Par Louis Botella
Né le 30 novembre 1912 à Peyrilles (Lot), mort le 27 janvier 1983 à Montfaucon (Lot) ; postier ; syndicaliste CGT puis Force ouvrière (FO) ; secrétaire général de la Fédération syndicaliste FO des PTT ; secrétaire confédéral (1956-1974) ; résistant ; adjoint au maire de Clermont-Ferrand, maire de Peyrilles (1953-1983).
Camille Mourgues, issu d’une famille modeste de treize enfants dont le père fut cantonnier, entra au sein de l’administration postale en 1930 en qualité de surnuméraire. Sa mère était courutière. Il adhéra et milita immédiatement au sein du puissant syndicat CGT des agents du Service général.
Mobilisé en 1939, il fut fait prisonnier. Il s’évada d’un camp de prisonnier en 1940 puis il participa activement aux actions de la Résistance tant au niveau des PTT (Mouvements unis de la Résistance - MUR PTT) qu’en Auvergne. Clandestin, il rejoignit le maquis d’Auvergne. Commandant FFI sous le nom de Commandant Valentrey, il fut grièvement blessé lors des combats.
Le 20 janvier 1944, il siégea au nom de la CGT Comité départemental de Libération réuni à Aubière (Puy-de-Dôme). Alphonse Rozier, alias Denise, représentant du Front national, contesta le fait que Valentré représente la CGT au lieu du Mouvement ouvrier français (MOF). Mais ayant des consignes de la direction du PCF pour que l’unité de la Résistance aboutisse, Rozier et Charles Eldin, représentant du PCF, furent amenés à céder.
À la Libération, il devint secrétaire général du Comité de Libération de Clermont-Ferrand, puis maire adjoint de cette ville.
Au plan professionnel, il s’engagea à nouveau dans l’action syndicale au sein des PTT à Clermont-Ferrand. En août 1946, il fut le responsable du comité de grève de Clermont-Ferrand et l’un des meneurs du comité national de grève au sein des PTT. Ce comité national de grève rassembla des militants CGT, notamment à Lille, Clermont-Ferrand, Bordeaux puis Lyon et Marseille, refusant de reprendre le travail, malgré l’ordre de reprise lancé par la direction de la Fédération postale CGT après une grève de quelques heures.
N’ayant trouvé aucun accord avec la direction de cette fédération, ces militants mirent en place une structure syndicale provisoire. Le comité national de grève, au sein duquel Camille Mourgues eut une grande activité, se transforma, quelques mois après, en Comité d’action syndicaliste des PTT en dehors de la Fédération postale CGT. D’autres militants, regroupés autour des "Amis du Combat syndical", courant animé par Dominique Grimaldi, refusèrent de les suivre dans cette démarche pensant pouvoir encore changer la CGT de l’intérieur en y restant.
En juillet 1947, le Comité d’action syndicaliste se transforma en Fédération syndicaliste des travailleurs des PTT dont le secrétaire général fut Camille Mourgues. Lors de la création de FO, la Fédération syndicaliste y fut admise alors que de son côté, Dominique Grimaldi et ses amis constituèrent la Fédération indépendante FO des PTT. Il fallut toute l’énergie de Léon Jouhaux et de la direction provisoire de la nouvelle confédération pour que les dirigeants de ces deux fédérations trouvent un terrain d’entente et acceptent de ne constituer qu’une seule organisation. Cela ne fut réalisé qu’à la veille du congrès constitutif de la confédération FO dans des conditions très difficiles. Selon Alain Bergougnoux, la première direction fédérale, animée par Camille Mourgues, ne fut constituée qu’avec des responsables issus de la Fédération syndicaliste. Ce n’est qu’en 1950 que Dominique Grimaldi et ses amis furent représentés au sein de cette instance. Camille Mourgues resta à la tête de sa fédération pendant près d’une quinzaine d’années.
Il fut élu en avril 1948 à la commission exécutive confédérale. En octobre 1956, il devint secrétaire confédéral. Il siégea au bureau confédéral jusqu’en 1974.
Lors du congrès confédéral d’octobre 1956, il fut l’un des trois orateurs, avec Fernand Manchon (UD. de Constantine) et Mohamed Kellal (PTT Ile de France), choisis pour défendre le texte majoritaire proposé au sein de la sous-commission sur l’Algérie.
C. Mourgues déclare : « Oui, sans être des nationalistes, nous pensons encore que la France, fidèle à ses traditions et à ses missions, malgré les regrettables errements du passé, nous pensons encore que notre pays, épris de liberté et de fraternité, plus particulièrement dans les rangs de la classe ouvrière, peut encore accomplir en Algérie, ds nos trois départements français, une œuvre d’émancipation et une œuvre de bonheur pour les peuples de ce pays » (Compte-rendu sténographié des débats du 5e congrès de la CGT-FO, 24-27 oct. 1956, p. 252).
Le texte de la minorité, soutenu par Alexandre Hébert (UD de Loire-Inférieure, Loire-Atlantique), Adolphe Sidro (Fédération des employés et cadres) et Diagne (PTT Sénégal et AOF (Afrique occidentale française), qui sans préjuger du statut futur de l’Algérie, se prononça en faveur de la reconnaissance du droit du peuple algérien à disposer de lui-même, d’un cessez-le-feu immédiat et de négociations entre les parties. Le texte minoritaire obtint 2 225 voix contre 9 522 en faveur du texte majoritaire.
Camille Mourgues fut également membre du Conseil économique et social ainsi que, pendant quinze ans, du Conseil économique et social européen. Il participa aussi aux réunions des instances dirigeantes de la Confédération européenne des syndicats (CES) et de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL).
En mai 1948, il assista, avec d’autres syndicalistes français, notamment avec Roger Lapeyre*, Raymond Le Bourre*, René Lhuillier*, Jean Mathé*, au congrès de l’Europe à La Haye (Pays-Bas) qui donna naissance à la création du Mouvement européen international.
Il assuma, entre 1953 et son décès, la fonction de maire de son village natal.
Camille Mourgues fut titulaire de plusieurs décorations : Légion d’honneur et Médaille de la Résistance à titre militaire, Ordre national du Mérite de la République fédérale d’Allemagne.
Il s’était marié à Clermont-Ferrand le 1er août 1931 avec Marie Delmas.
Sa fille Janine Barbet-Mourgues, née vers 1933 également à Peyrilles, décéda en avril 1995, à l’âge de 62 ans. Elle fut employée aux PTT et elle milita comme son père au sein de FO.
Par Louis Botella
SOURCES : Jeanne Siwek-Pouydesseau, « Les cols blancs fonctionnaires et employés dans la CGT-FO », dans Michel Dreyfus et alii, La naissance de Force Ouvrière, Presses Universitaires de Rennes, 2003, p. 131. — Force Ouvrière, hebdomadaire de la CGT-FO, 1948-1974, FO Hebdo, 2 février 1983, 5 mai 1993. — FO Com, octobre 2011. — Comptes rendus des congrès confédéraux de 1948 à 1969. — Alain Bergougnoux, « Force ouvrière », Éditions du Seuil, 1975. — Denis Lefebvre et UD FO de la Seine-Saint-Denis,19 décembre 1947, Force ouvrière, Bruno Leprince éditeur, 1997. — Jean-Michel Guieu et Christophe Le Dréau (sous la direction de) in "Le Congrès de l’Europe à La Haye" (1948-2008)", Editions Peter Lang, 2008 .— Archives Alphonse Rozier. Notes sur le comité de libération d’Aubière.