LE BRETON Fernand, Jean, Robert

Par Daniel Grason

Né le 14 février 1898 à Lisieux (Calvados), mort le 30 juin 1945 à l’hôpital Bichat à Paris XVIIIe arr. ; ouvrier ajusteur outilleur ; militant communiste ; emprisonné ; déporté.

Fils de Ferdinand et d’Albertine, née Jouenne, Il fit son service militaire dans la marine, en 1917, matelot il naviguait en mer Noire, les échos de la Révolution d’octobre éveillèrent Fernand Le Breton à la politique. Il épousa Suzanne Morel, le couple eut deux enfants, la famille demeurait 12 avenue Alexandre-Maistrasse à Suresnes (Seine, Hauts-de-Seine). Il fut ouvrier ajusteur outilleur dans l’aéronautique chez Morane-Saulnier à Puteaux, à la Société française d’engrenages de précision à Courbevoie. Enfin du 5 août 1940 au 31 janvier 1941chez Vélocar à Puteaux, cette entreprise fabriquait des quadricycles à deux places à propulsion humaine, l’engin conçu par Charles Mochet eut du succès du fait des difficultés d’approvisionnement en carburant pendant la guerre.
Membre du Parti communiste, il milita sur son lieu d’habitation ainsi que chez Morane-Saulnier, la police le repéra dans cette entreprise dès 1937. L’interdiction du parti communiste en septembre 1939, ne le découragea pas, le 9 janvier 1940 il était arrêté dans une rue par des policiers de Courbevoie. Il portait sur lui tracts et papillons : « Nous ne voulons pas de syndicats dociles », « Rendez l’Humanité », « À bas la guerre ». Il fut incarcéré à la Santé, le 3e Tribunal militaire de Paris le condamnait le 27 février à deux ans de prison et cent francs d’amende pour infraction au décret-loi du 26 septembre 1939. Transféré à la prison d’Orléans (Loiret), le 10 juin 190 du fait de l’occupation allemande, il fut libéré.
La Brigade spéciale d’intervention (BSi) du commissariat de Puteaux l’arrêta le 14 février 1941 à son domicile. Les policiers saisirent des exemplaires ronéotés de L’Éveil de Suresnes-Puteaux titrait « À bas la répression ! Le Commissariat de Puteaux est une officine de barbarie, où l’on torture les communistes », le journal imprimé La Voix de Paris-Ouest : « Cinq mois après l’armistice, où en sommes-nous ? », « Union de la Nation derrière un gouvernement du peuple pour assurer la liberté et l’indépendance de la France », « À Staline, Au Parti Bolchevik ! ».
Interrogé dans les locaux du commissariat de Puteaux, Fernand Le Breton était battu à plusieurs reprises. Il fut incarcéré à la prison de la Santé, son état physique inquiéta son avocat, dès le 6 septembre 1941, il écrivit à l’Avocat général de la Section spéciale sur son état de santé. Le 18 septembre, il demanda sa « mise en liberté provisoire (au régime de la Détention administrative) ou le transfert à l’infirmerie des prisons de Fresnes à bref délai. » Troisième courrier le 4 octobre du directeur des prisons de Paris à l’Avocat général de la Section spéciale avec transmission d’un certificat médical du médecin de la prison de la Santé « examiné à ce jour » Fernand Le Breton était « très amaigri et déprimé avec des troubles visuels. »
Il comparut le 21 octobre 1941 en compagnie de dix-neuf autres inculpés devant la Section spéciale de la Cour d’appel de Paris. Fernand Le Breton fut condamné à dix ans de travaux forcés pour activité communiste. Incarcéré à Fresnes, le 1er mai 1942 il était envoyé à la prison de Fontevrault (Loir-et-Cher), numéro d’écrou 2015. Le 23 octobre 1943, il fut transféré à la prison de Blois (Loir-et-Cher). Á une date inconnue, il quitta la prison pour le camp d’internement de Compiègne.
Le 28 février 1944, il était dans un convoi de quarante-neuf hommes regroupés dans des wagons de voyageurs aux fenêtres grillagées. Les wagons étaient accrochés au train de la ligne régulière vers l’Allemagne. Les détenus arrivèrent le lendemain à la gare de Sarrebruck d’où ils furent conduits au camp de Neue Bremm. Ils y restèrent un mois avant d’être tous transférés au camp de concentration de Mauthausen (Autriche). Dans ce transport Paul Collette qui tira le 27 août 1941 contre Pierre Laval à Versailles, Artur London, et trois résistants impliqués dans le même groupe que Fernand Le Breton : Jean Gourdoux, Hippolyte Génard et Eugène Toulgoat.
Tous étaient condamnés à plus de sept ans de travaux forcés, condamnés Nacht und Nebel, Nuit et Brouillard « NN », ce qui signifiait destinés à disparaître, ils resteront un mois à Neue Bremm, seront transférés à Mauthausen (Autriche). Fernand Le Breton matricule 60725 sera affecté au Kommando Passau II, où les détenus montaient des armes, il sera ensuite envoyé à Flossenbürg (Allemagne). Il sera rapatrié sanitaire le 29 juin 1945, aussitôt hospitalisé à Bichat, il y mourut le lendemain à 8 heures 45 du matin.
Ses obsèques eurent lieu le 7 juillet, le corps fut exposé au siège de la section communiste de Suresnes, trois cents personnes environ étaient présentes dont ses anciens camarades de chez Morane-Saulnier. L’inhumation eut lieu au nouveau cimetière, deux adjoints au maire Giraud et Lechevallier étaient présents, Paul Pagès, maire communiste de la ville prononça l’éloge funèbre.
Son épouse Suzanne témoigna devant la commission d’épuration de la police, elle déclara que son mari : « Emmené au commissariat de Puteaux, il a été au cours d’interrogatoires sauvagement frappé. Après sa détention de 48 heures au commissariat, il a été conduit au dépôt, puis transféré à la prison de la Santé où le docteur Paul a constaté les coups qu’il reçut au commissariat de Puteaux. » (Section d’épuration de la police rapport du 4 août 1945). Elle déposa plainte contre les policiers.
Par décision du Ministère des anciens combattants du 6 mai 1946, la mention « Mort pour la France » fut attribuée à Fernand Le Breton.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article139461, notice LE BRETON Fernand, Jean, Robert par Daniel Grason, version mise en ligne le 5 janvier 2018, dernière modification le 11 février 2018.

Par Daniel Grason

SOURCES : Arch. PPo. CB 90.31 (main courante du commissariat de Puteaux). BA 2057, PCF carton 18, 77W 85 – Bureau Résistance (pas de dossier). – Livre-Mémorial, FMD, Éd. Tirésias, 2004. – Roger Poitevin, Abbaye-Bagne de Fontevraud 1940-1944, Éd. AFMD 49, 2009. – État civil, Paris XVIIIe.

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