BONJEAN Alfred.

Par Jean Puissant

Quaregnon (pr. Hainaut, arr. Mons), 19 novembre 1901 – Saint-Ghislain (pr. Hainaut, arr. Mons), 31 août 1992. Manœuvre, mineur, piocheur aux chemins de fer, etc., militant syndical, militant à la Jeune garde socialiste, permanent de la Centrale générale des ouvriers de la construction, de l’ameublement et des industries diverses, résistant, secrétaire de la Fédération régionale des mutualités socialistes, conseiller communal, échevin puis bourgmestre de Quaregnon, député du Parti socialiste belge représentant l’arrondissement de Mons, sénateur provincial.

Fils de Alexis Bonjean, ouvrier mineur socialiste, né à Quaregnon le 15 avril 1865, et de Adèle Bresart, servante à Bruxelles (pr. Brabant, arr. Bruxelles ; aujourd’hui Région de Bruxelles-Capitale) jusqu’il y a six mois avant son mariage célébré en sa commune natale le 24 mai 1890, née à Quaregnon le 16 mars 1867, Alfred Bonjean est engagé, après ses études primaires, à l’âge de douze ans,dans une verrerie de Saint-Ghislain. Avec le déclenchement de la Première Guerre mondiale, il devient manœuvre aux rivages des Produits de Flénu (charbonnage). De 1916 à 1918, il est mineur et, de 1918 à 1921, piocheur aux chemins de fer belges. En 1921, il est embauché à la Faïencerie Henri Meyer, anciennement Auguste Mouzin, de Wasmüel (aujourd’hui commune de Quaregnon) ; il y travaille à l’atelier de modelage jusqu’en 1926.

À l’âge de dix-huit ans, Alfred Bonjean reprend des études à l’école industrielle où il obtient un diplôme de comptabilité commerciale. En 1926, il est sélectionné pour suivre un stage d’une semaine à l’École ouvrière supérieure (EOS). Son directeur, Léon Delsinne*, tente de le garder à l’école mais le salaire du jeune homme est nécessaire à sa famille. En 1928, la faïencerie refuse de réembaucher Bonjean. Il devient alors permanent à la Centrale régionale du bâtiment et des industries diverses. C’est cette Centrale qui verse le minerval et dédommage les parents par une mensualité de 250 francs durant l’année d’étude. Il obtient, en 1930, son diplôme d’assistant social.

Dès 1920, Alfred Bonjean milite à la Jeune garde socialiste (JGS) du Rivage à Quaregnon. Il s’agit d’une importante section dont il est le secrétaire de 1920 à 1926. Il fait partie du Comité central de la JGS de Quaregnon puis en devient le secrétaire. En 1932, il devient trésorier de la Fédération JGS du Borinage dont il est le président en 1936.

L’activité de Alfred Bonjean prend une dimension régionale à la fin de ses études lorsqu’il devient propagandiste syndical. Son militantisme politique se manifeste au sein de la JGS qui devient un élément marquant de la Fédération régionale du Parti ouvrier belge (POB), à partir de 1927. Elle compte alors 2.489 membres, 4.000 en 1931. La JGS est, en effet, face à la direction fédérale, un important élément de contre-pouvoir. Doctrinalement, elle rejette le réformisme pratiqué depuis la guerre et réutilise systématiquement le concept de lutte de classes d’autant plus que la crise commence à exercer ses effets dès 1931. La JGS réaffirme également ses positions antimilitaristes anciennes et critique la politique de défense nationale à laquelle le parti accorde globalement son appui depuis 1914.

Politiquement, la JGS souligne la nécessité de la lutte antifasciste et de l’unité ouvrière face à l’arrivée au pouvoir d’Hitler en 1933, à l’insurrection nationaliste en Espagne en 1936. Mais surtout alors qu’une partie importante du personnel dirigeant du POB régional s’est mise en place avec la formation du parti et de ses organisations, coopératives surtout, la JGS constitue un important levier de renouvellement des cadres en 1932-1936. Sa direction n’est d’ailleurs pas toute jeune non plus. Alfred Bonjean joue un rôle important à ce niveau puisqu’il s’oppose à la radicalisation du mouvement et au rapprochement avec la Jeunesse communiste (JC) ainsi qu’à l’influence de Walter Dauge*.
Alfred Bonjean est élu conseiller communal à Quaregnon lors du scrutin d’octobre 1932 et devient échevin de l’Instruction en 1934, à la suite du décès du bourgmestre Doublet. Il personnifie également la montée des militants syndicaux à l’intérieur des structures du Parti ouvrier belge (POB) au détriment de l’influence majoritaire jusqu’alors des dirigeants de coopérative. Il accède au Comité fédéral du parti en 1936 lors de la scission daugiste.

Durant la Seconde Guerre mondiale, en 1940, Alfred Bonjean doit retravailler dans le privé. Il est engagé à Cérabel à Baudour (aujourd’hui commune de Saint-Ghislain) jusqu’en 1944. Après l’exode, il rencontre Émile Cornez, R. Toubeau* et Georges Plumat*. Ils décident d’éditer la Renaissance nationale, périodique distribué dans la région. Contactés par C. Van Heukem*, ils s’inscrivent dans l’activité socialiste nationale, diffusent l’Espoir. Bonjean reconstitue les organisations d’avant-guerre. À partir de 1942, il tente de rétablir le contact entre les divers syndicats. Début 1944, recherché par les Allemands, il entre dans la clandestinité et vit à Blaugies (aujourd’hui commune de Dour, pr. Hainaut, arr. Mons) en bordure du bassin minier.

Après la guerre, Alfred Bonjean est considéré comme un des principaux dirigeants fédéraux de Mons. De 1944 à 1966, il est secrétaire de la Fédération des mutualités socialistes de Mons-Borinage. En 1966, il en devient le président. Élu député suppléant en 1946, en 1949 et, en 1950, Bonjean devient député, en 1951, à la suite du décès de L. Piérard*. Il est élu sénateur provincial du 11 juin 1958 et le reste jusqu’au 20 février 1961. Il représente ensuite l’arrondissement de Mons-Soignies au Sénat de 1961 à 1965.
Ses interventions parlementaires portent sur les problèmes mutualistes : gratuité des soins médicaux aux pensionnés, lutte contre la tuberculose et le cancer, situation des mutualités, ainsi que sur les problèmes régionaux, l’insuffisance des moyens de communication dans le Borinage par exemple.

Mais c’est comme municipaliste que l’activité de Alfred Bonjean se manifeste surtout. Premier échevin faisant fonction, il succède à Georges Plumat*, décédé, comme bourgmestre de Quaregnon le 19 avril 1957 (arrêté royal du 19 avril 1957, publié au Moniteur belge du 6-7 mai 1957. Lors des élections communales du 12 octobre 1958, chef de file de la liste socialiste, il obtient le plus grand nombre de voix de préférence (641 votes). Il est nommé bourgmestre par arrêté royal du 16 décembre 1958. Il le restera jusqu’en 1976. Il contribue à assainir les finances communales et patronne un important programme de construction de logements sociaux par la société, Le Logis quaregnonnais. Il se retire définitivement de l’activité politique publique en 1976.

Alfred Bonjean est chevalier de l’ordre de Léopold et de l’ordre de la Couronne, titulaire de la Croix de guerre avec palmes, de la médaille de la résistance. Il collabore à diverses publications, Le farceur, organe patoisant (sous les pseudonymes de Jean-Fred Bonal et Fracacelle), à L’Avenir du Borinage, à L’Effort mutualiste, au Peuple, à PSB contact et à Quaregnon dont il est l’éditeur responsable.
Marié à Laura Louisa Flament, née à Quaregnon le 15 janvier 1905 depuis le 18 février 1928, Alfred Bonjean a un fils, Francis, né à Quaregnon le 22 mai 1928, qui sera régent en langues germaniques.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article139369, notice BONJEAN Alfred. par Jean Puissant, version mise en ligne le 1er mars 2012, dernière modification le 21 septembre 2023.

Par Jean Puissant

SOURCES : Papiers personnels de Francis Drugman – PUISSANT J., L’évolution du mouvement ouvrier socialiste dans le Borinage, Gembloux, 1993 – Notice réalisée par Dominique Fievet, section Journalisme de l’Université libre de Bruxelles, 1984.

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