proposait en 1950. Elle ajoutait que Leizour « malgré toute la peine qu’il a éprouvée après cette sanction a continué à militer activement comme par le passé ». François Leizour retrouva le comité de la fédération lors de la conférence fédérale de 1954 et y demeura jusqu’en 1974. Resté membre du bureau de la section communiste de Guingamp, il redevint membre de son secrétariat en 1962.

François Leizour était secrétaire de l’Amicale des élus communistes (1954-1957). Il militait alors à l’Amicale laïque de Guingamp, était conseiller cantonal du Comité d’action laïque tout en étant au comité départemental des anciens prisonniers de guerre.

Aux élections municipales d’octobre 1947, François Leizour conduisit la liste communiste mais il ne devint conseiller municipal de Guingamp qu’en 1953, réélu en 1959. En octobre 1951, le militant guingampais prit le relais de Jean-Marie Le Hénaff, conseiller général communiste sortant du canton de Guingamp. Il affronta le maire RGR de la ville, l’entrepreneur de transport Yves Kerfant, ancien maire de 1943 à 1944, soutenu par René Pleven. Le récent député socialiste SFIO Alexandre Thomas se retira au second tour mais le candidat indépendant-RPF Ledan se maintint. Cette triangulaire permit l’élection au conseil général des Côtes-du-Nord du communiste François Leizour. Le groupe du PCF était réduit de huit (en 1949) à six membres sur 48. Mais en avril 1958, ce siège fut perdu. Il obtint, sur 10 346 inscrits, 2 705 voix au premier tour, le candidat socialiste Alexandre Thomas, 2 309 voix et le candidat de droite, 2 694 voix. Le candidat socialiste se retira et le candidat communiste ne retrouva qu’une partie de ses voix (3 850) alors que Joseph Lemonnier (UDSR), soutenu par le centre et la droite, l’emporta avec 3 944 voix. Le canton de Guingamp comme celui de Saint-Brieuc-sud où le député socialiste Antoine Mazier se présentait contre la députée MRP Marie-Madeleine Diesnesch avait valeur de test vis-à-vis de la solidité du rapprochement des socialistes et des communistes dans les Côtes-du-Nord. Antoine Mazier fut élu mais pas François Leizour qui reprit le canton de Guingamp en 1964 avec 54,2 % contre un CNI.

Lors des élections législatives de novembre 1958, François Leizour fut le suppléant dans la nouvelle quatrième circonscription (Guingamp) des Côtes-du-Nord du député communiste sortant Guillaume Le Caroff, qui fut battu au second tour (30,6 %) par le MRP Alain Le Guen (46,5 %) dans une triangulaire, notamment du fait du maintien du candidat SFIO Alexandre Thomas (22,7 %). En novembre 1962, François Leizour lui-même candidat du PCF avec Le Caroff pour suppléant obtint 11 383 voix sur 62 626 inscrits et 26,6 % des voix au premier tour (6 candidats). Le désistement à gauche du SFIO Alexandre Thomas et du PSU Pierre Sérandour* se fit et il réunit 24 105 voix au deuxième tour, ce qui ne lui permit pas d’empêcher la réélection de Le Guen avec 52 % des voix. En mars 1967, le même tandem communiste obtenait, sur 62 627 inscrits, 19 964 voix (33,4 % des voix) au premier tour et, après le désistement du candidat de la FGDS, 24 982 voix (49,3 %) au second tour. François Leizour n’était battu que de 737 voix par le centriste bretonnant, Édouard Ollivro (PDM), lui aussi professeur d’histoire au lycée Pavie de Guingamp, maire de la ville de 1961 à 1977. Avec une forte participation (85,5 %), le conseiller général communiste de Guingamp avait progressé de 6,7 % au premier tour et la presse notait « une remontée importante des voix de gauche ».

Mais les événements de 1968 creusèrent l’écart, François Leizour, sur 59 761 inscrits, obtint 15 855 voix (31,7 % des voix) et 23 294 voix (46 % des voix), soit à nouveau la totalité des voix de gauche, au second tour aux élections législatives de juin. Il faut dire qu’Édouard Ollivro, contrairement à René Pleven, avait voté la censure du gouvernement Pompidou et qu’il n’avait pas hésité à participer à la grande manifestation d’action régionale (sans rapport avec le mouvement étudiant parisien) à Saint-Brieuc le 8 mai avec les syndicats et aussi certains notables. En mars 1973, l’écart entre les deux hommes se resserra à nouveau dans un contexte de progression de la gauche dans les Côtes-du-Nord comme au niveau national. Ayant obtenu, sur 60 370 inscrits, 18 782 voix (37,2 % des voix) au premier tour (cinq candidats), François Leizour en eu 25 364 (48,3 %) au second face à Édouard Ollivro. Le « léger avantage des voix de gauche », selon la presse, ne se confirmait pas et la participation de 2 000 nouveaux électeurs avait fait pencher la balance. Le barrage anticommuniste fonctionnait toujours bien dans cette circonscription dont le sud comptait plusieurs élus du PCF (maires et conseillers généraux). Mais la dynamique d’Union de la gauche, qui allait être favorable surtout au PS, porta ses fruits. Le 14 mars 1976, le conseiller général sortant de Guingamp fut réélu au second tour avec 63,3 % des voix contre l’UDF-PR Pierre Pasquiou.

Conseiller municipal sortant, en mars 1977, François Leizour devint enfin maire de Guingamp à la tête d’une municipalité composée de 9 PC, 8 PS, 1 divers gauche, 1 UDF-CDS et 4 modérés. Or, paradoxalement, alors que l’Union de la gauche était rompue et que le PS progressait électoralement au détriment du PCF, François Leizour fut élu député de Guingamp en mars 1978. Sur 66 123 inscrits, au premier tour, avec huit candidats, Édouard Ollivro (CDS) n’obtenait que 33,8 % des voix. À gauche, François Leizour, avec 16 938 voix (29,3 %), en recul par rapport aux résultats de 1973, voyait apparaître un jeune concurrent socialiste, son ancien élève, Maurice Briand (22,2 %). Et au second tour, il ne réunit pas la totalité des voix de gauche mais l’emportait, avec 30 090 voix dans son duel avec Édouard Ollivro avec 1 196 voix d’avance (51 %), devenant le premier et le seul député communiste de Bretagne depuis 1958. Son nouveau suppléant Félix Leyzour reprit ce siège pour le PCF de 1997 à 2002.

Pourtant, le député communiste sortant de Guingamp ne résista pas à la « vague rose » de juin 1981 et à l’inversion du rapport des forces à gauche. Le 14 juin, François Leizour (26,4 %) fut nettement devancé par le socialiste Maurice Briand (39,6 %), l’UDF Pierre Pasquiou n’obtenant que 24,9 %. Il se désista en faveur de Maurice Briand qui fut élu avec 65,8 % des voix. Le PS avait réalisé le “ grand chelem ” dans les Côtes-du-Nord raflant les cinq sièges de députés. Candidat à sa réélection au conseil général, François Leizour (25,6 %) fut devancé par le PS Yvon Le Merrer (32,8 %) le 14 mars 1982, les candidats de gauche (PS, PCF, UDB) totalisant 65,2 % des voix. Il se retira au second tour et Le Merrer fut élu avec 59,4 % contre l’UDF Pasquiou. Un cas de figure identique se produisit lors des élections municipales de mars 1983. La liste de droite de Pierre Pasquiou arriva nettement en tête (45,1 %) mais celle du député PS (28,3 %) devançait nettement celle du PCF de François Leizour (21,6 %) alors qu’une liste UDB-écologistes obtenait (4,8 %). La fusion des deux listes de gauche qui totalisaient 49,9 % des voix au 1er tour se fit dans la douleur, Maurice Briand n’emporta la mairie de Guingamp qu’avec 74 voix d’avance, 50,7 %. Le PCF avait dix élus pour 10 PS et apparentés et 2 PSU et 7 conseillers de droite. Après la députation et le conseil général, François Leizour perdait son mandat de maire du fait de la progression du PS. Pendant plus d’un demi siècle, la vie militante de François Leizour incarna les succès et les échecs du communisme, essentiellement rural dans les Côtes-du-Nord, avec une abnégation électorale qui fut récompensée à Guingamp en 1977-1978.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article137061, notice LEIZOUR François par Christian Bougeard, Jacques Girault, version mise en ligne le 16 mai 2011, dernière modification le 7 septembre 2011.

Par Christian Bougeard, Jacques Girault

SOURCES  : Arch. comité national du PCF, comités fédéraux (1953-1968). — Arch. Dép. des Côtes-d’Armor, 1192 W 41, 43, 45, 46, 49. Élections législatives de 1958, 1962, 1967 et 1968. — L’Aube nouvelle (1944-1950). — Le Petit Bleu des Côtes-du-Nord, 13 et 20 octobre 1951, 26 avril et 3 mai 1958. — Résultats électoraux : Ouest-France et Le Monde, (1973, 1976, 1978, 1981, 1982, 1983). — Arnaud Le Breton, L’évolution du communisme rural dans le sud-ouest des Côtes-du-Nord 1958-1983, maîtrise d’histoire, Université de Bretagne occidentale, Brest, 1998. — Cédérom Maitron (DBMOF), notice de Y. Le Floch.

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