MORPHY Michel

Par Guillaume Davranche

Né le 15 avril 1863 au Royaume-Uni, mort le 24 janvier 1928 à Paris ; journaliste, romancier ; socialiste révolutionnaire puis boulangiste.

Né au Royaume-Uni d’un père anglais et d’une mère française, Michel Morphy semble avoir suivi sa famille en France lorsque son père fut nommé professeur au collège Chaptal, à Paris.

En 1879, à l’âge de seize ans, Morphy aurait été – selon lui – secrétaire du cercle socialiste de Montmartre, puis délégué de l’Union fédérative du Centre de la Fédération des travailleurs socialistes de France (FTSF).

En mars 1880, il prononça un discours sur la tombe du communard Théophile Ferré, à Levallois-Perret. Cela lui valut un mois de prison pour « cris séditieux » puis d’être expulsé vers la Grande-Bretagne, puisqu’il était ressortissant britannique. Rochefort, dans L’Intransigeant, fit campagne en sa faveur. Morphy, revint en France, et fut arrêté pour infraction à un arrêté d’expulsion. Le 28 janvier 1881, il fut pour cette raison condamné à un mois de prison.

De septembre 1881 à janvier 1882, avec l’aide financière de Poiret (voir Fernande d’Erlincourt), il lança un journal, La République sociale, « journal international littéraire » puis « organe du parti socialiste et des syndicats » dans lequel il fit campagne pour l’amnistie des communards. Le journal aurait été remplacé en 1882 par Le Drapeau rouge.

En 1884, Michel Morphy écrivit des articles pour La République démocratique et sociale, un journal dirigé par le député radical-socialiste Alfred Talandier. Il ne tarda pas à récolter des condamnations.

Ainsi, le 4 mars 1884, la 11e chambre du tribunal correctionnel lui infligea 50 francs d’amende pour atteinte aux bonnes mœurs. Il avait en effet rédigé un article jugé « pornographique » en compilant des passages scabreux tirés de l’Ancien Testament. Le reporter du Matin nota à l’audience : « Le prévenu […] déclare avec 19 ans, et il n’en paraît pas plus de 15. Il est petit, imberbe, ce jouvenceau qui se pose en réformateur de la vieille société. Avec cela une figure ingénue de chérubin. C’est dommage qu’il insulte le bon Dieu. On le lui donnerait sans confession. »

Le 8 mars, il comparut cette fois aux assises, pour « provocation au meurtre », suite à un article intitulé « Au travail ». Il fut inculpé avec le propriétaire du journal, le député de Vincennes Talandier. Le député bénéficia de son immunité parlementaire, mais Morphy fut condamné à six mois de prison et à 1 000 francs d’amende. Il fut incarcéré à la Santé, puis à Sainte-Pélagie.

Toute la presse le considérait alors comme anarchiste mais, au procès, il nia l’être, et se définit comme « socialiste modéré ». On ne relève d’ailleurs sa signature dans aucun journal anarchiste connu.

Ayant atteint sa majorité en prison, il opta pour la nationalité française.

Les 14 et 15 juillet, alors qu’une manifestation contestataire passait sous les fenêtres de Sainte-Pélagie, Morphy essaya de provoquer une rébellion. Le directeur de la Santé eut recours contre lui à « une mesure grave et sévère » pour le « mettre à la raison » (lettre au préfet en date du 13 décembre).

Le 19 août 1884, à la faveur d’un transfert à l’hôpital Cochin, Michel Morphy s’évada.

Cette même année, il publia un libelle anticlérical : Les Mystères de la pornographie cléricale, sous-titré Secrets honteux de la confession, immoralités, obscénités, etc. etc. Guerre aux prêtres, corrupteurs de la jeunesse !

Durant sa cavale, Michel Morphy lança un brûlot nommé L’Anti-Ferry. La police lui remit la main au collet le 11 février 1885. Le 27 avril 1885, la 9e chambre du tribunal correctionnel le condamna à 1 000 francs d’amende pour un article paru dans son journal, L’Anti-Ferry.

Après sa sortie de prison, Michel Morphy se lança dans la rédaction de romans, et devint peu à peu un grand nom du feuilleton populaire, auteur de quantité d’ouvrages à succès.

En 1888-1890, il devint un boulangiste fanatique.

En mai 1891, avec l’ex-anarchiste Lucien Pemjean, il édita une affiche protestant contre les massacres de Fourmies, qu’il fit apposer sur les murs de Belleville et Ménilmontant. Il tenta également de relancer son journal La République sociale, mais ce fut un échec (11 numéros entre octobre et décembre 1891).

Durant les législatives de mai 1898, il secondait Aristide Bruant, alors candidat antidreyfusard à Belleville. La presse le disait alors « ex-anarchiste et ex-boulangiste ».

Il poursuivit ensuite sa carrière de feuilletoniste et devint très riche, se faisant construire un hôtel particulier près du parc Montsouris, à Paris XIVe.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article141156, notice MORPHY Michel par Guillaume Davranche, version mise en ligne le 10 juillet 2012, dernière modification le 13 octobre 2012.

Par Guillaume Davranche

SOURCES : Le Gaulois, années 1881-1885. — Le Matin du 4 mars et du 6 juin 1884. — La Presse du 10 janvier et du 18 août 1884. ― Albert Bataille, Causes criminelles et mondaines, Dentu, 1889. ― La Liberté (Fribourg) du 22 mars 1891. ― Michel Morphy, Mon rôle dans le boulangisme, auto-édition, 1891. ― IIHS fonds Louise Michel ― Albert Verly, Le Général Boulanger et la conspiration monarchique, Ollendorf, 1893 ― Alexandre Zévaès, Aristide Bruant, Nouvelle Revue critique, 1943 ― Jean Maitron, Histoire du mouvement anarchiste en France, op. cit.

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