JOZON Raymond, Désiré dit Goujon

Par Daniel Grason

Né le 26 juin 1923 à Puteaux (Seine, Hauts-de-Seine), exécuté sommairement le 2 août 1944 rue du Pont à Suresnes (Seine, Hauts-de-Seine) ; tourneur outilleur, manoeuvre ; résistant FTP.

Fils de Louis, forgeron et d’Eugénie, née Rousseau, blanchisseuse, Raymond Jozon, demeurait chez ses parents 19, rue Marius-Jacotot à Puteaux. Titulaire du Certificat d’études primaires, doté d’une qualification professionnelle de tourneur outilleur, il s’engagea volontairement en août 1942 dans la Marine, à Toulon (Var). Démobilisé en décembre, il fut recensé pour le Service du travail obligatoire. Il n’appartenait à aucun parti politique. Il travaillait comme manœuvre chez Vetra, 24 rue des Pavillons, à Puteaux. En mars 1944, à la suite d’une mésentente avec son chef d’atelier, il quitta l’entreprise et partit à la campagne.

Raymond Jozon revint à Puteaux pendant la deuxième quinzaine du mois de mai. Son ancien patron ne voulant pas lui donner de certificat de travail, il ne trouvait pas de travail. Dans un café de la ville, il entra en conversation avec un jeune homme et lui fit part de ses difficultés. Celui-ci lui proposa d’entrer dans une organisation patriotique. Raymond Jozon lui demanda quel serait le travail. Il lui répondit qu’il s’agirait de récupérer des tickets de pain dans les boulangeries et du tabac dans les débits, puis remettre le fruit de ces actions aux patriotes. Le recruteur parla d’une rémunération mensuelle, sans en annoncer le montant, le nom de l’organisation lui fut occulté.
Un autre contact eut lieu avec Jojo, qui lui conseilla de prendre un pseudonyme. Raymond Jozon devint Goujon, membre du bataillon Vengeance des FTP (région P 6). Il fit connaissance avec Garnier (Albert Mansion), Jojo était Georges (Georges Schlepp) et Christian dont le nom resta inconnu.

La deuxième quinzaine de mai, il participa à la récupération de tickets dans une boulangerie de Courbevoie (Seine, Hauts-de-Seine) avec Georges Schlepp et un inconnu. Il resta à l’extérieur de la boutique avec Christian. En juin un véhicule Citroën fut volé à l’Etoile, le chauffeur était au volant, il conduisit Georges Schlepp, Christian et Raymond Jozon jusqu’à la porte Maillot, là il fut sommé de descendre de l’automobile. Au tout début juin Albert Mansion, Georges Schlepp, Christian et Raymond Jozon allèrent à Levallois-Perret (Seine, Hauts-de-Seine). Tandis que Christian garait le véhicule, les trois autres armés pénétrèrent armés dans le débit de tabac. Le buraliste fut sommé de donner du tabac pour les patriotes, il refusa. Sous la menace des armes, il fut prié de se mettre à l’écart, deux cents paquets de cigarettes et une centaine de paquets de tabac furent raflés. Le lendemain, Raymond Jozon se vit attribuer trois paquets de cigarettes et deux de tabac. Le même type d’opération eut lieu à Rueil-Malmaison. La patronne du débit refusa, l’exhibition des armes eut raison de ses réticences.

Le 19 juin Georges Schlepp et Raymond Jozon reçurent l’ordre de récupérer une arme sur un allemand. Tous les deux étaient armés, ils aperçurent un militaire sur le pont de Suresnes. Ils arrivèrent à sa hauteur l’arme à la main, ils tentèrent de lui faire comprendre qu’ils voulaient son revolver. Le caporal Émil Roth, de l’armée de l’air tenta de dégainer son arme. Georges Schlepp tira, le militaire s’effondra, Raymond Jozon coupa avec son couteau le ceinturon de l’homme qui gisait à terre et récupéra l’arme et l’étui. Ils prirent la fuite sans être inquiété.

Également en juin, Raymond Jozon, Albert Mansion et Christian accompagnèrent Georges Schlepp à Rueil-Malmaison. Celui-ci rentra dans une quincaillerie et tira plusieurs coups de feu contre le commis membre du PPF, il fut blessé. Quatre-vingt-cinq litres d’essence furent récupérées dans un garage, en échange d’un bon signé des patriotes. Le 26 juin, le centre de ravitaillement de Rueil-Malmaison fut visité. Après un vigoureux « les mains en l’air ! » les deux gardiens de la paix se virent confisquer leurs armes, les tickets d’alimentation furent pris au civil chargé de les distribuer. Le 30 juin, un débit de tabac de Vitry-sur-Seine (Seine, Val-de-Marne) reçu la visite de quatre membres du groupe, cinq cartouches de Gauloises et deux cent quarante paquets de tabac furent confisqués. Le 5 juillet, le magasin Maggi d’Asnières reçu la visite de cinq hommes armés, vingt-cinq kilos de sucre, quatre-vingt kilos de pâtes et quatre kilos de confiture furent emportés.

Raymond Jozon fut arrêté le 6 juillet 1944 par trois inspecteurs de la Brigade spéciale antiterroriste n° 2, alors qu’il se présentait avec Albert Mansion 16 rue Carles-Hébert à Courbevoie, domicile clandestin de Georges Schlepp appréhendé depuis quarante-huit heures. Raymond Jozon n’était porteur d’aucun objet ou document, la perquisition effectuée au domicile de ses parents fut infructueuse. Lors de son interrogatoire dans les locaux des brigades spéciales, il déclara avoir touché six cent francs d’appointement depuis qu’il était entré dans l’organisation.

Outre Raymond Jozon et Georges Schlepp* d’autres membres de l’organisation furent arrêtés : Marcel Laurent*, Claude Guy*, Robert Degert*, tous les cinq furent fusillés. Arrêtés également, Albert Mansion, Roger Salomon, Eugénie Laurent, Lucien et Jeanne Angelard furent déportés le 15 août 1944. Le convoi partit de la gare de Pantin, les installations de la gare de l’Est ayant été détruites par la Résistance. Albert Mansion, Roger Salomon, Lucien Angelard arrivèrent le 20 août à Buchenwald (Allemagne), ils furent transférés à Dora, ils décédèrent à Ellrich, Albert Mansion le 18 janvier 1945, Roger Salomon le 9 mars et Lucien Angelard le 4 avril. Les deux femmes prirent la direction de Ravensbrück, Eugénie Laurent fut affectée au commando de Torgau dans une usine de munitions et d’explosifs, elle mourut à Ravensbrück le 21 décembre 1944. Jeanne Angelard fut libérée en avril 1945 de Schönefeld.

Incarcéré, mis à la disposition des Allemands, Raymond Jozon fut exécuté nuitamment avec Georges Schlepp, devant le 9 Rue du Pont à Suresnes, lieu de l’attentat contre Émil Roth. Le commissariat de la circonscription de Puteaux, Nanterre, Suresnes fut alerté le 2 août à cinq heures quarante-cinq du matin, un brigadier et des gardiens de la paix se rendirent sur place. Réveillés à cinq heures vingt par le bruit des détonations deux hommes témoignèrent avoir aperçu six ou sept soldats allemands à proximité des deux victimes. Selon l’un des témoins, après la fusillade, l’un des soldats allemands attacha à la jambe gauche de Georges Schlepp un carton sur lequel était écrit : « C’est ici, où nous avons assassiné un soldat allemand, et pour cela nous avons été fusillés ».

Après la Libération, Raymond Jozon fut inhumé au carré militaire du cimetière nouveau de Puteaux. Sa tombe porte la mention « Mort pour la France ». Son nom figure sur le monument aux martyrs de la Résistance de la ville de Puteaux.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article143026, notice JOZON Raymond, Désiré dit Goujon par Daniel Grason, version mise en ligne le 14 novembre 2012, dernière modification le 26 février 2017.

Par Daniel Grason

SOURCES : Arch. PPo. BA 1801, BA 2104, BA 2117, PCF carton 16, KB 1, 77W 1138, IML 1944. - La Fondation pour la Mémoire de la Déportation, Livre-Mémorial, Éd. Tirésias, 2004. - Arch. Mun. Puteaux.

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