LUX Richard

Par Françoise Olivier-Utard, Léon Strauss

Né le 22 février 1914 à Mommenheim (Basse-Alsace annexée), mort le 18 juin 2009 à Strasbourg (Bas-Rhin) ; avocat ; communiste, membre du bureau fédéral du Bas-Rhin en 1947, du comité fédéral de 1948 à 1950, secrétaire départemental du Front national en 1945-1946, exclu du PCF le 31 janvier 1953.

Son père, Émile, était manutentionnaire à la gare de Mommenheim. Sa mère s’appelait Octavie Richard. La famille était catholique. Richard fit ses études à l’université de Strasbourg. Il suivit la préparation militaire supérieure proposée aux étudiants et devint officier de réserve. Il adhéra au mouvement des Jeunesses de l’UPR (Union populaire républicaine, parti catholique de droite et autonomisant). Il s’inscrivit au barreau de Strasbourg. Il fut mobilisé comme officier de réserve au moment de la seconde guerre mondiale. Il revint ensuite en Alsace annexée de fait. Le 1er juin 1944, il fut convoqué au camp d’entraînement SS allemand de Cernay (Sennheim), avec quarante deux autres officiers de réserve français d’origine alsacienne, alors que la Wehrmacht s’était interdit jusqu’alors de mobiliser les anciens officiers alsaciens de l’armée française. On leur demanda de servir dans la Waffen SS. Ils refusèrent en bloc et furent alors transférés, le 14 juin, au camp de Bruss, en Pologne. Les internés discutèrent sur le principe de signer ou non un engagement d’allégeance au Reich et au Führer. Richard Lux défendit l’idée que la signature leur permettrait de sortir du camp, seul moyen d’échapper à l’incorporation de force. Il ne fut suivi que par sept de ses camarades. Il signa son engagement le 11 juillet 1944 et s’évada quinze jours plus tard. Les 42 autres officiers français réfractaires furent déportés au camp de concentration de Neuengamme le 3 août 1944 , où on leur signifia le 27 novembre que Himmler les avait condamnés à mort . Classés « NN » « Nuit et Brouillard »,vingt deux d’entre eux moururent avant la libération du camp, les vingt autres purent rentrer à la fin de la guerre. A leur retour ils menèrent une campagne de presse dans le Haut-Rhin et le Bas-Rhin pour dénoncer l’attitude collaboratrice de Richard Lux.

Après son évasion, ce dernier avait rejoint l’Alsace, s’était engagé dans les FFI et avait même adhéré au parti communiste à la fin de l’année 1944. En 1945, il devint secrétaire départemental du Front National à Strasbourg. Il fut arrêté pour collaboration, sur instruction du 5ème bureau, en juin 1945, ce que l’Humanité interpréta comme « une manifestation de l’esprit de la Cagoule » et suscita une protestation du Front National. Les choses n’allèrent pas plus loin. Dans les milieux du barreau strasbourgeois, selon la police, on estimait qu’il était une recrue de choix pour le parti communiste mais qu’il n’y avait adhéré que par intérêt, pour échapper à l’épuration. Lux fut élu membre du bureau fédéral en 1947, puis membre du comité fédéral en 1948 et 1949. Il ne fut plus proposé en 1950 car les arguments qu’il avançait dans la presse pour justifier son attitude passée ne satisfaisaient personne.

Richard Lux se désolidarisa du parti en 1953, au moment du procès de Bordeaux, qui eut à juger les jeunes alsaciens incorporés de force qui participèrent au massacre d’Oradour-sur-Glane. Il accepta de prendre la défense de l’un d’eux, alors qu’à l’Assemblée, Marcel Rosenblatt*, député communiste du Bas-Rhin et ancien déporté de Dachau, menait un combat acharné contre les responsables de ces crimes. Le journal Franc-Tireur annonça dès le 29 janvier son exclusion imminente pour déviationnisme, avant même l’ouverture du procès. Il fut effectivement exclu le 11 février 1953. Il fut plus tard maire de Wilwisheim (Bas-Rhin). En février 2009, il écrivit au président Sarkozy pour l’adjurer de reconnaître la responsabilité de la France dans l’abandon de l’Alsace et de la Moselle en 1940.

Il avait épousé Maria Kubler en 1940, à Mommenheim. Un deuxième mariage, avec Liliane Ramstein fut enregistré à Laxou (Meurthe-et-Moselle) en 1961.
Il était titulaire de la Croix de guerre 1939-1945 au titre de la Résistance, de la Croix du combattant volontaire de la Résistance, Chevalier du Mérite agricole.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article140318, notice LUX Richard par Françoise Olivier-Utard, Léon Strauss, version mise en ligne le 17 avril 2012, dernière modification le 3 janvier 2020.

Par Françoise Olivier-Utard, Léon Strauss

SOURCES : Archives du comité national du parti communiste. – Arch. dép. Bas-Rhin, 544 D 1,3 - Arch. dép. Haut-Rhin 544 D 40. — L’Humanité d’Alsace et de Lorraine , 20 juin 1945. — La Presse Libre, 24 juin 1945. — La Tribune de Mulhouse et L’Alsace libérée du 14 septembre 1945. — DNA, 9 juin 2005, 20 juin 2009, 31 décembre 2009. — Cyrille Gillig, L’honneur des Quarante-Deux, Saisons d’Alsace, été 1944, p.197-202 (réédition dans Bernard Reumaux et Alfred Wahl (dir.), Alsace 1939-1945. — La grande encyclopédie des années de guerre, Strasbourg, 2009, p.1351-1356). — Eugène Riedweg, Les « Malgré Nous ». Histoire de l’incorporation de force des Alsaciens-Mosellans dans l’armée allemande, Mulhouse, 1995, p.139-142. — Jean-Laurent Vonau, Le procès de Bordeaux. Les Malgré-Nous et le drame d’Oradour, Mulhouse, 2003, p. 146, 241 (n’évoque que le procès de Bordeaux, propose une biographie flatteuse quelque peu fantaisiste, passe sous silence la période 1944).

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