TOURNIER Albert, Joseph, Adolphe

Par Pierre V. Tournier

Né le 26 août 1906 à Baume-les-Dames (Doubs), mort le 9 avril 1985 à Chartres (Eure-et-Loir) ; professeur de mathématiques ; résistant, chef d’escadron de réserve ; militant syndicaliste, secrétaire de la section départementale de la FEN de l’Eure-et-Loir ; militant socialiste, co-fondateur du « Mouvement des 150 » pendant la Guerre de Corée.

Albert Tournier et sa femme Andrée (née Guérin)
Albert Tournier et sa femme Andrée (née Guérin)

Fils de Célestin Tournier, artisan-horloger à Baume-les-Dames, et de Berthe Barbaux, Albert Tournier fut le premier de sa famille à faire des études. En 1928, il obtint le grade de licencié ès sciences à la faculté des sciences de Besançon (Doubs) et commença sa carrière d’enseignant, comme professeur de mathématiques à l’école primaire supérieure de Lodève (Hérault).

Homme de gauche, antistalinien convaincu, il adhéra, en 1929 à la SFIO. En 1931, au collège de Privas (Ardèche), il fit la connaissance d’Henri Lefebvre, professeur de philosophie et communiste. Ils eurent, au cours de l’année scolaire, des « discussions acharnées, au plus mauvais temps de la brouille entre les courants de la gauche » (Lettre d’H. L., mai 1985). Ces échanges avaient lieu au cours de promenades le long de l’Ouvèze. Il se maria en janvier 1933 à Oye-et-Pallet, avec Marthe Carrez.

Officier de réserve (lieutenant en 1934), Albert Tournier s’engagea dans la Résistance le 12 juin 1944. Il était alors professeur au lycée Victor Hugo de Besançon. Agent P2, chargé de mission du réseau de renseignement Carmel, il participa, du 5 au 13 septembre 1944, à la libération de Besançon et de Vesoul (Haute Saône). Il lui fut décerné plusieurs citations dont une à l’ordre du corps d’armée, par le général de Gaulle, portant attribution de la Croix de guerre 1939-1945, avec étoile de vermeil.

Remarié en septembre 1945 à Maintenon (Eure-et-Loir) avec Andrée Guérin, il fut nommé au lycée Marceau de Chartres (Eure et Loir). Peu après, adhérent du Syndicat national de l’enseignement secondaire, il fut élu secrétaire de la section d’Eure-et-Loir de la Fédération de l’Éducation Nationale (FEN), fonction qu’il occupa jusqu’à sa nomination en 1948 au lycée Buffon (Paris XVe arr.).

C’est à Buffon, en octobre 1950, qu’Henri Pouget (dit Henri Claude), agrégé de grammaire, communiste, et Albert Tournier prirent l’initiative, avec un troisième collègue, de lancer « l’appel des universitaires français devant la menace d’une nouvelle guerre mondiale », en constituant le « mouvement des 150 ». Sa vocation était de faire pression sur les belligérants de la guerre de Corée – déclenchée par la Corée du Nord le 25 juin 1950 – en rapprochant universitaires américains et soviétiques. À sa création, le mouvement paraissait indépendant du Mouvement mondial des partisans de la paix, d’inspiration communiste, à l’origine de l’appel de Stockholm (19 mars 1950) pour l’interdiction de l’arme atomique. Albert Tournier présida l’assemblée générale constitutive qui se réunit au Musée social, le 21 décembre 1950, en présence de 150 enseignants Il en fut le trésorier jusqu’à sa démission le 15 août 1952. Partisan d’un désarmement général, sans discrimination entre les armes, il se refusait à demander l’interdiction des seules armes atomiques, cette interdiction lui apparaissant comme devant donner à l’URSS et à ses satellites la supériorité militaire sur les États occidentaux. Après le « voyage de Moscou » (septembre 1951) d’une délégation du Mouvement – à laquelle il ne participa pas – et la manifestation violente du 28 mai 1952, organisée par les communistes, pour protester contre l’arrivée en France du Général Ridgway (successeur d’Eisenhower à la tête de l’OTAN), il considèrera qu’il était en désaccord, avec le Mouvement, sur des principes fondamentaux.

Pour de graves raisons de santé, il abandonna, deux ans après, toute forme d’engagement politique ou syndical actif, avant d’adhérer, beaucoup plus tard, à l’âge de soixante-quatorze ans, avec son épouse Andrée, à Amnesty International. Il y milita jusqu’à sa mort, pour la libération des prisonniers d’opinion. En 1958, il avait été nommé chevalier de la Légion d’honneur avec traitement, à titre militaire, pour ses faits de résistance contre le nazisme.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article137364, notice TOURNIER Albert, Joseph, Adolphe par Pierre V. Tournier, version mise en ligne le 12 juin 2011, dernière modification le 19 mars 2021.

Par Pierre V. Tournier

Albert Tournier et sa femme Andrée (née Guérin)
Albert Tournier et sa femme Andrée (née Guérin)

SOURCES : Arch. Dép. Doubs, état civil. — Arch. FEN. — Archives familiales. — Notes d’Alain Dalançon.

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