MARCHAND Josette, épouse MOREAU

Par Jacques Blin

Née le 9 décembre 1919 à Annonay (Ardèche), morte le 8 février 2012 à Cournonsec (Hérault) ; institutrice ; militante du SNI ; communiste ; militante du Secours populaire ; animatrice d’auberges de jeunesse.

Josette Marchand, peu avant son décès, archives familiales.
Josette Marchand, peu avant son décès, archives familiales.

Josette était la fille de Jacques, Élysée Marchand, né à Chateaurenard (Bouches-du-Rhône), tisserand aux usines Binet d’Annonay et de Marguerite Féasson, née en Ardèche, également ouvrière-tisserande.

Le père de Josette qui était analphabète fut très fier de voir sa fille devenir institutrice. Celui-ci, lors de sa conscription en 1914 ne parlait que le provençal : il y avait à cette époque un traducteur à la caserne d’Avignon (Vaucluse).

Son père ayant été gravement blessé à la guerre, elle fut reconnue pupille de la Nation grâce à une institutrice. Elle put ainsi bénéficier d’une bourse pour continuer ses études.
Elle entra à l’école normale de Privas (Ardèche) en octobre 1936 et prit son premier poste en octobre 1939. En raison de la mobilisation, elle fut nommée à Derras, sur le plateau ardéchois en 1941. C’est là que commencèrent ses années de Résistance. Membre du Centre laïque des auberges de jeunesse dès 1939, du Parti communiste clandestin dès 1941, elle entra en résistance au sein des Camarades de la Route puis adhéra aux FTP.

En mai 1943, elle fut prévenue de l’arrestation sur dénonciation de son réseau au centre de Lyon. Elle dut quitter son poste précipitamment. Son rôle au sein des Camarades de la Route fut de distribuer des tracts appelant à la lutte en Drôme et en Ardèche, de rechercher des correspondants pour héberger les « pourchassés » comme elle écrivait : ceux des Auberges, les Juifs, les communistes, les réfractaires au STO. Au sein des FTP, elle assura le rôle de courrier entre Lyon et Limoges, Limoges et Paris, Paris et Lyon. Ce furent alors les passages de la ligne de démarcation, les valises pleines de tracts et de fausses cartes d’identité. C’est dans une réunion à Limoges qu’elle rencontra celui qui devint son mari, Gérard Moreau, qui la suivra dans les maquis d’Ardèche. Après le débarquement en Normandie, au sein des FFI, de juillet à septembre 44, elle aura le grade de sergent-chef. Son rôle sera alors l’aide aux familles de maquisards et résistants, les perquisitions aux domiciles des collaborateurs.
Ces années la marquèrent à jamais : expérience de la solidarité ouvrière dans cette maison Forcheron à Annonay (Ardèche), une sorte de petit immeuble où ne vivaient que des ouvriers dans deux où trois pièces et presque tous tisserands aux usines Binet.

Elle se maria en décembre 1944 à Paris ; leur premier enfant, Marie-Louise, naquit en 1945. Le couple Moreau, Gérard et Josette, dirigea en 1946 la maison d’enfants du château du Lieu, près de Nevers, qui accueillit les enfants « cabossés » de la guerre. C’est là que naquirent : Franck en 1946, Pascal en 1948, Laurent en 1950. En 1951, ce fut le retour dans l’enseignement avec des postes d’institutrice dans le Cher d’abord, puis le Midi. En 1958, Gérard Moreau prit la direction de l’auberge de Jeunesse de Sète. Créée fin 1946 par la municipalité Arraut*, elle était dirigée alors par Armande Camo-Maillet* et Robert Maillet.
À partir de là, elle s’engage dans une vie de militante syndicale et politique au sein du Parti communiste français. Ce fut aussi le temps où la famille s’ouvrit. À la suite de difficultés et de deuils familiaux, des nièces et neveux intégrèrent la famille : Marie-Jo, Sylviane, Jacky, Pascal, Pierre, Catherine puis d’autres adolescents : Louis, José, ensuite Marianne.

L’Auberge de la Jeunesse de Sète, située au flanc du Mont-Saint Clair, continua d’être le lieu vivant d’éducation populaire qu’avaient initié les époux Maillet. Gérard et Josette devinrent vite la référence de ce lieu qui fut internationalement connu par les ajistes sous le nom de villa Salis, nommée ainsi en raison du député Salis que la veuve avait léguée à la ville de Sète en 1938.

Responsable du Syndicat national des instituteurs à Sète, Josette Moreau fut très active pendant les grèves de 1968.

En 1972, Gérard et Josette Moreau quittèrent Sète pour Clermont-l’Hérault où ils avaient choisi de vivre leur retraite : Ils aménagèrent la propriété, continuèrent de militer aux Auberges de Jeunesse, au Parti communiste. Ce fut aussi le temps des voyages : Algérie, Afrique, Antilles, Polynésie, Nouvelle-Calédonie, Cuba où elle trouva beaucoup de joies. Sans doute aussi y puisa-t-elle la force de dépasser l’amertume de certaines désillusions politiques. Combative elle se tourna vers l’action sociale au sein du Secours populaire dont elle fut une bénévole passionnée, jusqu’en 2006-2007.

Repliés dans un espace de verdure et de calme ce fut également l’occasion pour Josette et Gérard de recevoir, les enfants, les petits enfants et les amis. La vieillesse et la maladie les obligèrent à quitter leur maison de Clermont-l’Hérault pour s’installer à Sète. Gérard décéda le 2 novembre 2009 à la maison de retraite de Cournonsec (Hérault) où il s’était retiré avec Josette. Mais, avec la mort de Gérard, elle avait perdu le moteur de sa vie. Pour ne pas renoncer elle s’occupa, créa une bibliothèque et un club de scrabble. Malgré cela, peu à peu, l’énergie disparut et les angoisses la submergèrent définitivement.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article140084, notice MARCHAND Josette, épouse MOREAU par Jacques Blin, version mise en ligne le 1er avril 2012, dernière modification le 10 août 2021.

Par Jacques Blin

Josette Marchand, peu avant son décès, archives familiales.
Josette Marchand, peu avant son décès, archives familiales.

SOURCES : Jacques Blin, Regards engagés sur 1968 à Sète, pour témoigner de ce moment militant, édité à compte d’auteur, 10 mai 2008, 106 p. — Alain Degage (dir.), Les rues de Sète, éditions Ville de Sète, 1988, p. 57. — Éléments du parcours de sa vie écrits par sa fille Marie-Louise à l’occasion de son décès.

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