LE MEUR Joseph (instituteur)

Par Alain Prigent

Né le 21 août 1901 à Kergrist-Moëlou (Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor), mort le 20 avril 1980 à Paris (IVe arr.) ; instituteur ; résistant ; militant syndicaliste FUE ; conseiller municipal de Saint-Gilles-Vieux-Marché (1947-1953).

Joseph Le Meur était l’un des six enfants de Louis Le Meur, né en 1875, ouvrier boulanger en 1901, et de Marie Jeanne Jégou, lingère née en 1875. Son père devint ensuite propriétaire de sa boulangerie. Louis et Marie Jeanne Le Meur eurent la fierté de voir quatre de leurs fils accéder à la fonction d’instituteur.
François (né en 1903) et Louis (né en 1906) furent reçus à l’École normale d’instituteurs de Saint-Brieuc, Etienne (né en 1912) reçu à l’ENI de Vannes en 1929, obtint rapidement son exeat pour son département d’origine.

L’aîné, Joseph, fut reçu à l’ENI de Saint-Brieuc (promotion 1917-1920). Incorporé au premier régiment d’infanterie coloniale en avril 1921, il fut renvoyé dans ses foyers en avril 1923.

Il enseigna ensuite à Merléac (1923-1925), à Grâce-Uzel (1925-1926), puis à Plémy (1926-1928). Joseph Le Meur épousa Jeanne Hellequin, institutrice de l’enseignement public, le 11 août 1925 à Saint-Gilles-Vieux-Marché. Le couple eut trois enfants. La liste nominative de la commune de Saint-Gilles-Vieux-Marché (année 1936), consultée en ligne, indique la composition de la famille, avec à cette date, deux enfants Jacques (né en 1927 à Plémy) et Jeanne (née en 1930 à Saint-Gilles-Vieux-Marché).
Nommé à Saint-Gilles-Vieux-Marché en 1928, il fut promu directeur en 1931, et y termina sa carrière en 1956.

Militant syndicaliste, il siégea au conseil syndical du SMEL-CGTU (1928), syndicat regroupant des militants issus des courants de pensée anarcho-syndicaliste et communiste et farouchement opposé au Syndicat national des instituteurs et institutrices (CGT).

Classé inapte aux troupes à pied en septembre 1939, il fut affecté à la 16e compagnie d’ouvriers en mars 1940 puis affecté spécial au titre de l’Éducation nationale sur son poste en mai 1940.

Comme la majorité des enseignants de premier degré des Côtes-du-Nord, il s’opposa au régime de Vichy et à l’occupation nazie. Membre du Front national à la fin de 1942 ou au début 1943, il participa activement à la Résistance en proposant son logement de fonction aux dirigeants du FN et du PC clandestin comme Louis Pichouron puis à son cousin Jean Le Jeune. Fin décembre 1943, Louis Pichouron, de retour d’une rencontre à Pontivy (Morbihan) avec Yvon Raillat, un des responsables bretons de l’OCM, le sollicita afin qu’il l’aide à trouver des terrains propices aux futurs parachutages dans cette partie des Côtes-du-Nord. Quelques jours plus tard, Job Le Meur proposa un terrain à Saint-Mayeux.

Après le débarquement, avec Jean Quéré, menuisier, futur maire et conseiller général de Mûr-de-Bretagne, il mit en place un maquis basé dans la commune de Saint-Gilles-Vieux-Marché au milieu des bois de Quellennec, propriété de Hervé De Keranflec’h, ancien parlementaire et maire de la commune. Joseph Le Meur servit au sein du bataillon Valmy en août 1944 participant aux combats conduisant à la libération du Centre-Bretagne. Avec la compagnie commandée par Jean Quéré, il rejoignit le Front de Lorient au début du mois de septembre. Dans son dossier professionnel figure la citation à l’ordre de la Division soulignant son intervention au niveau de sa compagnie lors des combats lors des combats engagés du 15 septembre au 28 octobre 1944 à Sainte-Hélène. Le 21 octobre 1944, remplaçant le capitaine André Conan, Joseph Le Meur est intégré avec le grade de capitaine FFI au sein du 15e bataillon Le Du, commandé par le communiste Léon Razurel. Quelques jours plus tard, le 28 octobre 1944, Léon Razurel, grièvement blessé au bras par un éclat d’obus, demanda à Joseph Le Meur de le remplacer avant d’être évacué à l’hôpital d’Auray. Il participa ainsi à toute la campagne sur les Fronts de Lorient et de Saint-Nazaire. Il a, selon les autorités militaires, « rempli avec succès les missions qui lui ont confiées dans les sous-secteurs de Nostang et de la Vilaine. Pour ses faits d’armes il fut décoré de la Croix de guerre. Joseph Le Meur fut démobilisé le 10 août 1945 à Vannes avec le grade de sous-lieutenant. Il reprit dès la rentrée d’octobre la direction de son école à Saint-Gilles-Vieux-Marché.

Hervé De Keranflec’h, maire de la commune depuis 1904, un moment écarté pour sa participation aux institutions vichystes, fut cependant réhabilité et rétabli dans son mandat de maire en février 1945 pour son aide à la Résistance en 1944. Réélu en mai 1945 à la tête du conseil municipal, puis au conseil général en septembre 1945, il décéda en décembre 1946. En octobre 1947, dans un contexte de profonde division entre le PCF et la SFIO, Joseph Le Meur œuvra à la mise en place d’une liste communale des gauches républicaines où l’on trouvait le radical-socialiste Jean-Baptiste Burlot et le communiste Pierre Jégo. Joseph Le Meur fut élu et siégea au conseil municipal de Saint-Gilles-Vieux-Marché (1947-1953) dirigé par Jean-Baptiste Burlot. En 1953, il figurait également sur la liste d’Entente républicaine conduite par le maire sortant. Les services de la Préfecture le classaient comme « communiste » ainsi que Pierre Jégo et Henri Blanchard. La liste fut battue par la liste MRP conduite par Ange Bertho.

Selon son fils cadet, Yves Le Meur, Joseph Le Meur avait des opinions de gauche mais n’appartint jamais au Parti communiste. Son cousin Jean Le Jeune, secrétaire à l’organisation du PCF en 1946 puis premier secrétaire de la puissante fédération du PCF des Côtes-du-Nord en 1947, membre du comité central, consulté par téléphone le 20 juillet 2020, a précisé que Joseph Le Meur, bien que très proche du PCF, n’avait pas sa carte du parti, contrairement à son frère Louis.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article138707, notice LE MEUR Joseph (instituteur) par Alain Prigent, version mise en ligne le 7 novembre 2011, dernière modification le 20 septembre 2022.

Par Alain Prigent

SOURCES : Arch. Dép. Côtes d’Armor, Etat-civil de la commune de Kergrist-Moëlou (année 1901) et liste nominative de la commune de Saint-Gilles-Vieux-Marché (année 1936). — Arch. dép. Côtes d’Armor, 1T1561, dossier professionnel versé par l’inspection académique ; 68J1 (Fonds Roger Huguen, liste des instituteurs engagés dans la Résistance) ; 1140W17 et 1140W19 (Epuration 1944 et 1945) ; 1192W2 (Elections municipales 1947) et 1192W5 (Elections municipales 1953) ; 1192W78 et 1192W85 (Situation politique 1948). ─ Jean Le Jeune, Itinéraire d’un ouvrier breton, chez l’auteur, 2002 ; Louis Pichouron, Mémoire d’un partisan Breton, Presses universitaires de Bretagne, 1969 ; Alain Prigent, Les instituteurs des Côtes-du-Nord sous la IIIe République (Laïcité, amicalisme et syndicalisme), Editions Astoure, 2005 ; Les Bataillons FFI des Côtes-du-Nord sur les poches de l’Atlantique (Septembre 1944-mai 1945), Brochure de 36 pages rédigée par Léon Razurel et éditée par le Comité Départemental de l’ANACR, 1995. — Entretien avec Joseph Le Meur en 1972 à son domicile de Caurel. ─ Entretien téléphonique le 20 juillet 2020 avec Jean Le Jeune, responsable départemental des FTP en août 1944. ─ Note d’Yves Le Meur, fils cadet de Joseph Le Meur.

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