LONGUENESSE Max, Léon

Par Alain Dalançon, Jacques Girault

Né le 16 juillet 1913 à Arques (Pas-de-Calais), mort le 9 juillet 1984 à Versailles (Yvelines) ; professeur agrégé d’anglais ; militant syndicaliste du SNES ; militant communiste en Seine-et-Oise.

Photo à l’automne 1979.
Photo à l’automne 1979.

Fils d’un comptable mort de maladie en 1914, Max Longuenesse, élevé par sa mère qui avait trois autres enfants, fut baptisé. Il effectua sa scolarité secondaire au lycée Alexandre Ribot de Saint-Omer (Pas-de-Calais) et, après l’obtention du baccalauréat « série philosophie » en 1930, fut élève en Première supérieure (1930-1932) au lycée Faidherbe à Lille. Il effectua des études d’anglais à la faculté des lettres de Lille (certificats de littérature, philologie et de littérature classique obtenus en 1932, d’études pratiques en 1933), tout en étant maître d’internat aux collèges d’Arras (1932-1933). Puis, devenu licencié ès lettres en 1933, il séjourna comme lecteur de français à Airdrie Academy à Glasgow (Ecosse), de novembre 1933 à juin 1935. Il reprit ensuite un poste de surveillant au collège d’Armentières (octobre-novembre 1935) puis au lycée Faidherbe à Lille (1935-1936). Licencié depuis 1933, il fut nommé répétiteur, puis professeur-adjoint au lycée de Saint-Omer (octobre 1936-novembre 1938). Titulaire d’un diplôme d’études supérieures en 1937, il échoua à l’écrit de l’agrégation d’anglais en juillet 1938.

Max Longuenesse, pacifiste, commença son service militaire en novembre 1938 à Mourmelon (Marne) comme élève officier de réserve dans un régiment de zouaves. Mobilisé à la déclaration de guerre dans l’Est de la France comme sous-officier, il fut fait prisonnier à Dunkerque, le 4 juin 1940, et envoyé au stalag IX A à Marburg (Allemagne). Ouvrier agricole en Hesse (août-octobre 1941) puis « transformé » à la fin de 1943 ou au début de 1944, il servit d’interprète dans une usine d’armement à Kassel où travaillaient des requis du STO. Travaillant aux cuisines, il appartenait à un réseau de résistance qui faisait passer, par l’intermédiaire d’un officier allemand, des renseignements aux Britanniques. Selon son témoignage, il accompagnait en tant qu’interprète, un convoi de travailleurs STO malades, rapatriés en France, quand les quinze membres du réseau furent arrêtés puis tous « condamnés à mort sans jugement par le SD pour « atteinte à la sûreté du Reich » en février 1945. Trois furent enfermés à la prison centrale de Kassel (Hesse) et 12 à la Zuchthaus de Kassel-Wehlheiden ; ces derniers, dont Longuenesse, furent transférés le 17 mars à l’Arbeitserziehungslager de Breitenau où ils furent détenus jusqu’au 28 mars. Le 29, les trois déportés incarcérés à la prison centrale de Kassel furent fusillés à Guxhagen. Le directeur du camp de Breitenau refusa de livrer aux SS ses prisonniers, qui furent acheminés par train au camp de Buchenwald. Le 7 avril, Longuenesse fut transféré vers Dachau par convoi (un des « trains de la mort ») qui arriva le 28 avril 1945, la veille de la libération de ce camp. Après avoir été soigné pour le typhus et la tuberculose au sanatorium « Bir Hakeim » en Forêt noire, il rentra en France en mai 1946. Démobilisé le 25 juin 1946, réformé définitif avec une pension temporaire de 50 %, il fut maintenu en congé de longue durée, puis de réintégration, avec traitement intégral, jusqu’en octobre 1948, tout en étant administrativement adjoint d’enseignement au collège de Saint-Omer

Max Longuenesse se maria en août 1948 au temple protestant à Dieulefit (Drôme) avec Madeleine Bertrand, (1922-2011), originaire de cette commune, alors étudiante. Le couple eut six enfants (quatre filles et deux garçons).

Max et Madeleine Longuenesse, résidant au collège franco-britannique de la Cité universitaire, boulevard Jourdan, furent tous deux reçus à l’agrégation d’anglais en 1948, lui parmi les trois candidats bénéficiant du classement spécial pour les victimes de la guerre. Le couple fut nommé au lycée de Roanne d’octobre 1948 à 1950. Puis ils habitèrent à Chartres jusqu’en 1954. Il avait obtenu sa mutation à Paris, au lycée Jacques Decour en 1950 puis, pour se rapprocher de la gare Montparnasse, au lycée Buffon en 1951. Elle avait été mutée au lycée de jeunes filles de Chartres. Il demanda sa nomination à Versailles en 1959 et enseigna l’anglais au lycée Hoche, dans les classes préparatoires aux grandes écoles scientifiques, jusqu’à sa prise de retraite pour invalidité en 1971.

La famille déménagea à Versailles en 1954. Madeleine Longuenesse, après avoir suspendu ses activités d’enseignement en 1954, à la naissance de son troisième enfant, reprit un poste au lycée La Bruyère à Versailles en 1959.

Max Longuenesse adhéra au Parti communiste français en 1946 pendant sa convalescence en Forêt Noire. Il fut traduit devant le tribunal correctionnel pour participation à la manifestation interdite organisée le 29 mai 1952 à Chartres, le lendemain de celle de Paris contre le général Ridgway. Participaient aussi à la manifestation René Deleplace, professeur au lycée Marceau et Maurice Perche, instituteur, ainsi qu’un adjoint d’enseignement du lycée, Jean Mottet. Écroué à la prison de Chartres, il comparut avec Mottet, devant le Tribunal correctionnel, pour « violences et outrages à agents de la force publique ». Il était assisté de Maître Amblard, avocat à Paris, et le compte rendu de l’audience du Tribunal civil de Chartres, du 11 juin 1952, ne mentionna aucune réaction de l’accusé. Pourtant la presse syndicale indiqua qu’il avait plaidé « non coupable » et assuré lui-même sa défense. Il fut condamné à dix jours de prison avec sursis et le ministère suspendit Longuenesse par arrêté du 6 juin 1952 « avec traitement intégral » par le ministre de l’Éducation nationale, André Marie, ainsi que Mottet. Il demanda à reprendre ses cours dès le 14 juin. Réintégré le 4 octobre 1952, il fut traduit devant le Conseil académique de Paris à la demande du ministre. Le Conseil, le 4 décembre, l’acquitta par vingt voix contre six. Le ministre, le 23 décembre 1952, fit appel a minima devant le Conseil supérieur de l’Éducation nationale, Ces cas, liés à d’autres (Albert Ayache au Maroc, Dichamp à Clermont-Ferrand, Bellefroid à Calais, [Jean Jaffré-<88214] à Philippeville, Guy Serbat à Chartres…), entraînèrent une vigoureuse protestation du bureau national du Syndicat national de l’enseignement secondaire au nom de la défense des libertés universitaires et furent cités en exemples de « sanctions arbitraires » lors de la journée de défense des libertés organisée par la FEN le 5 février 1953, contre le projet gouvernemental de réforme administrative et de création d’un statut particulier du corps enseignant. Le 3 mars 1953, le CSEN, estima, à une large majorité, « qu’il n’y a pas lieu d’infliger à M. Longuenesse aucune des sanctions disciplinaires qu’il a qualité pour prononcer. »

Militant du SNES, Max Longuenesse s’éleva vigoureusement dans L’Université syndicaliste du 1er février 1954, contre un projet ministériel soutenu par le président de l’association des langues modernes visant à généraliser l’enseignement de l’anglais dans le primaire, dont le but réel était, selon lui, « d’assujettir plus étroitement le destin de la France à celui des pays anglo-saxons ».

Membre du comité de la section communiste de Versailles dans les années 1960, il fut candidat en 1967 aux élections pour le conseil général dans le canton Versailles-Nord ; il arriva en troisième position avec 1 713 voix au premier tour et en deuxième position, au deuxième tour, avec 3 036 voix. Il fut d’autre part au moins deux fois candidat aux élections municipales à Versailles.

Max Longuenesse, membre de l’Union rationaliste, faisait partie de la commission de politique extérieure (la « Polex ») auprès du comité central du PCF dans le collectif « Grande-Bretagne » puis participa à la création, au début des années 1970, du collectif « États-Unis », à la demande de la direction du PCF. Il fut le responsable de ce collectif pendant quelques années. Traducteur pour le PCF, il accompagna le secrétaire général du PCF Georges Marchais dans quelques voyages. Lors des fêtes de l’Humanité, il participait, avec d’autres anglicistes communistes, à l’animation du stand du journal communiste britannique Morning Star.

Son épouse signa l’appel, initié par Daniel Karlin et Tony Lainé, pour la réunion d’un 26e congrès extraordinaire du PCF, publié dans Le Monde, le 2 avril 1986.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article139556, notice LONGUENESSE Max, Léon par Alain Dalançon, Jacques Girault , version mise en ligne le 6 février 2012, dernière modification le 2 mai 2021.

Par Alain Dalançon, Jacques Girault

Photo à l'automne 1979.
Photo à l’automne 1979.
Photo dans l'immédiat après-guerre
Photo dans l’immédiat après-guerre

SOURCES : Arch. Nat., F17/30351/B. — Arch. com. Versailles, 2 Mi 202. — Archives du comité national du PCF. — Renseignements fournis par les enfants de l’intéressé. — Fondation pour la mémoire de la Déportation, Le livre mémorial..,op. Cit.. — L’Université syndicaliste, L’Enseignement public. — Notes de Jean-Pierre Besse.

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