LAFLEUR Eugène, Constant

Par Jean-Pierre Besse, Daniel Grason

Né le 6 mars 1889 à Saizerais arrondissement de Toul (Meurthe-et-Moselle), fusillé le 17 septembre 1943 au Mont-Valérien, commune de Suresnes (Seine, Hauts-de-Seine) ; ajusteur mécanicien, tourneur ; militant communiste de Paris ; résistant en Bretagne.

Eugène Lafleur
Eugène Lafleur

Fils d’un mineur et d’une journalière, Eugène Lafleur était titulaire du CEP et du Certificat d’études secondaires. Il était domicilié depuis 1918 au 34 rue Dupleix dans le XVe arrondissement de Paris. Il épousa en juillet 1918 Suzanne Ouin, dont il eut un fils.
Ouvrier chez Sauter-Harlé, il participa en mai 1918 aux grèves déclenchées dans les usines de guerre. Membre de la CGTU, il était le trésorier du Syndicat unitaire des métaux en 1920. Il adhéra au Parti communiste après le congrès de Tours. Il travailla dès le 8 mai 1936 comme tourneur sur métaux aux usines Citroën place Balard. Militant communiste, il fut trésorier de la section du XVe arrondissement avant-guerre. Du recrutement de Toul en Meurthe-et-Moselle, il ne fut pas mobilisé en 1939, mais affecté spécial aux usines Citroën à Paris (XVe arr.).
La direction le licencia le 15 avril 1940 pour « arrêt volontaire de travail », elle le considérait comme un militant actif et un meneur dangereux. Le 3 septembre 1940, il s’inscrivit au fonds de chômage de l’arrondissement, il y resta inscrit jusqu’au 8 février 1941. Le décret-loi du 26 septembre 1939 mettait le parti communiste hors la loi.
Il fut arrêté une première fois le 2 février 1941 par la police française (commissariat de Montrouge) pour infraction au décret-loi du 26 septembre 1939. Eugène Lafleur avait participé à la distribution de tracts de l’organisation clandestine. L’enquête policière concluait qu’il avait assisté à des réunions de l’organisation clandestine dans un champ à Issy-les-Moulineaux (Seine, Hauts-de-Seine), ainsi que chez un nommé Bernard.
Sur des papiers saisis à son domicile, il était fait mention d’un Comité populaire, de tracts diffusés… La police effectua une enquête de voisinage concernant Eugène Lafleur, il était écrit : « Les renseignements recueillis sur son compte, dans son entourage, sont excellents. Lui, sa femme et son fils passent pour des gens convenables, de bonne moralité. »
Le 4 février 1941, il a été interrogé par le commissaire de Montrouge. Il déclara être membre du Parti communiste depuis 1920, et affirma : « Je ne fais cependant pas de propagande depuis la dissolution du parti. » Il déclara : « Je n’ai jamais distribué de tracts […] J’estime n’avoir rien à me reprocher. […] Les tracts dont il s’agit étaient uniquement des tracts de propagande syndicale. »
Entendu le 15 février 1941 par un Juge d’instruction, il était assisté par Maître Georges Pitard. Il reconnaissait avoir « assisté il y a plusieurs mois à deux réunions chez Bernard, avec des camarades que je ne connaissais pas sauf Dorange. Il n’a pas été question de propagande communiste, mais seulement de nos revendications d’ordre syndical. » Il nia avoir reçu des tracts et d’en avoir distribué, il affirma : « Je ne sais rien de l’organisation d’un Comité populaire. J’en ai entendu parler au cours de deux seules réunions auxquelles j’ai assisté ; mais c’est tout. »
L’un d’un papier (scellé n° 4) mettait à mal ce qu’il affirmait. Il y était question de La Vie ouvrière et de tracts diffusés, de l’existence et de l’activité d’un Comité populaire.
Écroué à la Santé, condamné à six mois de prison le 19 mai 1941 par la 12e chambre correctionnelle de la Seine, à l’expiration de sa peine il fit l’objet, le 20 juin, d’un arrêté préfectoral d’internement administratif. Il s’évada du dépôt dans la nuit du 7 au 8 juillet avec une vingtaine d’autres militants communistes.
Envoyé à Brest (Finistère), il organisa l’Organisation spéciale puis les Francs-tireurs et partisans (FTP). Dissimulé par un pseudonyme, il travailla comme métallurgiste. En 1942, il devint responsable des FTP brestois. Il organisa et mena de nombreuses actions contre l’occupant : il fit partie, aux côtés d’Albert Abalain, du « tribunal du peuple », chargé d’éliminer le policier responsable de l’arrestation de l’ancien triangle directeur du PCF brestois. À partir de la fin septembre 1942, les arrestations à l’encontre des FTP se succédèrent et le 30, la police fit une descente chez Albert Rolland, qui fut arrêté. Eugène Lafleur, qui se trouvait avec lui, parvint à s’échapper, avant d’être rattrapé quelques jours plus tard. La police, sachant ses hautes responsabilités chez les FTP le tortura, dans l’espoir de recueillir un maximum d’informations. Après avoir été affreusement torturé, il fut livré aux Allemands.
Il a été interné au château de Brest puis à Rennes et à Fresnes.
Eugène Lafleur fut condamné à mort le 28 août 1943 par le tribunal militaire allemand de Paris pour sabotage et attentats contre la machine de guerre nazie. Il a été fusillé au Mont-Valérien le 17 septembre 1943 avec 18 autres communistes brestois.
Eugène Lafleur fut homologué sergent-chef des Forces françaises de l’Intérieur (FFI), et Interné résistant.
Après la guerre il a été inhumé dans le carré militaire avenue du Sud au cimetière parisien d’Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne), sur le monument des dix-neuf fusillés à Brest (Finistère), sur la plaque sur la plaque de l’Union fédérale de la métallurgie 94 rue Jean-Pierre Timbaud (XIe arr.), ainsi que sur la cloche en bronze au Mont-Valérien à Suresnes (Hauts-de-Seine).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article137918, notice LAFLEUR Eugène, Constant par Jean-Pierre Besse, Daniel Grason, version mise en ligne le 6 juillet 2020, dernière modification le 26 avril 2022.

Par Jean-Pierre Besse, Daniel Grason

Eugène Lafleur
Eugène Lafleur
Photo sur sa fiche de police, 1942.

SOURCES : AN Z/4/3 dossier n°37. – Arch. Dép. Finistère, 200 W 84 (exécutions). – Bureau Résistance GR 16 P 329253. – Georges-Michel Thomas et Alain Le Grand, Le Finistère dans la Guerre (1939-1945), t. 1, L’Occupation, p. 30873. – AVCC, Caen, B VIII 4 (Notes Thomas Pouty). – Biger Brewalan, René-Pierre Sudre, Les fusillés du Finistère 1940-1944, master 1, Université de Bretagne occidentale, 2009-2010. – État civil.

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