Par Daniel Grason
Né le 17 novembre 1890 à Milan (Italie) ; mécanicien ; volontaire en Espagne républicaine ; militant communiste ; interné politique.
Francesco Turri était le fils de Luigi et Maddalena, née Favini. Membre du Parti communiste italien, il fut condamné en 1933, par le Tribunal spécial de Rome à trois ans et demi de prison en raison de son activité antifasciste. Il combattit en Espagne dans la XIIe Brigade internationale Garibaldi. Blessé, il fut rapatrié en France le 2 août 1938 et bénéficia du droit d’asile accordé à certains réfugiés politique. Il reçut des soins à l’hôpital d’Eaubonne (Seine-et-Oise, Val-d’Oise), ensuite à la maison des blessés d’Espagne républicaine, 4, cité Monthiers, à Paris IXe arr. (Seine). Pour pouvoir subvenir à ses besoins, il reçut des secours du Comité d’aide au peuple espagnol et du Secours populaire de France.
Le 2 février 1939, il fit l’objet d’un refus de séjour du préfet de police, mais obtint avec l’appui de Léon Frot, conseiller municipal du XIe arr. de Paris, plusieurs sursis dont le dernier lui fut accordé le 24 septembre 1941, valable jusqu’au 24 décembre. Il habitait depuis le début juillet 1940, au 110, av. du président Wilson à Montreuil-sous-Bois (Seine, Seine-Saint-Denis). Il vivait avec Jeanne Hablique, née en 1900, employée au PTT, séparée de son mari, mère de trois enfants, un quatrième, Francis naquit de leur liaison le 23 juillet 1941.
Karl Boemelburg, commandant SS-Sturmbannführer dirigeait la SIPO (police de sécurité) et la Gestapo sur le territoire français. Il décida d’une vaste opération d’ensemble dans le département de la Seine contre les ex-miliciens en Espagne. L’ex milicien en Espagne figurait à ce titre, sur une liste établie le 19 septembre 1941 par la 3e section des Renseignements généraux, à la demande des autorités d’occupation. Francesco Turri fut arrêté le 24 décembre 1941, interné à la caserne des Tourelles, XXe arr. Le consul d’Italie demanda par lettre du 5 janvier 1942 : « les raisons qui ont déterminé l’arrestation » de Francesco Turri. Ce dernier était admis le 24 janvier à l’hôpital Tenon, XXe arr. où il était consigné. Le 14 avril 1942, les autorités allemandes interdisaient le transfert dans un autre camp ou prison de cinq internés administratifs, ex-brigadistes : Fernand Revesz, Moszek Rotzach, Elmo Scussolin, Stanislas Lisiecki et Francesco Turri.
Jeanne Hablique habitait désormais le XIe arr., elle écrivit le 13 mai 1942 au Préfet de Police : « Mon mari m’a laissée seule à la déclaration de guerre avec trois enfants à élever. Je suis restée un an seule qui m’a aidée à élever mes enfants, jusqu’au jour où on me l’a pris pour le mettre dans un camp de concentration, il y a de cela cinq mois, je me demande pourquoi ?
Je suis désespérée car j’ai eu un enfant qui a dix mois avec cet homme, et je me suis attachée à lui car il a été très bon pour moi, et je voudrais si cela était en votre pouvoir de faire quelque chose pour cet homme, je vous en serais très reconnaissante. […] Dans l’espoir que vous prendrez ma demande en considération ».
Francesco Turri fut rapatrié aux Tourelles le 2 juillet 1942, un inspecteur des Renseignements généraux concluait un rapport daté du 2 août ainsi : « Malgré la réserve qu’il observait en dernier lieu, cet étranger ne semblait pas avoir désavoué les théories révolutionnaires ». Francesco Turri ne fut pas libéré.
Par Daniel Grason
SOURCE : Arch. PPo, RG77W, 182.