BOSSON Pierre, Anatole. Pseudonymes à Moscou : Pierre Berger et Pierre Albert.

Par José Gotovitch

Anderlecht (pr. Brabant, arr. Bruxelles ; aujourd’hui Région de Bruxelles-Capitale), 4 avril 1910 – Mauthausen (Autriche), 22 juillet 1942. Sertisseur-joaillier, dirigeant de la Jeunesse communiste, député de l’arrondissement de Bruxelles, conseiller communal de Bruxelles, dirigeant clandestin du Parti communiste, déporté, époux de Rose Osée.

Pierre Bosson vit et grandit dans le quartier populaire de la rue Rempart des Moines, au centre de la capitale, où ses parents, d’origine ouvrière, tiennent un café. Il effectue huit années d’études (4ème degré) et travaille, de quatorze à seize ans, comme lapidaire, ensuite jusqu’à vingt ans, comme sertisseur.

En 1926, Pierre Bosson adhère au Syndicat autonome des bijoutiers de Bruxelles. Il s’affilie en avril 1928 à la Jeunesse communiste belge (JCB), après avoir lu pendant six mois, sous l’impulsion de camarades d’atelier, la presse et des écrits « révolutionnaires », d’après son autobiographie de 1933. Le Congrès de la JCB de 1930 l’élit à son Comité central. En 1931, il est chômeur intermittent. En 1932, il devient provisoirement permanent, participe à la rédaction du Jeune Exploité, et supervise, comme délégué du Bureau exécutif des JC, l’action des jeunes au cours des grèves boraines.

Pierre Bosson participe à plusieurs congrès internationaux et accomplit quelques missions pour l’Internationale communiste des Jeunes (ICJ). Après avoir chômé pendant quinze mois, il est désigné pour suivre les cours de l’École léniniste internationale à Moscou où il arrive en janvier 1933. Sous le pseudonyme de Pierre Berger, il y demeure une année.
Au retour, Pierre Bosson accomplit son service militaire au génie cycliste. Il y subit plusieurs punitions pour agitation politique. En août 1934, étant à l’armée, il ne participe pas aux discussions mais s’abstient, par la suite, lors du vote qui sanctionne le pacte d’unité d’action conclu avec les jeunes socialistes et les trotskystes, pacte qui déchaîne la colère de l’Internationale. Cette abstention lui vaudra par la suite la confiance renforcée de l’Internationale. Réélu au Comité central des Jeunesses en 1934, Bosson en devient le secrétaire d’organisation et le trésorier national. Le délégué de l’ICJ le décrit comme très populaire parmi les jeunes.

En 1935, Pierre Bosson adhère au Parti communiste de Belgique (PCB) et participe à sa Conférence nationale d’avril qui modifie profondément et sa politique et sa direction. La confiance accordée se mesure au fait qu’il prend part au VIe Congrès de l’ICJ où il intervient sous le nom d’Albert Pierre. Ce Congrès est parallèle au VIIe Congrès de l’Internationale « adulte » qui marque le grand tournant vers la politique de Front Populaire et l’antifascisme. Il concèdera cependant qu’il a hésité un moment sur la question de l’unité. Son militantisme lui a occasionné déjà de multiples arrestations pour troubles de l’ordre public et la Sûreté publique le désigne comme un « communiste extrémiste notoirement connu ». Le décès de Joseph Jacquemotte, en octobre 1936, envoie Bosson, premier suppléant, au Parlement. Il a vingt-six ans.

Artisan de l’unification des Jeunesses socialistes et communistes intervenue à la Noël 1936 sous l’appellation de Jeune Garde socialiste unifiée, Pierre Bosson quitte l’organisation pour satisfaire aux conditions mises par le Parti ouvrier belge (POB) à ce geste. Membre désormais du Comité Central du PCB et bientôt de son Bureau Politique, il assure la liaison avec la jeunesse et supervise le recrutement pour les Brigades internationales en Espagne. Il est également trésorier national.

Au Parlement, membre des commissions coloniale et de la Défense nationale, Pierre Bosson intervient sur ces deux thèmes. Il dépose notamment une proposition de loi d’amnistie pour les infractions politiques commises au Congo ainsi que pour y développer l’enseignement officiel. En octobre 1938, troisième candidat, il est élu conseiller communal de Bruxelles. Mais en 1939, le troisième siège parlementaire du Brabant échoit à l’arrondissement de Nivelles (aujourd’hui pr. Brabant wallon).

Après la signature du Pacte germano-soviétique et la répression qui frappe le PCB et sa presse, Pierre Bosson est chargé de mettre en place les bases d’un appareil clandestin. Ce dernier produit une presse semi-légale de novembre 1939 à mai 1940. Il assure également la partie belge de l’organe de l’ICJ, Jeunesse du Monde, qui paraît alors à Bruxelles. Mobilisé, soldat du génie pendant la campagne des 18 jours, il échappe à l’internement et reprend ses fonctions dirigeantes, cette fois, totalement clandestines : finances, liaison avec la jeunesse, appareil technique de presse. En janvier 1941 sort l’organe national clandestin, Le Drapeau Rouge, dont Bosson a assuré la mise sur pied : approvisionnement en papier, ateliers, planques, distribution.
Si Pierre Bosson échappe à la razzia menée par l’occupant allemand le 22 juin 1941, il tombe le 4 octobre suivant, lors d’une réunion, victime d’une clandestinité encore trop peu rodée. Il a trente-deux ans quand, de Saint-Gilles (pr. Brabant, arr. Bruxelles ; aujourd’hui Région de Bruxelles-Capitale), il est transporté à Mauthausen en Autriche. Une blessure infectée entraîne sa mort, le 22 juillet 1942. Preuve de l’importance qui lui était accordée par l’Internationale : en mai 1943, depuis Bruxelles, le délégué de l’IC interroge Moscou sur la présence probable de Bosson en URSS après une évasion éventuelle d’un camp allemand. Le NKVD mène vainement l’enquête.

Pierre Bosson laisse une veuve, Rose Osée (1911-2000), elle-même résistante et déportée.
Une pétition introduite au conseil communal par des habitants de son quartier - il habitait Impasse de la Perle d’Amour - pour donner son nom à une rue bruxelloise demeurera sans suite.
Pierre Bosson incarne parfaitement la figure de l’ouvrier autodidacte pour lequel le PCB constitue un ascenseur culturel et social et qui explique l’engagement total qu’il lui offrit.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article137610, notice BOSSON Pierre, Anatole. Pseudonymes à Moscou : Pierre Berger et Pierre Albert. par José Gotovitch, version mise en ligne le 16 juillet 2011, dernière modification le 20 novembre 2020.

Par José Gotovitch

SOURCES : RGASPI (Centre russe pour la conservation des archives en histoire politique et sociale), 495-74-67, 495-193-544, 495-193-120 – Archives générales du Royaume, fonds SPF Sécurité sociale, Direction générale victimes de la guerre, Tribunal OFK 672, jugement en cause Tihon ; Dossier Résistant par la presse clandestine – Archives de la ville de Bruxelles, Police, 3e division, 30 avril 1936 – La Voix du Peuple, organe de la section de Bruxelles du PCB, n° 3, février 1950 – Le Drapeau Rouge, 20 mai 1945.

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