LAMY Franck

Par Nicole Proux

Né le 12 septembre 1889 à Prignac (Charente-Inférieure), mort le 11 décembre 1944 au camp de Neuengamme (Allemagne) ; ingénieur des Ponts et Chaussées à Royan (Charente-Inférieure) ; résistant, membre du mouvement Organisation civile et militaire et du groupement de résistance Louis Bouchet, responsable du groupe Ponts et Chaussées, phares et balises.

Franck Lamy
Franck Lamy

Fils d’Isidore Lamy, instituteur à Taillant (Charente-Inférieure), et de Louise Traver, Franck Lamy entra dans l’administration des Ponts et Chaussées en 1912.

Mobilisé en août 1914, il fut blessé au début de la guerre. Après la signature de la paix, il retourna à la vie active comme adjoint technique puis comme ingénieur des travaux publics d’État et fut nommé en 1923 responsable de la subdivision maritime de Royan. Il épousa à Rochefort (Charente-Inférieure), le 20 septembre 1924, Marguerite Berthommé avec laquelle il eut trois enfants et bénéficia à partir de 1926 d’un logement de fonction dans l’immeuble domanial des Ponts et Chaussées de Royan, face au port.

Pendant la « drôle de guerre », par manque de personnel dû à la mobilisation, Lamy fut nommé en outre responsable intérimaire de l’île d’Oléron. En juin 1940, ayant reçu par téléphone l’ordre de détruire le bac de la Seudre, il demanda une confirmation écrite ; le 23 juin, il reçut un contre-ordre et dut seulement rendre le bac provisoirement inutilisable en enlevant des pièces au moteur.

Dans l’été 1943, il contacta le commandant Thibaudeau et s’engagea dans l’Armée secrète le 1er août puis fut rattaché à l’OCM à partir du 1er novembre 1943. Pour la résistance royannaise, c’était une recrue de choix, du fait de sa fonction qui le mettait régulièrement en relation avec les autorités allemandes, d’autant qu’il maîtrisait l’allemand. Par contre, cette fréquentation régulière incitait certains à voir en lui un collaborateur.

Le recrutement de son groupe se faisait parmi les agents des Ponts et Chaussées et les gardiens de phares, qui étaient seuls autorisés à pénétrer dans les secteurs déclarés zone rouge où les phares se situaient. En effet du sommet des phares de La Palmyre, La Coubre, Cordouan, on disposait d’une vue panoramique sur les défenses particulièrement importantes du mur de l’Atlantique, l’avancement des travaux et les mouvements de bateaux dans l’estuaire de la Gironde. Lamy avait également sous son autorité un corps-franc marin.

Il fournit des renseignements sur les forces d’occupation à Royan, les plans du Fort du Chay, les travaux en cours dans sa subdivision, les travaux de balisage, le fonctionnement de la signalisation maritime allemande, le service des phares, l’état des routes, la résistance de tous les ponts routiers, ce qui devait permettre d’envisager, le moment venu, leur éventuelle destruction. Il réussit à paralyser partiellement le trafic des bateaux de guerre allemands de faible tonnage, en faisant en sorte que le dragage du port et des passes ne puisse s’effectuer facilement, notamment en faisant saboter une drague qui ne fut jamais remise en service ni remplacée. Il s’opposa également aux autorités d’occupation à propos des travaux routiers.

Extrêmement discret, il avait laissé sa famille dans la totale ignorance de son activité de résistance. Seule bizarrerie relevée par elle, son soudain intérêt pour le sport. En effet il se rendait tous les dimanches au stade, sans doute pour rencontrer un contact, peut être Louis Bouchet, le responsable du
groupement de résistance de Royan.
Dans le cadre d’une opération de démantèlement de la Résistance de la région de Royan, Lamy fut arrêté par la Gestapo le matin du 17 mars 1944 dans son bureau, à la grande surprise de sa famille. Dans les deux lettres qu’il lui envoya de la prison de Lafond de La Rochelle, il continua de l’entretenir dans l’illusion de son innocence. Brutalement interrogé seulement trois semaines après son arrestation, il ne donna aucun nom de son groupe. Dirigé sur Compiègne le 16 mai, il partit en déportation au cap de Neuengamme, le 19 mai, sous le matricule 34 410. Atteint de dysenterie, en plein hiver, un infirmier l’aspergea de deux seaux d’eau glacée qui déclenchèrent une pneumonie dont il décéda deux jours plus tard, selon les témoignages et documents, le 7 ou le 11 décembre 1944.

Entre temps, sa famille avait été évacuée à Rochefort. Le 5 janvier 1945, au cours du bombardement allié de Royan, elle perdit tous ses biens, l’immeuble des Ponts et Chaussées étant réduit à néant.
À Royan, un boulevard porte le nom de Franck Lamy, ainsi qu’un lotissement, et en 1947 une grosse vedette du service des phares et balises fut baptisée de son nom. Titulaire de la croix de guerre 1914-1918, étoile de bronze, la médaille de la Résistance lui fut décernée à titre posthume ainsi que la croix de guerre 1939-1945, étoile d’argent, accompagnée d’une citation à l’ordre de la division (général Koenig).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article137865, notice LAMY Franck par Nicole Proux, version mise en ligne le 13 août 2011, dernière modification le 14 août 2011.

Par Nicole Proux

Franck Lamy
Franck Lamy

SOURCES : Arch. départementales de Charente-Maritime,(témoignage du 12 juin 1945 du Dr Veyssiere sur les derniers jours de Frank Lamy). - Arch. familiales. – Le groupe Louis Bouchet, mémoire collectif, Musée de Royan. - Henri Gayot, Charente Maritime 1940-1945 : Occupation, Résistance, Libération. - Samuel Besançon, Croix sur Royan, cahier d’un résistant, 1940-1945, Le Croît Vif, 2000.

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