LAMIRAND Georges, François, Victor

Par André Caudron

Né le 12 juin 1899 à Toulouse (Haute-Garonne), mort le 5 février 1994 à Épinay-sur-Orge (Seine-et-Marne) ; ingénieur de l’École centrale, président et administrateur de sociétés ; vice-président des Équipes sociales ; secrétaire général à la Jeunesse (1940-1943) ; maire de La Bourboule (Puy-de-Dôme) (1955-1971).

Fils de Jean-Baptiste Lamirand, universitaire républicain, professeur agrégé de physique-chimie et inspecteur général de l’enseignement, Georges Lamirand eut pour mère Jeanne Guiraud, proche des fraternités dominicaines qui lui inculqua un catholicisme fervent. Après des études au lycée Henri IV à Paris, où il eut Léo Lagrange* comme condisciple, il fit une année préparatoire au lycée Louis-le-Grand et réussit le concours d’entrée à l’École centrale en 1923. Devenu ingénieur des arts et manufactures, spécialisé dans la métallurgie, il obtint en même temps la licence en droit de l’Université de Paris.

Georges Lamirand avait été mobilisé en 1918 comme enseigne d’artillerie, un court moment, avant l’armistice. Il acquit plus tard son premier poste d’ingénieur aux Hauts fourneaux des aciéries de Denain-Anzin et Béthune (Nord, Pas-de-Calais) puis à celles de Pompey (Meurthe-et-Moselle), où il fut nommé ingénieur principal en 1928. C’est dans cette usine que vit le jour la première section d’entreprise de la Jeunesse ouvrière chrétienne française (JOC). Favorisant le développement des cours du soir pour les adultes et la formation professionnelle des apprentis, Georges Lamirand se lança dans les Équipes sociales que présidait Robert Garric depuis 1921 et il en devint lui-même un des deux vice-présidents, de concert avec le géographe Pierre Deffontaines.

Par l’intermédiaire de Robert Garric et du père Georges Lejosne, aumônier du Groupement des étudiants catholiques de Nancy (Meurthe-et-Moselle), le jeune ingénieur avait rencontré le maréchal Hubert Lyautey en 1926. Celui-ci, séduit par un article de Lamirand, qu’il lui avait dédicacé, pour la Revue des jeunes, sur le rôle social de l’ingénieur, thème cher au vieux soldat, lui recommanda d’en faire tout un livre qu’il préfaça lui-même. Dans ce volume promis à un succès notoire, Georges Lamirand citait souvent le père Antonin Sertillanges, de l’ordre des prêcheurs, qui, de loin son aîné, était devenu son directeur de conscience et son ami.

Sans engagement politique précis, Georges Lamirand s’était mis à fréquenter certains cercles de technocrates tel le Redressement français d’Ernest Mercier pour lequel il prononçait des conférences. Il incita les ingénieurs et cadres, en 1936, à jouer le rôle de médiateur entre le patronat et la classe ouvrière. En 1939, à la veille de la guerre, il revint à Paris pour diriger le personnel des Messageries Hachette avant d’être mobilisé comme officier d’artillerie. Il reçut le grade de commandant au moment de l’armistice. Raoul Dautry, ministre de l’Armement, l’avait promu ingénieur général avec mission de réorganiser très vite des unités diverses qui n’avaient pu échapper à l’éclatement. Le poste de directeur d’une usine d’armement lui fut ensuite confié à Moulins (Allier). À cette époque, Louis Renault le rencontra et lui donna la direction de ses usines de Boulogne-Billancourt (Seine, Hauts-de-Seine).

Le 27 septembre 1940, le maréchal Pétain remit à Georges Lamirand le secrétariat général à la Jeunesse qu’il allait conserver dans les gouvernements Laval, Flandin et Darlan. Il était destiné à l’encadrement des éléments laissés à eux-mêmes, en particulier, au début, ceux des Chantiers de jeunesse bientôt repris par le général Jean de La Porte du Teil, et relevant en principe du secrétariat d’État à l’Éducation nationale. Venant en aide aux Scouts de France qui lui étaient chers et mettant sur pied les Compagnons de France pour les jeunes de la zone sud, coupés de leur milieu familial, Georges Lamirand parcourut inlassablement les régions, mit en place les délégations régionales et départementales à la Jeunesse et demanda aux mouvements de lancer des écoles de cadres ouvertes aux jeunes chômeurs. Il présida notamment à l’essor de l’école des cadres d’Uriage (Isère) et au démarrage de l’association Jeune France, dotée d’une large autonomie. Dévoué certes à la Révolution nationale, il y voyait davantage un objectif patriotique et moral plutôt qu’un projet à finalité politique. Il était entré au comité patronal de l’Institut d’études corporatives et sociales, installé à Vichy (Allier) dès 1940, et apportait son concours au journal Compagnons, diffusé en zone sud.

Tandis que son adjoint Louis Garrone dirigeait depuis 1941 les services de la jeunesse en zone occupée et essayait de composer avec les activistes de la collaboration, Georges Lamirand se vit imposer des méthodes autoritaires par Pierre Laval en 1942. Il tenta en vain de sauver l’école d’Uriage. Décoré de la Francisque, il s’efforça d’amener le chef de l’État français à la rupture. Il avait, dit-on, cherché à convaincre le maréchal de gagner l’Afrique du Nord à l’époque du débarquement allié de novembre 1942 et de l’invasion de la zone dite « libre » par les troupes allemandes d’occupation. L’adjoint, Georges Pélorson, qu’il avait dû accepter le 9 juin 1942, était partisan résolu d’une jeunesse unique dont Georges Lamirand ne voulait pas.

Celui-ci finit par démissionner de ses fonctions le 24 mars 1943 et se livra clandestinement à des actions de résistance consistant en particulier à protéger de jeunes israélites. Quand vint la Libération, il n’en fut pas moins arrêté en 1944 pour atteinte à la sûreté de l’État. Mais, traduit devant la Haute Cour de justice, il obtint un non-lieu le 27 juillet 1947.
Georges Lamirand reprit ensuite ses activités professionnelles comme président directeur général du groupe SIGMA (Études, investissements et gestion au Maroc). Maire de La Bourboule (Puy-de-Dôme) de 1955 à 1971, il devint une figure marquante du thermalisme en tant que membre du comité de la Fédération nationale des syndicats d’initiatives et offices de tourisme. Depuis 1970, il était vice-président du Centre d’études politiques et civiques (CEPEC), fondé par l’industriel Georges Laederich, et retrouvait des gaullistes de gauche, tels Edmond-Ferdinand Joncret, Jacques-Louis Antériou, le général Germain Jousse au comité de direction du journal Plateforme. Il se distingua vers la fin de sa vie à la tête de l’Association pour la défense de la mémoire du maréchal Pétain (ADMP) qui réclamait la révision du procès et la translation de ses cendres à Douaumont (Meuse). Succédant à Jean Borotra, Georges Lamirand fut président de 1980 à 1984 puis président d’honneur de cette organisation jusqu’à sa mort. Il avait donné des cours à l’Institut national des sciences appliquées de Lyon (INSA).

De son mariage avec Lucie Matruchot, Georges Lamirand eut une fille, Geneviève, mariée avec Jean-Marie Bastien-Thiry, auteur de l’attentat manqué du Petit-Clamart (Hauts-de-Seine) contre le général de Gaulle.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article137404, notice LAMIRAND Georges, François, Victor par André Caudron , version mise en ligne le 20 juin 2011, dernière modification le 21 juin 2011.

Par André Caudron

ŒUVRE : Le rôle social de l’ingénieur. Scènes de la vie d’usine, Desclée, 1932 ; 3e édition, Plon, 1954. — Messages à la jeunesse, Cahiers français, 8, éditions F. Sorlot, Clermont-Ferrand, 1941.

SOURCES : Dictionnaire de biographie française, CXI (Henri Tribout de Morembert), 1998. — Dictionnaire biographique des militants (Bernard Comte), L’Harmattan, 1996. — Joseph Valynseele et Dominique Grando, À la découverte de leurs racines, 2, sl, 1994. — Antoine Delestre, Uriage, une communauté et une école dans la tourmente 1940 1945, Presses universitaires de Nancy, 1989. — Bernard Comte, Une utopie combattante, l’École des cadres d’Uriage 1940-1942, Fayard, 1991. — W.D. Halls, Les jeunes et la politique de Vichy, traduction française, Syros Alternatives, 1988. — Henry Coston, Dictionnaire de la politique française, 2, Lectures françaises, 1972. — Pierre Giolitto, Histoire de la jeunesse sous Vichy, Perrin, 1991. — Yves Cohen, Rémy Baudouë, Les chantiers de la paix sociale, 1900-1940, ENS Éditions, 1995. — Gérard Chauvy, Les acquittés de Vichy Perrin, 2003.

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