SZYMANSKI Edmond

Par Bruno Béthouart

Né le 8 février 1921 à Recklinghausen (Allemagne) ; employé des mines ; trésorier de la Fédération nationale des mineurs CFTC puis secrétaire général et président.

Originaire d’une cité minière de la Ruhr, le jeune polonais arriva en France en 1922 où son père continua d’exercer la profession de mineur. Déplacé en territoire allemand à 18 ans, il avait choisi de venir en France. Le fils suivit les cours de l’école pratique de Denain, puis en 1938, il fut embauché, pour les travaux du fond, à la fosse Roeulx, près de Valenciennes, mais l’ingénieur responsable du puits préféra l’affecter au bureau administratif. À l’arrêt de la fosse Roeulx, en avril 1939, il fut transféré à la fosse Saint-Marck où il effectua une période de quatre mois au fond, avant de réintégrer les services administratifs. En 1943, il fut muté à la Mécanographie, mise en place pour effectuer les calculs de la paie des 20 000 agents que comptait la compagnie d’Anzin à l’époque. Militant de la JOC, il se maria le 17 avril 1944 à Escaudain avec Henriette Dericke née le 2 septembre 1922, fille d’un entrepreneur : le couple fonda une famille de quatre enfants. Edmond Szymanski avait adhéré à la CFTC dès 1938 et devint rapidement le responsable de sa section. À la Libération, après une conversation avec l’abbé Dubois, aumônier du travail, et sur proposition de Louis Delaby (voir ce nom), il fit partie de l’équipe des permanents en étant rattaché au départ au secteur de Valenciennes dès octobre 1946. L’année suivante, Joseph Sauty (voir ce nom) lui demanda de venir au siège de la Fédération des mineurs à Lens. Comme il continuait d’habiter Escaudain, il fit ainsi chaque jour en moto le trajet entre sa commune de résidence et le siège lensois des mineurs CFTC. Il prit en charge sous la direction de Louis Delaby le suivi des employés de la mine et rapidement
remplaça Joseph Sauty en tant que trésorier de la fédération. Il participa en janvier 1947 à la mise en place de la convention collective des ETAM (Employés, Techniciens et Agents de Maîtrise) du Nord-Pas-de-Calais.

En octobre et novembre 1947, lors des grèves dans les mines, Edmond Szymanski fut chargé de faciliter les contacts de Jules Catoire (voir ce nom) et de Taix, chef de cabinet du ministre de l’Industrie et du Commerce, Robert Lacoste, qui, à la demande de Robert Schuman, étaient venus se rendre compte de la situation d’abord dans le Valenciennois puis à la préfecture d’Arras. La famille Szymanski vint s’installer à Lens en 1952 au 19 de la rue Diderot, juste à côté du siège de la Centrale sise au 21 où il emménagea en 1963, au départ de la famille Delaby, lorsque celui-ci prit sa retraite. Pendant 35 ans, il occupa ces locaux à côté du logement de René Salley, directeur de l’imprimerie de la Centrale fondée par le syndicat chrétien à la Libération. Iil géra les finances du syndicat, passant directement de ses appartements familiaux à son bureau de trésorier et profitant des moments de détente pour faire des travaux de restauration ou d’aménagement des locaux du syndicat.

Lors du congrès de la Fédération des mineurs CFTC à Saint-Étienne, du 31 août au 3 septembre 1951, il fut chargé de faire le rapport qui proposait de mettre en place une caisse de grève. Examiné en commission spéciale, ce projet, issu de la commission exécutive et accepté par le bureau fédéral, visait à créer une caisse fédérale de défense professionnelle pour soutenir les adhérents en cas de grève. Facultative avant-guerre, efficace durant les conflits de l’année 1936 pour les syndiqués victimes de l’ostracisme du syndicat dominant, cette caisse de résistance était devenue un enjeu capital pour la crédibilité et l’indépendance du syndicat. Malgré la nécessité d’une augmentation sensible des taux de cotisations syndicales, une large majorité de 217 mandats contre 34 et 12 abstentions se dégagea en faveur de l’acceptation du projet à l’issue d’une longue discussion en séance plénière. Installée dès le 1er janvier 1952, la caisse de résistance permettait aux adhérents de faire le choix entre trois catégories comportant chacune un niveau d’indemnité en cas de grève. Ce système original, inédit alors en France, s’inspirait des pratiques des syndicalistes chrétiens belges et hollandais. Au cours de l’année 1951, Edmond Szymanski et Joseph Sauty étaient allés consulter leurs collègues syndiqués belges qui leur avaient garanti une caisse de réassurance. Cette instance pouvait ainsi remplir aussitôt les fonctions qui lui étaient assignées dans différents conflits surgis dès cette première année.

Edmond Szymanski dans le rapport financier à Alès en septembre 1952 en démontra l’intérêt et l’efficacité. Malgré l’obligation pour les responsables syndicaux d’envoyer le double des bordereaux à la Fédération en vue d’un contrôle nominal, la confiance fut telle que le nombre des adhérents fut presque doublé d’une année sur l’autre. En cas de grève, comme ce fut le cas en 1953, 1963, 1968 sans compter les grèves partielles ou locales, les militants envoyaient la liste des grévistes et le trésorier établissait le bordereau de paiement. Chaque année, Edmond Szymanski rendait compte à la commission financière et au bureau fédéral de la situation de cette caisse de grève.
Edmond Szymanski siégea aux côtés de Louis Delaby comme administrateur à la CAREM (Caisse Autonome de Retraites des Employés des Mines), puis comme administrateur et vice-président du Conseil d’administration des Houillières du Nord-Pas-de-Calais, au Conseil d’administration de CDF, de CDF Chimie. Il fut nommé secrétaire général de la Fédération nationale des ETAM. des mines en 1954, puis devint le président lors du congrès de Forbach en 1956. Lors de la grève des mineurs de 1963, avec Jean Bornard, il accompagna Joseph Sauty à la table des négociations et fournit une base de référence comparative pour justifier les pertes de salaires des mineurs. Il n’hésita pas une seconde à suivre Joseph Sauty dans sa décision de refuser la déconfessionnalisation du syndicat. Edmond Szymanski continua d’assurer la trésorerie de la fédération des mineurs CFTC « maintenue » ainsi que la présidence de la Fédération des ETAM. Devenu ensuite président d’honneur de cet organisme, il reçut des mains de Jules Catoire la médaille de chevalier dans l’ordre de la Légion d’honneur au titre du ministère du Travail, le 12 septembre 1981. Durant ce même mois, avec Jean-Pierre Jereczk, il accompagna et servit d’interprète à Jean Bornard, invité par Lech Walesa au premier congrès du syndicat Solidarnosc à Gdansk ; il resta en contact suivi avec les membres de ce syndicat.

Il assuma la présidence du conseil d’administration de l’imprimerie de la Centrale de Lens et céda en 1996 cette responsabilité à Fernand Miersman , également responsable CFTC. En retraite depuis 1988, Edmond Szymanski s’est investi dans l’équipe locale des « Restaurants du coeur » à Escaudain où il revint demeurer dès 1987. Il continua d’assurer la représentation de sa centrale syndicale à la fondation Finet, organisme siégeant à Luxembourg et chargé d’examiner les dossiers de candidats à la bourse d’études réservées aux orphelins d’accidents du travail dans les mines et la sidérurgie des pays de la Communauté européenne. Spécialiste des questions financières, habile dans la négociation, tenace et ardent dans ses convictions, ayant le sens de la répartie, Edmond Szymanski avait très régulièrement mis sa plume quelquefois acérée au service de l’Echo des Mines, journal de la Fédération des mineurs CFTC.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article139745, notice SZYMANSKI Edmond par Bruno Béthouart, version mise en ligne le 23 février 2012, dernière modification le 10 septembre 2015.

Par Bruno Béthouart

SOURCES : L’Écho des Mines, numéro spécial « noces d’or », 17 avril 1994. - Interview d’Edmond Szymanski le 4.10.1993 et le 25.06.1997. - Courrier d’Edmond Szymanski le 28.01.1998. - Interview de Jean Bornard le 20.03.1995. - Supplément à l’Écho des Mines édition spéciale, juillet 1974, « 1924-1974 un demi-siècle au service des travailleurs des mines, La fédération des mineurs CFTC ( ouvriers, ETAM, Ingénieurs, Retraités) », La Centrale, Lens. - « Cent ans de syndicalisme chrétien, 1887-1987 », supplément à Syndicalisme CFTC, n° 229, novembre 1987. D. Cooper-Richet, « Les étapes syndicales des ETAM de la mine », Le Mouvement social, octobre-décembre 1993. — Louis Delaby, La Trouée, Liévin, Imprimerie la Centrale, 1977. — Jacques Tessier, : La CFTC Comment fut maintenu le syndicalisme chrétien, Paris, Fayard, 1987. — Bruno Béthouart, « CFDT/CFTC : la rupture de 1964 » in Ruptures dans le religieux contemporain, Cahiers de la Maison de la Recherche, Lille III, p. 71-85.

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